Va et viens!

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Belle. Quel nom! Elle est là. Elle descend la rue. J'ai bien connu ses parents. Je la connaissais aussi cette petite. Elle n'a pas changé depuis son départ. Ses cheveux sont toujours aussi blonds et légers. Elle a gardé le sourire, malgré sa vie tragique. Tout en empilant les cageots de légumes, je l'observe approcher. Elle porte un petit panier d'osier qu'elle a recouvert d'une couverture.

Lorsqu'elle est arrivée à ma hauteur, Belle se dirige vers mon stand. Elle s'approche lentement de mon étal, me lance un sourire timide et dit:

«Bonjour Alain, je voudrais vous acheter cette salade et quelques pruneaux, je vous prie.» Je suis surpris qu'elle m'ait reconnu après toutes ces années, j'ai tant changé, j'ai vieilli... Je lui tend les fruits, puis le légume et secoue la tête quand elle veut payer.

«Cadeau de la maison, annoncé-je sur un ton qui ne laisse pas la place à la discussion.

- Merci, cependant, je ne peux pas accepter,» répondit-elle en souriant, mais j'insiste et elle capitule bientôt.

Je l'observe s'en aller, le cœur léger, content d'avoir pu l'aider un tout petit peu. Elle est seule, je sais qu'elle a de nombreuses dettes, qu'elle a des difficultés. Depuis la disparition de ses parents, le 15 avril 1912, elle vit difficilement. J'ignore comment elle s'y prend pour continuer à avancer, continuer à vivre. Elle a tout perdu dans ce naufrage, sa famille, son fiancé... Mais elle est toujours là, souriante, aussi belle que jamais. Personne ne sait vraiment comment elle s'y est prise: Belle n'est jamais tombée, elle n'a jamais flanché.

Sa silhouette s'évapore dans la brume matinale. Je n'entend plus que ses pas. Ses pas lents, mais déterminés. Je me redresse, soupire. Bonne chance, Belle! Quel nom! J'aime...

Un CycleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant