Stephen Hawking, célèbre physicien et cosmologiste britannique, n'aura jamais vu un extraterrestre de ses yeux. Malgré ses vastes connaissances sur le sujet, malgré son dévouement à sa profession, malgré son intelligence hors du commun, l'existence d'une vie en dehors de celle sur Terre n'a toujours pas trouvé sa preuve irréfutable. M. Hawking est mort avant de recevoir les réponses à la myriade de questions qu'il se posait sur le fonctionnement du cosmos et de ses concepts obscurs. Seul un groupe d'êtres supérieurs maîtrisait avec précision la compréhension de l'espace : les Créateurs des Dimensions, ces mêmes êtres ayant dévoilé les Artéfacts des Temps Anciens à la Sorcière. Les Créateurs, il y a de cela plusieurs millénaires, s'étaient tous mis d'accord pour créer un cosmos différent par dimension, afin d'éviter les voyages inter-dimensionnels le plus possible. Par la suite, plusieurs individus prouvèrent que ce type de déplacement était possible, comme le Joker ou Harley Quinn, mais là n'est pas la question. Hawking n'a pas pu prouver l'existence des petits hommes verts, car ils ne sont pas réels dans sa dimension. Ils existent seulement dans l'imaginaire collectif depuis la course à l'espace des années 60, opposant les États-Unis d'Amérique à l'URSS. Cependant, certaines dimensions se virent dotées d'aliens. Parmi elles se trouvait une autre dimension parallèle à Monsterland, sobrement appelée «040747», dans laquelle une planète éloignée de toute forme de vie externe abritait une colonie d'extraterrestres. Contrairement à l'expression populaire, ils arboraient une peau grisâtre aux allures gluantes et humides, de grands yeux noirs exempts de pupilles et des pieds ne présentant que trois longs orteils, tout comme leurs mains qui possédaient autant de doigts allongés. Dans les films datant également de la course à l'espace, on y montrait les extraterrestres comme des conquérants, une espèce violente qui n'hésitait pas à tirer sur tout ce qui bouge. Rapidement, les stéréotypes cinématographiques reliés aux aliens se retrouvèrent éculés. À l'extrême contraire, les habitants de la planète de 040747 étaient l'espèce la plus pacifique que cette dimension ait connue. Voire trop pacifique. Chaque individu avait une fonction spécifique, qu'il devait respecter coûte que coûte. Par exemple, l'un des groupes s'occupait du transport des marchandises. Toute la journée, ce groupe se tenait en rangs et se passait de mains en mains les boîtes contenant chacune la même exacte masse de nourriture, d'outils ou d'espèces végétales. Un autre groupe effectuait le ménage des huttes où vivaient les travailleurs pendant que ceux-ci suivaient en tout point la tâche qui leur était assignée. Chaque extraterrestre lavait toujours la même maison, avec les mêmes produits, les mêmes techniques. Pendant ce temps, les bâtisseurs construisaient d'autres huttes à l'aide de pierres excavées par les mineurs. En d'autres mots, chaque groupe avait ses façons de procéder et ne déviait jamais des règles imposées à tous depuis des millénaires. La vie y était affreusement monotone : lever, travail, sommeil. Lever, travail, sommeil. Lever, travail, sommeil. Cette routine platonique se répétait tous les jours, sans le moindre changement. Comme tout bon expert peut le déduire, chaque règle comporte une exception, et celle sur l'unique planète de la dimension 040747 était non négligeable. Un seul extraterrestre détestait cette routine. Il avait en horreur le conformisme et l'habitude. Il voulait vivre, tout simplement. Cet individu travaillait dans le hangar d'assemblage des vaisseaux spatiaux, destinés à prendre leur envol dans 4747 ans, temps choisi par les Créateurs pour autodétruire la planète. Tous étaient au courant de ce délai et n'avaient aucun problème avec celui-ci. Après tout, ils ne pensaient pas à ce genre de chose, leur travail les maintenait beaucoup trop occupés pour ça. Cependant, l'extraterrestre rebelle y pensait en permanence. Il lui arrivait souvent d'essayer de parler avec son congénères, pour ne recevoir comme réponse qu'un regard vide et un silence glacial.- Dis, pourquoi on fait tout ça au juste?, demandait-il en passant un long tuyau métallique à son collègue.L'autre alien ne disait rien, omnibulé par le tuyau qu'il passait à l'arrière de lui.- Pourquoi vit-on? Vers quoi allons-nous?Un silence qui semblait de plus en plus lourd accompagnait chaque question. Une nouvelle pièce arrivait entre les mains de l'extraterrestre bavard.- Et tout ça? Pourquoi faisons-nous tout ça? À quoi ça sert de vivre?- Passe cette pédale.À contrecœur, l'alien se tut et passa l'objet à son congénère. Pendant la phase de sommeil, il ne dormait point. Il réfléchissait. Le plafond blanc typique à chaque hutte jouait le rôle d'une toile vierge où l'imagination était maître. C'était le seul moment dans la vie du pauvre alien où ce dernier pouvait être lui-même. Un soir, alors qu'il contemplait de nouveau ce plafond couleur neige, il y vit un vaisseau spatial.- Pense, Glock, pense! Tu ne fais que ça, voir des engins volants. Force-toi!, se réprimanda l'extraterrestre.Il ajouta une dizaine de moteurs, assez pour que le poids du véhicule double. Il choisit également de rajouter des armes, des pistolets laser, des graffiti colorés.- Ça me ressemble déjà plus!, se félicita le monstre.Sur le plafond à la couleur fade, l'engin prit son envol dans les étoiles, loin d'une planète où les rochers violets régnaient en maîtres. Glock eut alors une épiphanie.- Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt?, hurla-t-il presque.Ce petit être si fougueux n'avait pas une seule fois considéré l'option de quitter sa planète auparavant. Il la détestait du plus profond de son âme, certes, mais il était impossible de la quitter... à moins de posséder un engin volant. En plusieurs années, la pensée de s'enfuir avec un vaisseau du hangar dans lequel il travaillait ne lui avait jamais traversé l'esprit. Plus rien ne le retenait ici. Il ne connaissait pas sa famille, il faisait la même chose tous les jours, il ressentait une haine profonde envers le conformisme. Tout pointait vers un changement drastique et irréfléchi. D'un pas décidé, il sortit de sa hutte en courant autant que ses pieds à trois orteils le lui permettait. Chaque pas produisait un son mat et sourd sur la roche violette. À la longue, les habitants des huttes voisines commencèrent à suspecter que quelque chose n'allait pas. Quelqu'un déviait à l'ordre établi depuis toujours.- Que quelqu'un le rattrape!, cria un bâtisseur.- Comment faire? Nous n'avons jamais vécu une situation pareille, se plaignit un transporteur.- Courons nous aussi!, clama un mineur.- Et devenir un rebelle comme lui, non merci! C'est déjà trop tard, il est trop loin, répliqua une alien de ménage.Une fois le quartier des huttes traversé, Glock arriva au hangar qu'il méprisait. C'était un immense cube de la même couleur que les plafonds des huttes, doté d'un gigantesque trou où devraient sortir les vaisseaux dans 4747 ans. Contre toute attente, l'extraterrestre allait devancer cette envolée. L'employé grognon qui ne voulait pas lui parler plus tôt dans la journée dormait dans sa hutte comme tous les autres; Glock n'avait aucun obstacle devant lui. Tous les vaisseaux étaient pareils, sans le moindre détail différent, alignés sur un mur tout aussi blanc que toute structure. L'alien en choisit un au hasard, s'installa dans le cockpit et démarra les moteurs. Ceux-ci firent entendre leur grondement caractéristique, puis toute la planète se réveilla d'un coup. Ce bruit tonitruant amena la panique chez tous les aliens, persuadés que la planète allait exploser à l'instant même. Cette fois-ci, aucun extraterrestre n'hésita à sortir de sa hutte et tous se ruèrent vers le hangar à l'instant même où Glock commençait son envol à travers la gigantesque ouverture. Alors que le petit alien savourait l'immense satisfaction d'avoir enfreint les règles, le reste de la planète sombrait dans un chaos sans nom où tous se chamaillaient pour quitter les premiers. Au moment où tous les vaisseaux se retrouvèrent remplis à craquer, l'extraterrestre avait déjà parcouru plusieurs centaines de kilomètres dans l'espace intersidéral de 040747.- C'est donc ça, la vie, soupira de bonheur Glock.Autour de lui, il n'y avait que des étoiles, que de la lumière réconfortante et accueillante. Rien ne pouvait annoncer l'horrible fatalité qui l'attendait. - Autant se mettre un peu de musique, je suis parti pour un très long voyage.Avec ses longs doigts grisâtres, il tourna un espèce de bouton qui démarra une chanson interprétée par un artiste qu'il ne connaissait pas, mais qui était mondialement connu dans une autre dimension.This is Ground Control to Major TomYou've really made the gradeAnd the papers want to know whose shirts you wearNow it's time to leave the capsule if you dare- Quelle belle musicalité!Glock s'étira, puis actionna le siège rétractable afin de prendre un temps de repos, temps écourté par un signal d'alerte strident de la part de l'engin.- Que se passe-t-il?L'alien examina le radar électromagnétique. Un élément inconnu représenté par un gigantesque point d'interrogation venait d'apparaître sur l'écran.This is Major Tom to Ground ControlI'm stepping through the doorAnd I'm floating in a most peculiar wayAnd the stars look very different todayAlors que la chanson se poursuivait, Glock appuyait sur tous les boutons du tableau de bord afin de trouver une solution, mais rien n'effaçait le menaçant signe de ponctuation. C'est alors qu'il leva la tête vers la grande baie vitrée servant de pare-brise et eut un pas de recul.Though I'm past one hundred thousand milesI'm feeling very stillAnd I think my spaceship knows which way to goUn immense trou noir avalait la lumière que l'extraterrestre admirait que quelques secondes auparavant. Le pauvre rebelle tentait de faire marche arrière avec les commandes du cockpit, mais plus rien ne fonctionnait. L'engin spatial se dirigeait tout droit vers la noirceur absolue. Glock, désemparé, s'assit sur son siège rétractable, ferma les yeux, et écouta la douce voix de celui qu'on appelait David Bowie sur Terre en acceptant son destin.Ground Control to Major TomYour circuit's dead, there's something wrongCan you hear me, Major Tom?Can you hear me, Major Tom?Can you hear me, Major Tom?Can you-*****- Ah! Vous êtes là! Je pensais que vous n'alliez jamais vous réveiller!, dit une voix inconnue.Glock était étendu de tout son long dans une espèce de lande désolée où le gris était la couleur dominante, contrairement à sa planète d'origine où le violet était maître. Devant lui se tenait un grand homme aux cheveux noirs et gominés et à la dentition plus que pointue. Il s'agissait du Vampire de Monsterland.- À partir de maintenant, vous êtes l'Alien. Vous serez mon secrétaire pour le reste de votre existence. Et vous suivrez mes ordres à la lettre, compris?- Oui, monsieur, vraiment désolé, monsieur.Glock s'était relevé dès les premiers mots du Vampire sur son nouveau rôle. Il se sentait hypnotisé par les pupilles en spirale du maire et semblait lui devoir respect et loyauté. Peu à peu, il sentait son côté rebelle et fougueux s'évanouir. Sa personnalité s'écrasait pour faire place à un petit fonctionnaire dominé par une force externe.- Suivez-moi.Le Vampire fit virevolter sa cape en s'éloignant de la lande servant de cimetière et fit signe à l'Alien de lui emboîter le pas. À ce moment précis, Glock n'existait plus. Il était devenu ce qu'il avait en horreur à 040747. Derrière lui, une tombe où on voyait le nom de Glock poussa de terre, aux côtés d'une autre sépulture où l'on pouvait lire «L'homme de paille».
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Monsterland
Ficción GeneralAprès le vol de la fameuse boîte à musique, le Joker et Harley Quinn se retrouvent coincés à Monsterland, une nouvelle dimension parallèle à Nemesisland, accompagnés de Hannah Brooks et de Harold Wilkins, un couple de loups-garous de Salem. Rapideme...