Tendre déveine.

IV.

Deux mois ont suivi la visite, jai désormais vingt-deux semaines de grossesse. Les jours passent et je ne cesse de marrondir. Mon ventre est plus développé à chaque réveil. Chaque matin, lorsque je sors de mon lit, je me dirige vers le miroir sis en face de notre lit. Je voulais un miroir plein pied afin dobserver au mieux les changements de mon corps. Je me dénude devant la glace, me mirant de profil, je caresse mon ventre en chuchotant quelques petits mots doux à mes petits anges puis je me rhabille. Cest un rituel que jai instauré afin de créer des liens entre nous, bien avant leur arrivée à nos côtés. Les moments forts de la maternité commencent durant la grossesse. Entre les appréhensions, limpatience de tenir mes petits, les crises dangoisses, les nausées et les vomissements aussi récurrents que les pulsions cardiaques des petits La grossesse, cest un paradis infernal. Le plus surprenant dans tout ça cest que nous sommes éprouvés chaque jour mais lidée de recevoir une merveille au bout de cette longue attente qui pourrait paraitre interminable, nous fait oublier tout le reste. Jai bientôt cinq mois de grossesse pourtant, jai limpression que le temps est figé et quil se réjouit de me faire patienter encore longtemps. Ma vie a radicalement changé. Mon style vestimentaire, mon alimentation, mes habitudes, tout a changé en lespace de quelques semaines.

Un autre changement majeur a été celui du comportement de Harry. Pendant plusieurs jours, il était absent et quand il rentrait, il ne me parlait pas. Il rentrait très tard et ne mangeait plus à la maison. Je sais qu'avec la grossesse, je perds en attirance, mais je suis devenue si horrible ? Jai pris des kilos en plus mais jai toujours eu une silhouette généreuse donc il ny a pas vraiment de différences. Javoue que je prends moins soin de moi et que je laisse la paresse mhabiter mais mes journées sont beaucoup top pénibles et fatigantes donc de lénergie pour me maquiller, mettre une petite robe coquette et me faire une belle coiffure, je nen ai pas sauf pour les grandes occasions. Je ne porte pas seulement une vie, jen porte deux. Je vis pour trois, je malimente pour six et je dors tout le temps. Il mexcusera mais la grossesse est assez éprouvante heureusement elle ne dure que neufs petits mois, dici là, il doit sadapter à mon physique actuel car au cas où il l'aurait oublié, mon apparence nest que le résultat de nos petites galipette nocturnes. La vierge Marie est la seule femme à avoir conçu sans partenaire. Moi, j'ai eu ces bébés avec lui donc la moindre des choses serait déviter de me délaisser et de veiller à ce que tout se passe bien même si je suis devenue la plus repoussante des créatures.

Aussi, Il a eu du mal à accepter les petits au début mais depuis les choses se sont arrangées. On en a discuté à plusieurs reprises et on est finalement tombés daccord. Dailleurs nous avons déjà commencer les achats pour les bébés. Pour linstant nous prenons tout en blanc ou dans des couleurs neutres car nous ignorons encore le sexe des jumeaux. Nous le saurons à la prochaine visite chez le gynécologue. Elle aura lieu dici quelques jours. On simpatiente. En attendant, je mimpatiente surtout de le voir rentrer à la maison. Ce soir, je l'attends de pieds fermes. Comment puis-je dormir ? Je suis anxieuse, triste, énervée. Il me délaisse totalement et jignore pour quelle raison. Avec le temps, la distance sest installée. Les moments de complicité se font rares et les seuls petits instants intimes que nous avons cest lorsquil moffre des bijoux. Depuis plusieurs semaines je nai pas senti son étreinte. Il ne me fait plus lamour. La seule marque de tendresse que je reçois ce sont les frôlements lents de ses mains autour de mon cou lorsquil morne de bijoux quil moffre régulièrement. Dans ce genre de situation je devrais me sentir belle, aimée, valorisée et choyée mais ce nest pas le cas. Jai limpression dêtre une uvre dart qui a perdu tout son charme et son intérêt ; pour lui redonner sa beauté dantan, on la recouvre de précieux présents pour camoufler sa laideur et lui attribuer un peu de splendeur. Encore et toujours des bijoux, ensuite il sen va et ne rentre pas. Ses bijoux sont les seules oreilles à mon chevet lorsque toute seule dans la chambre, tard le soir, je tiens des monologues à en perdre les cheveux. Il me manque et une énième fois, ce soir, je reste assise, pleine dinquiétude à lattendre.