XXI.

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A l'hôpital, Frédérique retourne voir Guillaume dans sa chambre. Elle est prise de panique et parle à peine.

- Qu'y a-t-il Frédérique ?

- C'est....

- Calme toi et parle-moi.

- C'est ta...

- Ma quoi? Qu'est-ce qui se passe?

- Ta fille...

- Ma fille? Comment ? De quoi tu parles?

- Oui... Ta fille... elle est...

- Quoi?

- Elle est ici...

- Mais comment a-t-elle su que j'étais ici? Ça fait une quarantaine dannées que je n'ai pas eu de ses nouvelles. J'ai même pensé, l'espace d'un instant, qu'elle était morte.

- Non elle est bien ici mais il ignore que toi aussi.

- Mais si Marthe ignore que je suis là, que fait-elle ici?

- Elle est internée, tout comme toi.

- Quoi? Comment? Qu'est-ce qu'elle a?

- Une maladie grave qui peut lui ôter la vie à tout moment.

- Quelle maladie?

- Une insuffisance rénale.

- Étrange. J'ai une partenaire d'affaire qui souffre de la même maladie.

- Mais là, il n'est pas question de ta partenaire d'affaire! On parle de ta fille.

- Je comprends mieux pourquoi tu es ici et ce que tu souhaitais me dire tout à l'heure.

- Oui. Je suis là pour ma nièce. Et si, comme les médecins le disent, elle vit ses derniers jours, je pense qu'il faut que tu lui parles.

- Évidemment, j'aimerai lui parler sur le champ même mais la situation ne me le permet pas. Je suis incapable de me déplacer dans mon état.

- Je comprends.

- Demain, je ferai part de ma requête à l'infirmière chargée de mes soins. Je verrai avec cette dernière s'il est possible de me conduire à sa chambre.

- C'est la 145. Fais-le, je te prie.

- J'y veillerai. Maintenant j'ai besoin de me reposer s'il te plaît. Ça fait beaucoup à encaisser.

- Prends soin de toi.

- Merci.

Frédérique s'en va le cur léger laissant celui de Guillaume chargé. Ce soir, il ne peut fermer l'il. Il est pensif et inquiet à la fois. Pourquoi sa fille qui a disparu aussi longtemps revient aussi subitement dans sa vie? Sa mère, Margarèthe, de son vivant, s'est battue pour qu'elle ne rencontre jamais son père mais le destin en a décidé autrement. Les voilà internés dans le même hôpital. Guillaume a commis de nombreuses erreurs dans sa vie, comme tout homme d'ailleurs mais il a toujours souhaité les réparer bien que la vie ne lui en a pas toujours donné la possibilité. Il a cherché sa fille durant vingt longues années puis s'est résigné à abandonner sa quête lorsqu'il eut vent de sa supposée mort. Aujourd'hui, elle réapparaît dans sa vie. Il s'impatiente de la voir, d'apprendre à la connaître.

Seul, dans son lit, le sommeil à des lustre de lui, il se noie dans une tirade...

« Ressemble -t-elle à sa mère? A-t-elle des enfants? Un époux? Qu'exerce- t-elle comme travail? Ce doit être une grande dame aujourd'hui, Quarante-cinq ans ce n'est pas rien. Elle sera surprise de voir qu'elle a un petit frère qui a moins d'un an, une belle-mère qui est sa cadette de plus d'une dizaine d'années et j'en passe... Mais du coup si ma fille est de retour dans ma vie, ça change tout. Mon testament, l'héritage de mes enfants, tout. Je n'ai pas été présent pour elle mais je dois au moins l'être après ma mort d'une certaine façon en lui léguant une part de mes biens. Certes l'argent ne rachètera pas tout ce temps perdu mais cela pourra certainement l'aider. D'ailleurs, j'espère qu'elle n'a pas trop souffert et qu'elle n'a pas grandi dans le besoin. Même si sa mère ne voulait pas de mon argent, je me suis assurée qu'elle le reçoive anonymement par le biais de ses amies. J'aurais aimé la voir grandir, lui apprendre tout ce que je sais. Je m'impatiente. Je ne désire qu'une chose, serrer ma petite Marthe dans mes bras. »

Tendre déveine.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant