reticent ᵏⁱᵐ ᵗᵃᵉʰʸᵘⁿᵍ

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~ Jour Actuelle ~

"-et j'ai encore été coincé avec Mr Choi, pour un autre semestre et honnêtement, je ne sais même pas pourquoi il enseigne cette matière stupide parce qu'il ne peut même pas tenir un point de départ correctement vu qu'il est vieux de plusieurs millénaires à ce stade- Miran, est-ce qu'au moins tu m'écoutes ?"

Mon regard passe de l'emploi du temps de l'université que je tiens en main à ma meilleure amie, dont la voix – auparavant qui allait à la vitesse d'un TGV – s'était affaiblie quand je ne montrais aucun signe que j'écoutais.

"Bien sûr que j'écoutais !" j'ai gazouillé, en ajoutant un demi-sourire et en essayant de me rappeler de quoi elle avait parlé, "M. Choi et ses terribles compétences de positionnement, encore."

Le froncement de sourcils de Lia se transforme en sourire et elle se lance dans sa tirade sans plus de suspicion.

Lorsque nous arrivons aux bâtiments de l'université, nous faisons une pause et nous nous tournons l'une vers l'autre.

"Tu te rends compte que nous sommes déjà en troisième année ?" dit Lia, sa voix s'élevant dans l'excitation tandis qu'elle se gonfle fièrement, regardant autour d'elle avec des yeux brillants, "Waaah, notre dernière année..."

"Ça ne nous donne pas vraiment le droit de nous vanter," je glousse, "On a encore toute l'année à surmonter."

"Je sais... ça craint qu'on n'ait pas de cours ensemble," elle boude.

"On n'a jamais eu de cours ensemble, Lia, on étudie des filières complètement différentes."

"Ouais, mais quand même."

Je lui donne une légère poussée sur l'épaule avant qu'on accepte de se retrouver à la fin de la journée et suivons nos chemins séparés.

Je soupire dans le silence laissé par Lia, je scrute mon emploi du temps et je lève les yeux vers le bâtiment où mon premier cours doit commencer.

La faculté des Arts de l'Université de Yonsei est divisée en trois filières. Lia étudie la danse contemporaine et moderne. J'étudie les arts dramatiques et le théâtre, et un troisième département est consacré à la photographie et aux arts visuels.

Les trois départements interagissent rarement, mais les cours ont lieu dans le même petit groupe de bâtiments sur le campus, et donc croiser les étudiants des deux autres filières est assez commun, et c'est aussi comme ça que j'ai rencontré et que je me suis liée d'amitié avec Lia il y a deux ans.

Comment Lia et moi avions réussi à nous trouver sympathiques l'une l'autre est un mystère que je ne pourrais pas résoudre même aujourd'hui. Elle est bruyante, pétillante et extravertie, prête à parler à n'importe qui et à tous ceux qui la regardent un instant de trop. Je ne pourrais pas être plus différente si j'essayais ; calme et timide, j'ai eu du mal à m'intégrer dans une université avec un si grand nombre d'étudiants.

Et pourtant, alors que j'aurais trouvé la personnalité de Lia rebutante, son bavardage facile et son petit rire m'ont charmé dès qu'elle a commencé à parler.

Nous sommes restées amies depuis, et bien que nous ayons des classes différentes, nous passons nos après-midis ensemble, nous nous aidons mutuellement à faire nos devoirs et à discuter de ce qui se passe dans chacun de nos cours.

J'entre dans la classe, qui ne compte pour l'instant qu'un ou deux autres étudiants, et je me fraye un chemin jusqu'au fond de la classe, où je déballe mes affaires, aligne mon bloc-notes et mon stylo avant de m'adosser et de déverrouiller mon téléphone pour passer le temps.

Il ne faut pas longtemps – en raison du vide de la pièce – pour que je sente la brûlure des yeux d'une autre personne sur moi, et je lève rapidement les yeux pour attraper le coupable.

J'ai pu apercevoir des iris d'un bleu glacial avant qu'ils ne s'envolent, et l'homme à qui appartiennent ces yeux se réarrange maladroitement sur son siège, levant de longs doigts pour s'agiter dans un spectacle paniqué de feinte-nonchalance.

Je continue à le regarder, curieuse de confirmer ma théorie, et bien sûr, quand il sent que suffisamment de temps s'est écoulé, il jette timidement un nouveau coup d'œil vers moi.

Je lève les sourcils avec impatience, alors que ses yeux rencontrent les miens, et ses lèvres se séparent en signe de surprise d'avoir été surpris.

Apparemment humilié, l'homme me fait un signe de tête d'excuse dans ma direction avant de se retourner vers l'avant.

Il ne regarde plus derrière lui pendant que d'autres étudiants s'infiltrent par la porte.

Finalement, le conférencier entre, et pose sa mallette sur la table pour signaler le début du cours, je pose mon stylo, je le regarde avec impatience, prête à écrire.

Deux leçons plus tard, je me retrouve à attendre Lia à l'entrée, en train de réfléchir à la journée et aux devoirs abondants qu'on nous a déjà donnés.

Je repère Lia presque en même temps qu'elle me repère, et c'est presque comme si elle commençait à parler alors qu'elle est encore encore hors de portée de voix, parce que le temps qu'elle se mette à marcher à côté de moi, je suis perdue dans la conversation.

"-rrive pas à croire ce qui s'est passé, oh mon Dieu, Miran, notre nouveau professeur d'entraînement est l'homme le plus sexy de cette planète, il n'y a aucune chance qu'il soit qualifié pour nous faire la leçon, il ne peut pas l'être, il a le sourire le plus doux et la voix la plus douce et il est si doué pour enseigner et il-"

Je roule des yeux, lui sourit et acquiesce à son bavardage incessant, ajoutant occasionnellement des "ooh" et des "vraiment ?" pour faire bonne mesure.

"-mec me saute déjà à la gorge et ça ne fait qu'un jour et je veux juste respirer, tu vois ? Genre, c'est seulement le début de l'année, et je veux dire, j'ai l'intention d'essayer d'avoir la première place cette année juste pour voir le regard sur son visage. Et j'ai déjà un devoir théorique qui vaut une bonne partie de notre note semestrielle mais enfin bref, comment étaient tes cours ?"

Quelque part sur la ligne, le bourdonnement de la voix de Lia s'éteint et tout devient béatement paisible, jusqu'à ce que ma meilleure amie bavarde me pousse assez fort pour que je trébuche et que je perde presque  mes dents sur le pavé du trottoir.

"Hey !" je mords, "C'était pour quoi ça ?"

"Est-ce que tu m'écoutes au moins ?" Lia grogne, mais il y a un sourire amusant qui tire sur ses lèvres et qui me fait savoir que je suis déjà pardonné pour mon inattention, "Je t'ai demandé comment tes cours se sont déroulés."

"Ça allait. Pas de nouveaux conférenciers, pas de nouvelles personnes à ma connaissance. On a déjà genre trois devoirs, mais sinon tout était plutôt ennuyeux."

"Nul," rétorque Lia, et cette fois c'est à mon tour de la pousser, et on rigole en sortant de l'université ensemble.

_

"Eomma, je suis rentrée !" j'appelle dans la maison, en soupirant en laissant tomber mon sac sur le sol de l'entrée et en enlevant mes chaussures.

"Noona !" Seongin m'appelle des profondeurs de la maison, et il émerge quelques instants plus tard pour enrouler ses bras autour de ma taille.

Je glousse, en lui ébouriffant les cheveux, "Hé, minus, comment c'était l'école ?"

"C'était bien !" mon frère de sept ans déclare fièrement, "On a fait des tampons de pommes de terre."

De la même manière que Lia, Seongin commence à bavarder de sa journée alors que nous nous dirigeons vers la cuisine, où ma mère – un peu plus ridée et grise qu'avant – nous sourit chaleureusement et nous laisse aider à préparer le dîner.

La soirée est chaude et agréable, et je regarde des dessins animés avec Seongin avant de me retirer dans ma chambre pour commencer mes devoirs.

Il est déjà très tôt le matin quand je m'enroule dans mes couvertures, mais je m'endors en me sentant productive et accomplie.