Trois mois plus tard.
Enfermé dans cette routine infernale, je comptais les jours sans bouger. Lundi, mardi... qu'y avait-il après le mardi, déjà ? Cela n'avait plus d'importance.
Je me remis lentement à penser. Et si je réessayais d'appeler ? Non, j'ai échoué tant de fois...
Pourquoi pas une dernière fois ? Cela faisait un mois que je n'avais pas appelé.
Juste une dernière fois... et après, je ne rappelle plus jamais, de toute mon existence.
Un dernier appel.
Puis ensuite, plus rien. Je ferai en sorte de tout oublier, quitte à mettre mon bonheur en péril. Plutôt l'oublier que finir mes jours en pensant à elle. C'était mieux pour moi, et même si cela me faisait souffrir, j'arrêterai au moins de me torturer l'esprit.
Première sonnerie.
Deuxième sonnerie.
Troisième sonnerie.
-Allô ?
Mon sang ne fit qu'un tour.
J'écarquillai les yeux, et mon cœur se serra si fort que j'eus l'impression qu'il allait exploser. Enfin, elle répondait. Mais que lui dire ? Comment ?
Incapable de dire un seul mot, la voix répéta.
-Allô ?
C'était une voix de femme. C'était sa voix. C'était elle.
Une larme coula désespérément sur ma joue, et sans que je ne puisse m'en empêcher, une autre la suivit.
-Marilyn ?
Ce fut tout ce que je trouvais à dire. Je savais que c'était elle. Ce que je pouvais être stupide...
Un long silence s'ensuit. Mon cœur battait à la chamade, et je croisais le reflet de mon regard dans le petit miroir de ma chambre. J'eus de la peine pour ce que je vis.
Un long soupir s'échappa du téléphone, puis un reniflement.
Pleurait-elle ?
-Je suis sa mère. Qui êtes-vous ?
Comment ? Elles avaient exactement la même voix... ou alors, mon cerveau me jouait un tour, et j'avais des hallucinations.
-B...bonjour madame. Je suis un ami de votre fille, je m'appelle Elias.
-Enchantée, Elias.
Je réfléchis pendant quelques secondes, et les battements de mon cœur ralentirent.
-Pourriez-vous...enfin... Comment va-t-elle ? Pourquoi n'ai-je plus de nouvelles ? Que se passe-t-il ?
Encore un lourd silence.
-Ma fille Marilyn est... morte, il y a cinq ans déjà.
Cette réponse eut l'effet d'un coup de poing dans mon ventre. Ma respiration se coupa sèchement.
-Mais, madame... Je l'ai rencontrée dans notre lycée, elle m'avait entendu jouer du piano. Je l'ai invitée à dîner, et nous avons passé quelques jours ensemble. Me faites-vous une blague ?
Oh, elle blaguait. Mais oui, elle blaguait. Je me mis à sourire.
-Ma fille est morte. Je suis désolée.
Ces mots me firent l'effet d'un poignard lancé droit dans mon cœur. Mes pensées s'arrêtèrent de tourner, et mes yeux se figèrent.
BIP.
VOUS LISEZ
L'homme au piano
RomansaC'était une amoureuse des détails. Elle avait cet éclat dans les pupilles qui m'interpellait ; elle avait le plus beau de tous les regards que j'avais croisés. Et j'aurais pu m'y plonger pendant l'éternité, sans me lasser.