11. Byzantine Generals

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« La stratégie que l'on travaillera à partir de maintenant sera celle des Généraux Byzantins. » annonça le Roi, debout devant une assemblée de quinze pions, à l'écoute malgré leur rancœur. « Je compte sur vous, même si je sais que l'atmosphère n'est pas des meilleures entre nous.
-Votre Majesté, si je puis me permettre. Cette tactique, nous l'avons déjà utilisée, et nous avons dû sacrifier la Reine. Les Pions de première ligne peuvent ressusciter indéfiniment, mais si nous gagnons, quel sera le prix à payer ? Un Cavalier, deux Tours ? » demanda le Fou Noir, visiblement inquiet.

« Je n'en sais rien. » il marqua une pause. « Si vous sentez que les Blancs gagnent trop de terrain...surtout, que les attaques soient dirigées vers la Reine et son Cavalier. La finesse de la Dame et l'intelligence de son second...c'est le seul danger. »

Tout en prononçant ces mots, Taehyung ne pouvait s'empêcher de songer à ce sourire qui l'avait envoûté, dans la neige ; cette liberté dans ses yeux, la pâleur de sa peau et le blanc des cheveux de Yoongi, se fondant dans l'hiver étaient précieux, même sa Reine n'avait pu lui offrir un tel cadeau ; sa couronne n'était rien, rien du tout. Les joyaux, qu'ils se dispersent au vent ! L'or, qu'il devienne de la poussière !

Mais ce visage, il était incomparable, impossible pour le Roi Noir de le jeter dans les décombres de sa mémoire comme il l'avait fait avec des dizaines d'autres.

Il était pourtant temps d'aller annoncer que le choix de la stratégie avait été fait aux adversaires, et il n'y avait que le chef des pions qui avait ce rôle.
Plus le temps passait, plus Taehyung avait l'impression que le sadisme de l'échiquier et de ses règles n'égalait rien au monde. Que la haine salissant le damier de ses flaques rouges carmin s'incrustait dans ses veines, et le transformait en une créature plus monstrueuse encore que la plus détestable des horreurs de ce monde.

« On devrait penser à donner une date, non ?
-Bah, de toutes façons, ce sera en décembre prochain. Tu veux vraiment avancer le moment où on va tous potentiellement mourir, Namjoon ?
-Non, mais je pensais qu'il faudrait, maintenant que l'on a notre tactique, qu'on l'a peaufinée et travaillée, je pense qu'il serait bien de la mettre en œuvre pendant qu'elle est encore fraîche.
-Tu proposerais quoi ?
-Mars. Le 9 mars.
-On est en...février ? Moui, pourquoi pas.
-Je croyais que tu ne voulais pas t'y mettre trop tôt. »

Seokjin soupira.

« En fait, j'ai repensé à ce que tu m'as dit, le mois dernier, à propos du plateau secondaire qui pourrait être le nôtre.
-...Ah.
-Je crois que...je n'ai pas envie de vivre comme ça. D'être un pion que l'on déplace à sa guise sur des cases, qui n'est rien de plus qu'un jouet de bois peint posé sur le bord de l'échiquier en attendant la prochaine partie. Ce...ce n'est pas juste.
-Je ne le disais pas sérieusement.
-Et pourtant, c'est tellement plausible... »

Le Cavalier croisa ses bras, serrant plus fort le Fou qu'il tenait dans sa main. La petite pièce devenait moite, et soudain, la pensée qu'il était tout simplement en train d'étouffer un véritable être humain aux même morales que lui lui devint insupportable, et le lâcha.
Il roula au sol un instant, puis vint rebondir contre le pied de la table.

Le Fou est mort.

☆彡

« Cavalier en E5 ! » hurla le Roi à son second, ce dernier prenant la direction indiquée.
L'échiquier était maculé de sang, de cadavres, de mort, mais les Noirs continuaient d'avancer, malgré la perte de leur Reine, de presque la totalité de leurs pions de première ligne, et combattant avec un désespoir visible ; cependant, leurs actes étaient toujours coordonnés et réfléchis, ce qui, éventuellement, les amena à la victoire.

Le Roi Blanc était défendu par un pion, mort de peur sur sa case, alors que la Tour et le Cavalier adverse se chargeaient de le repousser vers un coin.
Puis, le souverain Noir, d'un pas décidé, avança sur le damier pour faire face à son opposant, et prononcer les mots qui signaient la fin de la partie :

« Échec et mat ! »

Et l'épée sanguinolente, tranchante, traversait déjà le cœur de son adversaire, ses yeux exorbités rivés sur l'homme qui, de son regard froid, ne lui laissait aucun échappatoire, encerclait totalement son champ de vision et lui coupait le dernier souffle qu'il prenait en ce monde.

Il y eut un long silence, puis les pions restants soupirèrent d'une très profonde expiration, contemplant, une fois de plus, la folie meurtrière de leurs existences.

« Votre Majesté, nous avons trouvé ceci à l'emplacement dernier de la Dame. »
Jungkook, le Fou, rapportait dans le creux de ses mains un bijou décoré de la couronne noire ; la tiare de la Reine.

Taehyung s'était alors juré de ne jamais la sortir du coffret dans lequel elle était contenue, et elle-même contenait des centaines de souvenirs dont personne ne voudrait.
Et c'était bien à cet instant que cette promesse refaisait surface que le Roi ouvrit la boîte de Pandore, décidé à l'offrir à quelqu'un pour qui il n'aurait aucun remord. Était-ce, encore une fois, un acte égoïste ? Qu'importe. Ils perdraient cette bataille, c'était certain. La technique des Généraux Byzantins était bonne, mais considérant les sentiments affectueux qu'il éprouvait à contrecœur envers la Reine Blanche, et l'absence de pitié dans cette tactique, ses décisions seraient influencées — et l'issue du combat de même. De plus, le Cavalier Blanc était intelligent, très, très intelligent. Sans doute que, prenant en compte la haine que ce dernier lui portait, il n'aurait aucune hésitation quant au massacre des Noirs. Ils n'avaient pas l'expérience, le sang-froid, l'apathie des pièces d'échecs, ils n'avaient rien qui leur permettrait de gagner, et pourtant, Taehyung en était persuadé, les Blancs remporteraient ce match pour la première fois depuis bien longtemps.

Cela ne le dérangeait pas. Ou plutôt, il préférait ne pas penser à son attachement à sa vie.

Plutôt mourir que de devoir assassiner Yoongi de ses propres mains.

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Et rebonjour !
J'avance, j'avance...lentement 🐌

 É𝔠𝔥𝔢𝔠 𝔢𝔱 𝔪𝔞𝔱 - TαҽɠιOù les histoires vivent. Découvrez maintenant