Féodor s'était rendu à l'atelier le lendemain, mais au bout d'une demi-journée de souffrance, il avait dû se rendre à l'évidence : son pouce ne lui permettait pas de travailler comme d'habitude. Il s'était fait remarquer par Alexeï à plusieurs reprises. Ce dernier lui reprochait d'être trop lent, pas assez efficace, et lorsqu'il avait réalisé que le doigt de son employé faisait un angle qui n'avait rien de naturel, il l'avait congédié.
– T'inquiète pas, gamin, avait-il tenté de le rassurer. Je t'aime bien, et tu es un bosseur. Quand tu seras remis, tu reviendras travailler. Mais dans cet état, tu me fait perdre trop de temps. Et le temps, c'est de l'argent. Aller, va te soigner et reviens-moi en forme.
Puis, comme si l'affaire était entendue, il était retourné à son travail. Mais Féodor ne pouvait se permettre de ne pas travailler. Sa survie en dépendait. Pas de travail, pas d'argent, pas d'argent, pas de repas. Il connaissait la faim, mais ne l'affectionnait pas particulièrement.
Agacé, il était parti dans la foulée en grommelant. Il s'était immédiatement rendu chez la concurrence, cherchant un artisan pourrait avoir l'utilité d'une paire de bras. Mais partout on l'avait refoulé, et Féodor était rentré chez lui, furieux.
Tout ça, c'est la faute de Vassili. Cet enfoiré est incapable de voir plus loin que le bout de son nez. Egoïste. Monsieur veut être alchimiste, hein ? Qu'il commence par faire des expériences sur sa propre cervelle et essaye d'y distiller un peu de plomb. Certain que celui-ci ne se transformera jamais en or !
Féodor s'était cloitré le restant de la journée, afin de réfléchir à un honnête moyen de gagner sa croute. Le soir, il s'était rendu à l'évidence : vu l'état de son pouce, il n'aurait guère tenu plus d'une journée dans n'importe quel domaine d'affectation. Finalement, il avait fumé seul le reste du thoum, d'une part pour se vider l'esprit, et d'autre part faire taire la douleur lancinante dans sa main.
Lorsqu'il se réveilla le lendemain, il prit la décision de trouver un médecin pas trop cher pour se soigner. En faisant un compte rapide, il évalua sa fortune à neuf jours de subsistance, moins deux ou trois pour payer ses soins. Cela lui laissait une semaine tout au plus, avant d'être expulsé de chez lui, et de crever de faim dans la rue.
Il consulta un guérisseur qui quartier des indigènes, qui après un examen plus que douteux, lui prescrit du repos, ainsi qu'un flacon par jour d'une décoction antalgique de sa création pendant vingt jours. Ne pouvant pas se permettre ce luxe, Féodor repartit avec six flacons, s'allégeant au passage d'une somme substantielle qu'il estima correspondre à deux jours de nourriture. Il se promit de ne prendre sa potion qu'en ultime recours.
L'après-midi qui suivit fut un calvaire, et à la fin de la journée, Féodor avait déjà consommé deux flacons de la substance, qui lui fit autant d'effet qu'un pansement sur une jambe de bois. Fiévreux, il maudissait intérieurement le guérisseur, lorsque la porte s'ouvrit brusquement.
Vassili entra en trombe, un rouleau de parchemins sous le bras. Il referma précipitamment la porte derrière lui, tandis que Féodor, trop accablé par ses douleurs et son désarroi, leva à peine les yeux sur lui.
– Bon, je crois que j'ai trouvé quelque chose, déclara victorieusement Vassili.
Il étala ses documents sur la table, ignorant l'indifférence de son hôte affalé sur sa chaise, le regard dans le vide. L'intru déroula avec fierté un grand parchemin sur la table, d'où s'échappèrent plusieurs petites feuilles griffonnées. Des traits, des carrés et des rectangles, des angles et des triangles, des courbes et des symboles étaient tracés sur les documents noircis d'annotations. Vassili et Féodor savaient lire le Knigayotte, chose exceptionnelle pour des habitants du quartier des indigènes, mais le langage inscrit sur ces papiers leur était inconnu. Seuls les chiffres étaient reconnaissables, mais ils étaient disposés de façon si étrange qu'ils n'auraient su dire à quoi ils correspondaient.
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Les parias (fanfic Game of Rôles)
AdventureL'histoire se déroule dans le monde d'Aria créé par FibreTigre. Feodor et son ami Vassili sont deux jeunes habitant du quartier le plus pauvre de la cité mécanique de Kniga. Leurs caractères sont diamétralement opposés, et pourtant, ils sont insépar...