Désaxée

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« C'est donc à partir de ce moment là que tout à commencé ? »

Je l'interrompt. Et je crois que ça ne lui plaît pas car ses mâchoires se crispent un bref instant. Assez pour que je m'en aperçoive.

Elle me fixe à présent avec ce regard si profond. Indéchiffrable, même pour un expert tel que moi. Le genre de regard qui ferait vaciller n'importe quel humain. Ses yeux sont gris, un gris transpercé d'un bleu pâle et glacial mis en valeur par des sourcils parfaitement dessinés, sans être trop superficiels. Putain de merde.

« Effectivement. »

Je crois que je l'emmerde. Mais ce genre de chose n'est pas fait pour être une partie de plaisir. Or cet échange a quelque chose de spécial. Elle rend cet échange spécial. Cette jeune femme est une énigme, un coffre aux secrets dont la clef semble enfouie dans un endroit extrêmement sombre. Inaccessible.

Pour le moment.

Elle me fait donc face. Son regard rivé sur le mien, elle m'examine. Elle sonde mon âme. C'est une sensation étrange. Je veux détacher mon regard du sien, mais mes yeux semblent s'être délivrés du contrôle que j'exerce habituellement sur eux. Elle entretient ce dialogue silencieux qui a le don de me perturber. De me retourner.

Je romps ce duel oculaire. Elle semble satisfaite.

C'est donc une joueuse.

Mes yeux s'attardent sur le reste de son être. Elle est jolie. Désirable. Je crois qu'elle est grande. Enfin j'en suis sur puisque je l'ai moi-même menottée. Les fameuses menottes qui en font flancher plus d'une.

Elle a une allure plutôt sportive, du moins celle d'une femme qui s'entretient. D'après ce que je vois, elle doit faire bander pas mal de mec. Quant à son visage d'un blanc presque blafard, il est mis en valeur par des cheveux presque noirs aux reflets bleutés qui, par ailleurs, n'avaient pas dû être brossés depuis quelques temps. Parce que ton hygiène est irréprochable peut-être ? Ma conscience marque un point.

Son visage porte des traits fins, gracieux. Elle possède des lèvres indescriptibles. Le genre de lèvre qui donne à chaque homme des pensées immorales. J'ai d'ailleurs envie d'y goûter à ses lèvres. Je veux y . . .

Calme toi Daryl, c'est pas le moment de passer à l'attaque.

Mais bordel cette femme me fait de l'effet. C'est presque malsain.

Habituellement ce genre de chose se passe sans encombre. C'est devenu une habitude. Passer au crible les suspects est quelque chose de familier à mes yeux. D'une extrême banalité. Mais pas cette fois. Je sens une tension. Une tension qui installe une sorte de jeu entre nous. Je veux dire par là que nous sommes deux caractères forts d'après ce que j'ai pu voir. Et cela confère une dimension explosive à cette scène. Un cocktail imprévisible.

C'est excitant et perturbant à la fois.

Elle se penche un peut plus, me laissant plonger le regard dans son décolleté. Elle n'en montre pas assez.

Elle veux jouer, me perturber et même me faire flancher.

Elle ne sait pas à qui elle a à faire.

Ça devient troublant là. Je l'imagine, menottée à cette même table, passant les plus beaux instants de sa vie. Les plus torrides aussi. Cette table ferait l'affaire, on aurait juste à éteindre les caméras, pousser cette chaise afin de bloquer l'accès à cette salle. Elle en verrait de toutes les couleurs, mais je suis certain qu'elle aimerait ça.