Chapitre pouvant heurter la sensibilité du lecteur. Il contient de la violence et un trouble du comportement.
Bill lâcha un soupir haletant, maladroit...
L'air froid qui s'échappa de ses lèvres gercées heurta le miroir, laissant des traces, des marques qui trouvaient bonne route près du sang sur l'édifice. L'image que renvoyait le dispositif ne semblait pas l'effrayer ni même le déranger. Au contraire, l'homme svelte se montrait satisfait de son acte. Il posait fièrement devant le miroir, la bouche ensanglantée, tissu de chair entre les lèvres, il sourit, de sa denture blanche parfaite, désormais maculée par le rouge trop vif du sang.
Ses fossettes se tracèrent sur ses joues pâlies et tachetées. Sa peau palustre, laissait de ses pores la sueur ruisseler de toutes parts. Il lui en avait fallu des efforts pour en arriver là, et maintenant, il ne pouvait que trouver le décor splendide. La chose, bien trop belle à admirer.
La musique jouait frénétiquement, comme figée sur le refrain.
“ We have nothing to loose ”
“ We have nothing to gain”.Il avança une jambe vers l'avant, la seconde vacillait à l'arrière, bien trop affaiblie par le coup qu'elle lui avait porté plus tôt. Il n'aurait pu se maintenir ainsi plus longtemps, ses bras, son corps, bougeaient de façon saccadés, comme un pantin désarticulé, qui suivait le rythme qu'imposait la musique.
Un pas vers la gauche, l'adrénaline dans les veines...Chantonnant les paroles, Bill avala la chose, la chair entre ses lèvres sans même montrer le moindre signe d'hésitation ou de dégoût. C'était plaisant, de la sentir de nouveau faire partie intégrante de lui. Elle était lui...
L'homme brun lâcha un soupir de soulagement. Ses cheveux courts, habituellement bouclés, étaient en batailles, rencontrant bien souvent ses yeux de couleur azur. Sa carrure élancée lui confiait une hauteur d'environ un mètre quatre-vingt-dix, l'idéal lorsqu'on appréciait prendre les gens de haut.
Bill n'avait laissé aucune chance à sa victime qui gisait dans son propre sang sur le sol de marbre. Et pourtant, si son immobilité laissait à croire qu'elle avait vacillé dans l'inconnu, il n'en était rien. Sa respiration haletante était le signe indélébile qu'elle luttait encore pour sa survie.
Son épouse semblait s'accrocher désespérément au fil qui la reliait encore à la réalité.
Mais que cela ne tienne...
Morte ou vivante, son sort était déjà scellé et cela, elle n'y pouvait plus rien. Les innombrables blessures qu'elle avait sur son corps, ne lui garantissaient plus bonne heure de vie. Elle avait un côté du visage déchiqueté par les flammes et une commotion cérébrale dû à un violent coup de marteau, qu'elle avait reçu sur la tête. Ainsi, même pour elle, il lui était improbable de s'imaginer survivre à ce cauchemar. Elle était condamnée et cela, elle en était consciente.
Elle avait beau avoir la conscience éveillée, son esprit vagabondait toujours dans le néant.
Bill regarda son aimée s'éteindre à petit feu. Le bruit que pouvait émettre le sang de son épouse, qui quittait inexorablement son corps tiède l'arracha un frisson.
Un frisson d'excitation. Une envie sauvage d'en profiter une toute dernière fois, comme hier, comme autrefois, où tout allait encore pour le mieux. Ses sombres nuits, où ce plaisir lui semblait légitime. Il voulait figer leurs corps dans l'espace, le temps, une toute dernière fois.
Tel un animal animé par des pulsions monstrueuse, il appréciait chaque secondes du spectacle qui s'offrait à lui. Voir sa peau pâlir de la sorte et entendre son souffle désaccordé le mettait dans un état second, où l'on arrivait à apprécier ce que l'esprit humain pouvait qualifier d'abjecte.
Cependant, ces deux termes n'étaient pas pour autant dissociables. Lorsqu'on appartenait au genre humain, on connaissait inévitablement des monstres...
Il la saisit par les jambes et la traina, de la salle de bain où ils avaient lutté de toutes leurs forces comme des ennemis, pour la chambre à coucher où ils passaient du bon temps ensemble, lors de leur partie de jambe en l'air, comme des amis.
Louise se sentit bouger. Elle sentit son corps être traîné, frotté à une vitesse ahurissante contre le sol. Elle sentit ses cheveux blonds se tacher et s'imprégner du liquide sur le marbre, et ses vêtements, suivirent le mouvement salace, vers sa dernière demeure. Et pourtant, si la douleur, la peur et les regrets qu'elle pouvait ressentir à cet instant la plongeait dans cet état post inconscient, elle l'avait senti...
Elle pouvait ressentir sa détresse, sa peur, l'incompréhension dans laquelle il pouvait être submergé. La blonde sentait une présence, différente des leurs, au loin, tapis dans la pénombre.
Elle ouvrit les yeux systématiquement, tel un réflexe lorsque son corps passa le seuil de la porte des toilettes pour longer le couloir.
Ses iris bleus tombèrent sur son fils, âgé de sept ans seulement. Il avait été témoin de la scène macabre depuis le début. Il était là, lorsque son époux avait tenté de la noyer dans le lavabo. Il était là, lorsqu'ils s'étaient battus dans le salon, dans la cuisine où Bill l'avait brûlé le visage, lorsque son corps avait été projeté contre le mur en béton. Il était présent lorsqu'elle avait glissé dans les escaliers, lorsqu'elle s'était enfermée dans la salle de bain pour passer un coup de fil. Il avait toujours été là, même lorsque ses poings lui avaient fracturé la mâchoire et que le marteau l'avait asséné un coup à la tête.
Elle en frémit. C'était le coup final qu'elle reçut ce soir-là. Son cœur, bien trop fragile, ne supporta pas cette vision que laissait paraître les traits de visage du garnement. Le membre s'arrêta de fonctionner. Le dernier battement qu'il produit, avait retenti avec écho dans sa poitrine. Il lui avait permis une toute dernière fois de sourire, de sourire comme à chaque fois qu'elle était triste, comme quand elle était heureuse ou quand, elle avait l'habitude de lui mentir, que tout irait bien...
L'âme se retrouvait dans la torpeur et la sidération face à la réalité qui lui tendait les bras. Elle n'était en rien factice comme l'enfance idyllique qu'on lui avait fait voir. Bien au contraire. L'âme distinguait les traits des monstres racontés dans les contes de fées. Ils se dessinaient et pourtant, lui semblaient si familier.
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Hypnose (En Pause)
Mystery / Thriller« Lorsque deux étoiles sont trop proches et que l'une d'elles explose, il arrive qu'elle condamne l'autre étoile à errer sans trajectoire dans l'univers » James n'a que six ans lorsque sa mère perd la vie devant ses yeux. À lui, s'ouvre un monde loi...