Alors que le soleil de juin annonçait déjà un été caniculaire, un jeune garçon, appelé Sine, était allongé dans une clairière cachée de tous. Celle-ci se trouvait dans le bois non loin de son foyer. Lui seul connaissait cet endroit, il en avait fait son refuge.
Sine n'avait jamais connu ses parents ; alors qu'il n'était qu'un bébé, un incendie avait ravagé leur maison lui avait-on rapporté. Les pompiers n'avaient pu sauver que lui et, depuis, il vivait dans un foyer de l'enfance. Sine passait la plupart de son temps libre seul. Son coin favori était cette éclaircie dans le bois des hautes roches. Ici, il se sentait en sécurité, personne pour venir lui chercher des problèmes, pas comme au collège où Kévin et sa bande passaient leur temps à le martyriser. Sine ne cherchait jamais à se défendre, pour lui c'était peine perdue.
Allongé sur une touffe d'herbes grasses bien moelleuse, Sine adorait perdre son regard dans le ciel et s'imaginer des situations où il serait le héros, comme donner une bonne leçon à Kévin et sa bande devant tout le collège ; ou encore parler à Cindy, cette jolie blonde qui s'assoie souvent au deuxième rang dans la classe. Ces dernières pensées firent naître un sourire qui en disait long sur ses sentiments pour elle.
C'est à ce moment que son téléphone se mit à sonner, il se redressa et le sortit de son sac. C'était la directrice du foyer, il le savait déjà, car c'était la seule à connaitre son numéro, et pour cause, c'est elle qui lui avait confié ce portable quelques mois auparavant.
— Allô ? articula Sine tout en retirant l'herbe de ses cheveux.
— Rentre immédiatement ! ordonna la directrice. J'ai appris ce qu'il s'est passé au collège, viens me voir dans mon bureau.
— OK... À tout de suite... répondit Sine timidement.
Il s'allongea à nouveau pour se réserver encore quelques secondes de détente, mais c'était maintenant trop tard, impossible de retrouver l'agréable image de Cindy, toutes ses pensées le ramenaient à l'incident. Il se leva alors et rangea son téléphone avant de se diriger vers le foyer, le pas rapide, autant régler cela le plus tôt possible.
Arrivé devant son lieu d'hébergement, il prit directement la direction du bureau de la responsable. Devant la porte, il inspira une grande bouffée d'air pour se concentrer et se donner du courage avant de frapper avec assurance.
— Entre Sine ! invita la directrice qui visiblement l'attendait lui et personne d'autre.
À peine avait-il poussé la porte qu'un cri de surprise et de colère s'échappa de derrière l'office.
— Ton œil ! Tu aurais dû rentrer directement ! Ou au moins passer par l'infirmerie...
Son œil droit était tuméfié. Plus tôt dans la journée, lors d'un match de football en cours de sport, Kévin en avait profité pour lui mettre gratuitement un coup de coude en plein visage, acte n'étant pas passé inaperçu aux yeux du professeur. La directrice se leva folle de rage de sa chaise et alla inspecter de plus près l'hématome. C'était une grande dame mince aux cheveux bruns légèrement clairsemés, elle portait toujours ses lunettes rectangulaires qui grossissaient ses yeux verts.
— Il ne t'a pas raté ! lança-t-elle tout en approchant son visage de son œil. Tu peux me croire, cette fois-ci il se fera renvoyer ! J'ai eu le directeur du collège, ce Kévin passera en conseil de discipline très vite. Attends-moi ici, je vais te chercher une poche de glace.
Une fois la directrice sortie, Sine s'installa sur la chaise face au bureau. C'était une grande pièce lumineuse avec un petit canapé usé, un portemanteau branlant, une bibliothèque garnie et un grand bureau de bois clair, occupé par un ordinateur encombrant et deux cadres photo identiques ; sur l'un d'eux, on voyait Sine, plus jeune, porté par la directrice. Madame Muller considérait Sine comme son propre fils, de même que Sine la considérait comme sa mère. C'était le plus jeune enfant qu'elle avait accueilli dans son établissement. Sur le deuxième cadre, il y avait une fillette sur les épaules de Madame Muller dans un parc, qui était alors beaucoup plus jeune. Sine adorait cette photo, il l'attrapa pour l'observer à nouveau. La directrice lui avait raconté que la police lui confiât cette jeune fille qu'ils avaient trouvée errante dans les rues, seule, à seulement cinq ans. Elle s'y était beaucoup attachée, mais le jour de ses seize ans, l'adolescente avait fugué et on ne l'avait jamais retrouvée. Cela brisa le cœur de Madame Muller.
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1/SINE : Le royaume d'Afradour
ParanormalSine passe son temps à flâner quand il n'est pas au collège ou dans son foyer. Il fait tout pour rester discret, ne pas attirer l'attention, vivre dans le calme et la sécurité. Toutefois, une lumineuse rencontre avec un homme étrange le propulse dan...