Chapitre 2.3-Les retrouvailles

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Pendant nos jeunes années, celles de l'insouciance, on consacrait bien peu de temps à l'avenir. Il nous semblait si lointain, une époque qui n'arriverait presque jamais. On serait éternellement jeune, pas vrai ?

Voilà déjà plus d'une demi-heure que Gabriel Harris progressait dans la sombre forêt du vieux Wistman's.

La nuit était déjà tombée, les arbres tanguaient mollement d'avant en arrière, le feuilletage soufflé par le vent rude, s'éparpillaient dans les airs, obstruant sa vue déjà affaiblie par la quantité de stupéfiants qu'il avait ingurgitée.

Le jeune homme progressait de façon maladroite sur la terre noire et particulièrement boueuse de la mythique forêt abandonnée, l'effigie connue des mémoires de tous.

Il se rappela cette escapade passée plus tôt, où il avait titubé avant de glisser dans ce mélange spongieux de terre et d'eaux. Cela était arrivé lorsque la Ford s'était retrouvée coincée dans la matière boueuse. Le visage plié, il avait fait un maximum d'efforts pour dégager le véhicule, mais hélas, seul, il n'était arrivé à rien.

- Putain de voiture, avait-il hurlé en frappant le véhicule, qui resterait là, un bon moment encore.

Il avait ensuite continué son chemin à pied, bien déterminé à progresser malgré la faible qualité du sol.
Même dans un état second, les yeux fermés, le blond n'aurait eu aucune difficulté à se repérer dans ces bois qui l'avaient vu grandir, l'avaient entendu rire et qui, avaient été, le premier témoin de sa dépendance aux stupéfiants en tout genre. Il connaissait la plupart des arbres, centenaires, où il avait gravé son prénom et celui de Susie. "Gabriel et Sue, c'est pour la vie".
Ces arbres étaient aujourd'hui marqués à jamais par le sceau de sa naïveté, songea-t-il. L'espoir des rêves d'hier, qui n'avaient plus de place dans la réalité.

Cette forêt était ainsi son territoire, son repère, où il venait passer les jours les plus chauds, à vagabonder entre les arbres, à s'empiffrer de friandises, jouer aux cache-cache, à la marelle et nager, nager dans l'eau de la crique.

Gabriel avançait encore dans la nuit, très peu nostalgique. Beaucoup à sa place aurait perdu leur sang-froid, mais pas le blond. La forêt, la nuit, la nature, les animaux, rien de tout cela ne l'effrayait et pourtant, les poils de ses bras se hissèrent lorsqu'il arriva à l'orée de la forêt.

Les arbres protecteurs laissaient place à la prairie, cette vaste zone déboisée qui s'étendait face à lui et d'où aucun tronc, ni mouvement de terrain, ne faisait obstacle à son regard.

Il pouvait alors d'ores et déjà apercevoir l'ombre du vieux monument qui faisait, ce soir, l'objet de sa quête.
La scierie désaffectée se dressait immense et esseulée, au milieu d'une végétation qui avait repris ses droits. Elle trônait là, dans le silence et l'immobilité depuis la construction bien plus tardive de sa remplaçante, plus jeune et plus performante.

Il sentit comme une boule se former dans son estomac, le jeune homme y porta une main aventureuse, le visage se décomposant de peur. Il sortit son téléphone, l'air effrayé, et passa un appel. Sans succès, il tomba sur la messagerie vocale.

- Putain de faux brun. J'en ai marre, je rentre. Va te faire foutre James. Ça fait déjà une heure que je poireaute dans la forêt, t'es où ?

Il rangea son appareil dans sa poche et resta à l'orée de la forêt, sceptique, le doigt contre le menton, il réfléchissait.
Une brise froide se propagea dans l'atmosphère, elle fut particulièrement glaciale, comparée à ses prédécesseurs, qui eux portaient, un message plus avenant.
La prairie était un endroit magnifique du coin.

Hypnose (En Pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant