Chapitre 15 : La menace

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Alex et Eliot attendaient Judith au bout du ponton.
Assis côte à côte, ils balançaient leurs jambes au dessus de l'eau cristalline.
Eliot, les yeux dissimulés derrière ses Ray-ban, semblait soucieux.

— C'est quand même super beau t'as vu ? On distingue l'île au large, à travers la traînée de nuages, comme si elle avait un côté surnaturel...

— Putain, il est à peine midi et j'ai déjà la dalle ! lança Alex, visiblement indifférent à l'humeur bucolique de son ami. J'espère que Judith ne va pas tarder avec la bouffe.

— Elle va arriver, t'inquiète. Je me demande bien pourquoi Joan nous a convoqués sur l'île... Tu crois qu'Ella y sera aussi ?

— Aucune idée.

— C'est quand même bizarre..

— Oui, et à mon avis ça pue, grommela Alex en lançant un caillou dans l'eau.

Alex avait troqué son bonnet noir contre une casquette, dont la large visière lui dissimulait le haut du visage. Il semblait contempler les ondulations circulaires qui caressaient l'eau.

— Ça a forcément un rapport avec Ella. Il y a trop de trucs qui collent pas, lâcha-t-il finalement.

— Je sais, Alex, j'étais là je te rappelle.

— Le truc c'est que ... elle a pas l'air d'être une des leurs non plus. T'imagines, si Joan nous demande de la...

— Arrête, il ne nous demanderait pas ça. Ce genre de choses...il les gère lui même.

Alex observa les traits tendus de son ami. Il passait sa main dans ses cheveux, comme à chaque fois qu'il était nerveux.

— Tu tiens à elle, n'est-ce pas ?

Eliot, surpris, haussa les sourcils pour répondre sur la défensive :

— Je la connais à peine. Mais quoi qu'elle soit, elle n'en a pas conscience et ne l'a pas choisi. Son âme humaine semble douce et innocente. Donc oui, je suis inquiet. Pas toi, peut-être ?

— Si, biensur que si... c'est la première fois que je tombe sur une âme ancienne comme elle, sans réussir à savoir ce qu'elle est...

— Ce qu'il y a, c'est que ... on l'a vue éclore, souffla Eliot, que ce souvenir ne réjouissait pas le moins du monde.

— Elle était ... stupéfiante... et aussi...
Il laissa sa phrase en suspens, n'osant formuler tout haut ce qu'il avait ressenti.

— ... terriblement inquiétante ? Suggéra Eliot.

Tous deux se regardèrent une seconde avant de baisser la tête. Ils avaient donc ressenti la même chose.

Ils reconnurent alors la silhouette élancée de Judith qui se dirigeait vers eux, chargée d'un sac de provisions.

— Enfin ! s'exclama Alex à l'attention de celle-ci, t'es allée les chercher en Australie nos sandwichs ?

— Si Monsieur n'est pas satisfait du service, la prochaine fois il ira se chercher tout seul son déjeuner ! Dites les gars, continua-t-elle en sautant gracieusement dans le bateau, vous parliez d'Ella, n'est-ce pas ? Vous aussi vous trouvez ça bizarre qu'on soit convoqués ?

— Oui... ça craint, répondit Alex simplement.

Les trois jeunes Enkeli mirent le cap en direction de l'île.
Judith avait étendu ses jambes interminables sur les rebords du bateau et se les badigeonnait de monoï, sous les regards incrédules de ses comparses.

— Bah quoi ? Ne me regardez pas comme ça ! Si jamais c'est un piège et que Joan a décidé de nous zigouiller, au moins je quitterai ce monde bronzée !

Un bruissement d'ailes et un battement de cilsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant