Les seigneurs de Malte Tome 2

Partie III : 22. Lesso

Je descends d'un trait mon verre de vodka et pendant que le liquide me brule la gorge plus que d'habitude, je fais un lancer phenomenal de mon verre qui se brise à la rencontre du mur, faisant un son quasi mélodieux mais beaucoup trop bref à mon goût. Peut-être que j'aurai fait un malheur au baseball dans une autre vie.

Je souris comme un idiot, sachant pertinemment que ma vaine tentative pour esquiver mes pensées est totalement ridicule.

Je n'arrive pas à oublier. Je ne parviens pas à sortir toutes ces scènes dramatiques de mon crâne.

En plus de mentir, d'être une traitresse et une meurtrière, Magenta nage dans l'alcool. Elle est là, dans un coin de mon esprit et le pire c'est que je ressens un vide lorsque je pense à elle. Un vide et une panoplie d'autres sentiments qui me donnent envie de vomir.

La moindre parcelle que Magenta n'occupe pas dans ma tête, Iris y siège. Elle y règne en maîtresse incontournable. Cette fois je l'ai définitivement brisée. Elle ne veut plus jamais me voir et c'est... ce que je voulais ? Je ne sais plus. Je suis parfaitement conscient de tout ce que je lui ai dit. J'ai été horrible avec elle et je sais qu'elle a pleuré. Je sais qu'elle n'a rien raconté à personne. Elle a intériorisé chacune de mes paroles et de mes attitudes et elle a pleuré pour chacune d'entre elles. Je suis même surpris de la connaître autant. Je sais que je lui ai fait énormément de mal mais il le fallait. Je ne me serai jamais détaché d'elle par moi-même et elle non plus ne l'aurait pas fait. Il a suffit d'un message pour qu'elle accoure ici et qu'elle s'inquiète. Iris n'est pas prompt à la colère, elle n'est pas rancunière, elle n'est pas mesquine. Toute cette rage qui bout maintenant au fond d'elle, c'est à cause de moi. Elle m'a hurlé dessus comme jamais elle ne l'avait fait au paravant. Tout son corps me disait que je lui faisais mal. Le pire c'est que je pensais réellement plusieurs choses que je lui ai dite. Sa famille a eu tort de penser que je pouvais être derrière son agression mais s'il s'agit de lui faire du mal, ils ont raison à propos de moi.

Elle ne veut plus jamais me voir mais peut-être qu'au fond elle aurait aimé que je la retiennes ? Non je ne pense pas. Pourquoi voudrait-elle qu'un sale type comme moi reste dans sa vie ? Elle me déteste c'est certain maintenant. Du moins je l'espère parce que moi je me déteste.

Il est évident que j'ai fini par l'épuiser elle aussi. C'est naturel. C'est le bon ordre des choses. Je mérite que Magenta se soit joué de moi. Je mérite d'être l'object d'un complot. Ce qui m'est incompatible et inaccessible c'est qu'Iris veuille encore me parler un jour. Ça c'est impossible.

Je suis tellement en colère. Je ne sais même pas pourquoi j'en veux à Magenta alors qu'elle est juste aussi fausse que moi mais tout ce qui arrive est de sa faute. Je savais ce qu'elle faisait mais elle est tellement belle. Je l'ai laissé faire parce que je me disais que ce n'était qu'un jeu de plus et que j'allais gagner comme à chaque fois. Je me disais qu'aucune femme ne pouvait me faire me sentir mal. Aujourd'hui, me voilà paumé comme un con. Je ne suis même pas ivre mais je ne me sens pas moi-même. Il faut absolument que je rentre chez moi et que j'oublie tout ce qui s'est passé à Moscou. Je veux effacer tout ça de ma mémoire et revenir à l'homme insouciant et impétueux que j'étais.

Dans un coin de mon esprit, je sais bien que Magenta n'a pas pu être fausse avec moi sur toute la ligne. Je m'y refuse et je suis presque convaincu que j'ai réellement vu une partie de son être même si elle était minuscule mais tout ceci n'a aucune importance. Soit j'ai foi en cette affirmation soit je m'y rattache comme une bouée pour me sentir moins idiot.

De l'autre côté, j'ai blessé celle qui voulait être mon amie. La seule qui voulait réellement mon bien. Je ne suis pas fait pour les sentiments, je ne les comprends pas. Je suis départagé en moi-même et je ne sais même pas ce que je regrette le plus, qui je regrette le plus.
Je suis complètement largué. Je ne sais ni dire ce que je ressens ni pour qui je le ressens.