LE SECRET D'AZAREL

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Le lendemain matin, lorsque tous les élèves de l'académie furent installés dans la grande salle, le directeur Halvor, le visage empreint de colère, prit la parole.

— Bonjour à tous, fit-il. Hier soir, un groupe d'élèves a été aperçu dans les couloirs de l'académie. Dois-je encore vous rappeler qu'il est interdit de sortir de vos dortoirs durant la nuit ?! Par je ne sais quelle ruse, ils n'ont pas été attrapés par nos gargouilles. Sachez que si l'on découvre l'identité des coupables, ils seront sévèrement châtiés...

Sine garda les yeux fixés sur son plat durant tout le discours du directeur, dont la colère ne cessait de croître. Il savait très bien que si son regard croisait celui de Damos, tous les deux seraient pris d'un fou rire et tout son groupe serait puni devant toute l'académie, pour insolence, a minima. Cette soirée passée à l'extérieur de leur chambre rapprocha encore plus le groupe d'adolescents. Sine était heureux de savoir qu'il n'était pas le seul à aimer une fille avec laquelle il ne pourrait jamais être. Azarel, très pudique, ne répondait jamais à toutes les questions que Sine et Damos lui posaient sur le sujet. Une chose était pourtant sûre, il avait des sentiments pour Ezrille.

Une fois le petit déjeuner terminé, Sine voulut envoyer un corbeau pour prévenir le grand maitre de ce qu'il avait découvert la nuit dernière, mais Azarel l'en dissuada.

— Si le message tombe entre de mauvaises mains, nous serons découverts et châtiés, expliqua celui-ci. Si tu souhaites voir le grand maitre, rends-toi au palais.

Sine n'y avait pas pensé. Il remercia l'elfe pour ses conseils et se prépara pour aller voir le grand maitre, à moins de trente minutes de calèche. Il passa un long moment avec lui pour lui expliquer ce qu'il avait vu, entendu, et compris. Torwën parut déçu devant cette piste devenue froide. Ils devraient se concentrer sur une autre hypothèse, mais en avaient-ils seulement une d'exploitable ? D'un autre côté, il fut rassuré de savoir que les elfes noirs n'étaient pas en possession de la zirgonia, et qu'Azarel ne représentait pas un danger, ni pour Sine ni pour l'académie, et encore moins pour le royaume d'Afradour.

Le mercredi après-midi suivant, les quatrièmes années achevèrent leur journée par un cours d'histoire. Sine, Damos et Adélaïde étaient exténués. Ce matin-là, le professeur Éol avait enseigné aux élèves l'usage de diverses armes utilisées à cheval. Après la théorie, ça avait été la pratique. Malheureusement, Sine ne savait pas monter à cheval ; pas seul du moins. Il se concentra pour garder sa position et manier les rênes sans gêner sa monture, un fier cheval pangaré. Finalement, il parvint rapidement à se faire obéir et ses compagnons le félicitèrent de cet exploit si rapide. Mais à côté de sa leçon de balai volant, cela n'était rien du tout. Toutefois, la tâche devint ardue quand il dut manier l'équidé d'une seule main, appareillée d'un bouclier, pour être en mesure de s'équiper d'une lance, tout aussi lourde que six épées, de l'autre main. Cet exercice était également compliqué pour un certain nombre d'élèves. Azarel, qui sans être jovial était toutefois devenu moins froid, le conseilla sur la prise en main de l'arme, la position de son centre de gravité, la vitesse à adopter... si bien que peu de temps avant l'heure des traditionnels duels de fin de cours, il planta sa lance au cœur de la cible de paille. Fier de lui, il rassembla son groupe pour donner ses directives quant à la joute qui allait suivre.

Le groupe qu'ils affrontèrent n'avait pas été très bien classé au premier cycle. Néanmoins, ils étaient plutôt doués pour ce qui était du combat à cheval. Lorsque Sine vit les quatre cavaliers, armés et parés, alignés à l'autre bout de la piste, il fut parcouru d'un frisson. Ça n'allait pas être facile. Damos fonça le premier, mais son cheval partit au galop sans qu'il ne lui en donne l'ordre ; habitué à cet exercice, le quadrupède voulait en finir au plus vite. Le rawène lutta pour réajuster sa lance mais il ne put rien faire quand celle de l'adversaire le percuta de plein fouet au niveau du poumon droit. Il fut projeté sur plusieurs mètres avant de retomber lourdement. Adélaïde fut la seconde, pour pouvoir rapidement prendre en soin son compagnon. Plus à l'aise que ce dernier dans l'utilisation d'une monture, qu'elle coure ou qu'elle vole, elle guida son cheval brillamment et évita l'assaut adverse tout en portant un coup, bien qu'elle ne réussit pas à désarçonner l'adversaire. Ce dernier, plus rapide qu'elle, se remit en place rapidement pour le second assaut, la jeune sorcière entendit quelques os de son bras craquer quand elle fut frappée de plein fouet par l'arme ennemie. Azarel fit preuve d'une habilité remarquable, il fit glisser sa lance le long de celle qui venait vers lui pour modifier sa trajectoire et heurter le torse du cavalier qui était si fermement lié à son cheval qu'ils tombèrent ensemble. L'elfe noir n'eut pas un regard pour eux, et toute la classe fut impressionnée d'une telle prouesse. Sine eut moins de chance qu'avec son mannequin de paille, qui lui restait immobile. Tremblant par les secousses, son arme lui échappa des mains, puis il vit celle de son opposant lui arriver droit dessus et n'eut d'autre idée que de se tenir derrière son bouclier. Celui-ci explosa au contact de l'arme ennemie comme s'il s'était s'agit d'une simple coquille de noix. Le coup fut terrible. Le cheval de Sine continua sa course alors que lui flottait un instant dans l'air avant de s'écraser avec brutalité sur le sol, sous les rires moqueurs de Nira et de ses compagnons.

1/SINE : Le royaume d'AfradourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant