T H I R T E E N

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L Y N A

Qui est le menteur qui nous a fait croire que travailler sur soi était relaxant ? Je crois que je n'ai jamais été aussi frustrée que pendant ces derniers jours. Je me suis fait la promesse de ne plus me laisse emporter par mon côté impulsif et colérique mais c'est tellement dur de ne pas pouvoir extérioriser ma frustration, par les cris ou par les larmes. Je déteste ma frustration, parce que c'est le seul sentiment qui réussit à me faire pleurer instantanément. C'est une réaction aussi innée que ma réaction inflammatoire. Je sais que ce n'est pas bien pour mon coeur qui tient à peine tout seul mais je n'arrive pas à me contrôler. Et pourtant, il faut que je le fasse. Je travaille dans un milieu qui ne laisse pas la place aux démonstrations émotionnelles. Et pour en rajouter une couche, mon père et moi nous nous disputons souvent à cause de mon manque de maîtrise de moi. J'ai l'impression qu'il ne me comprend pas, donc je me braque, ce qui m'amène à me braquer, à ne rien dire, me frustre et me fait pleurer. Je suis sûre que Benjamin préfère les filles qui ne pleurent pas dès que quelque chose ne va pas. 

J'ai même essayé de faire comme les filles sur tiktok qui se lèvent à cinq heures du matin pour faire du sport, méditer, préparer un bon petit déjeuner, et qui ont un sourire stupide collé sur le visage parce qu'elles ont leur vie en main, mais je n'ai pas tenu une semaine. Foutue application.

Je me donne une petite claque au front et me ressaisis. En parlant de Ben, je suis plantée devant la porte des vestiaires du stade de Säbener Straße, stoïque et complètement tétanisée. Comme toujours, j'ai décidé impulsivement, après une courte journée au bureau, de venir présenter mes excuses au footballeur. C'est la première étape dans ma quête-pas-toujours-convaincante de développement personnel. Je me suis comportée comme une peste, et ce serait totalement justifié qu'il ne veuille pas me voir, même si au fond, j'espère sincèrement que ce n'est pas le cas. Tout allait bien, et j'ai tout gâché. 

Ça fait précisément vingt minutes que je suis devant la porte et à chaque fois que quelqu'un sort de la pièce, j'espère qu'il s'agit de lui, mais non. Tous les footballeurs m'ont regardé d'une drôle de manière, ce qui fait que je suis à deux doigts de partir chez moi et ne plus jamais mettre les pieds ici. Ils doivent se demander ce que je fais là, et honnêtement, je me pose la même question. J'aurai pu l'appeler, lui demander me rejoindre autre part, mais pas devant ses vestiaires. Surtout qu'il ne reste quasiment personne dans le stade et que je commence à regretter d'être venue. J'aurai dû demander à Lucas si Ben était là.

Par chance, ou malchance, la porte s'ouvre une nouvelle fois. M'attendant à voir un énième coéquipier de l'équipe du Bayern Munich, je me décale et baisse la tête pour laisser passer la personne. 

- Lyna ?

Je lève presque instinctivement la tête. Il est là, devant moi, les cheveux mouillés, le regard surpris, avec un t-shirt blanc qui semble avoir été conçu spécialement pour lui et un jean qui moule ses jambes. Putain, sa voix m'avait manqué. Je ne me suis rendue compte du fait qu'on ne s'est pas vus depuis trop longtemps qu'au moment où je l'ai revu. Je pince mes lèvres et continue à le regarder, prise de panique. Pourquoi est-ce que je suis là déjà ?

- Lyna ? Ça va ? Quelque chose ne va pas ?

Oui, moi. Je suis idiote.  Je secoue ma tête pour reprendre mes esprits et par je ne sais quel miracle, j'arrive à formuler une phrase. Putain, on est plus au collège.

- Salut, hm, je, tout va bien, ouais tout va bien. Je ne vois pas qu'est-ce qui n'irait pas, à part le fait que je me tienne, ici, devant les vestiaires, ce qui est bizarre en soit, mais c'est pas ce que tu crois, enfin, je ne sais pas ce que tu crois, mais-

Him&I [Benjamin Pavard]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant