Les yeux rivés sur son corps qui semble endormi, je ne bouge pas pour éviter d'être repéré, parce que je sais qu'il ne dort pas. Heureusement qu'il n'est pas acteur. Sa respiration est beaucoup trop agitée, et son corps est tout crispé faisant ressortir ses muscles à travers la lumière de la lune. Un sourire diabolique s'affiche sur mon visage quand je le vois bouger. Il soupire et j'en profite pour l'étudier, je sort un crayon et mon carnet de dessin et commence à griffonner sur le papier sans réfléchir. Sa respiration s'apaise et son corps se détend enfin.
Je le fixe assise sur la chaise de son bureau, et regarde mon dessin avant de sourire. Je le détache délicatement avant de sortir mon couteau et de m'entailler la paume de la main. A l'aide de cet encre naturel je lui laisse un petit mot. Je pose mon dessin sur son bureau avant d'inscrire autre chose sur le miroir en face de son lit. J'entaille mon autre paume ayant plus assez d'encre et lui laisse comme signature ma trace de main ensanglantée à la fin de ma phrase. Je regarde mon chef-d'œuvre d'un œil satisfait, et dépose le dessin à côté de son lit et part discrètement. Au même moment, je vois Yanis rentré un sourire aux lèvres. Ilan à des choses à me dire.
Je fais le trajet en à peine dix minutes, et rentre sans toquer chez Ilan. Je trouve ce dernier en caleçon en train de s'habiller. Il me regarde, l'air surpris.
- Tu as pris des abdos ? Sa marche le sport avec Yanis, dis-donc ? dis-je un sourire au lèvre.
- Ta gueule. Je me change.
Il ne prend pas la peine de se retourner, je l'ai vu nu un nombre incalculable de fois et lui aussi. Je reste là quelques secondes avant de m'avancer dans son appartement comme si c'était le mien. J'oubliais, c'est le mien.
- Tu t'es fait quoi au main ? dit-il en commençant à s'habiller.
- J'ai laissé un petit cadeau à notre ami, dis-je en contemplant mes mains.
- Tu ne vas jamais t'arrêter ?
- Pas avant qu'il soit mort.
- Ou a ta merci ? suppose-t-il.
- Tu me connais trop bien. Comment ça va avec Yanis ? Je l'ai vu rentré tout a l'heure, il avait le sourire jusqu'au oreille, et on aurait dit un gamin de quinze ans qu'on venait de depuceler.
Ilan me regarde avant de me lancer son tee-shirt que je rattrape d'une main.
- On a rien fait. On a juste passé la soirée ensemble.
- Je te comprends pas, il te plait ?
- Oui, dit-il en ouvrant la baie vitrée et en me faisant signe de le rejoindre dehors.
On s'asseoit sur le canapé face au ciel noir, tout en regardant les etoiles. Il me tend un joint que j'accepte volontier, et il me répond enfin.
- Il me plait, mais il n'est pas très démonstratif.
- C'est-à-dire ?
- C'est un gay refoulé, il se comporte avec moi comme un pote.
- Avec toi, mais quand il est seul je te dis qu'il a la.. dis-je en mimant mon prochain mot qui est vite intercepté par Ilan.
- Je préfère attendre, s'il le faut il s'en fout de ma gueule. Il veut peut-être juste des techniques de combat, dit-il, l'air mélancolique.
- Arrête un peu, s'il fait ça c'est pas ta bite qu'il aura dans le cul mais mon flingue.
Il rigole légèrement avant de me demander:
- Tu penses que je mérite d'être heureux ?
- De quoi tu me parle ? Bien sûr.
- Non, mais genre avec un mari et peut être des enfants ? dit-il en soufflant sa fumée sans même détourner sa tête.
- Tu sais ce que j'en pense de tout ça, mais oui tu le mérites. Pourquoi tu ne le mériterais pas ?
- Avec tout ce qu'on a fait, parfois je me dit que l'univers ou le destin j'en sais rien, nous en veut. On ne sera jamais heureux.
Je me relève histoire d'être face à lui et de prendre sa tête entre mes mains.
- Tu mérites d'être heureux, plus que quiconque. Et tu le sera, parce que t'est fort.
- Toi aussi, tu le mérites. Pourtant on est là, on a eu des enfances de merdes.
- Je le mérite pas, Ilan. J'ai fait des choses impardonnables. Mais toi, tu as tué pour me sauver, ou pour sauver tout ce qu'on a construit. Alors si ton bonheur est chez ce Yanis, vas-y. Fonce, la vie est trop courte.
Ilan me regarde avant d'exploser de rire, je lui fout une baffe et le fusille du regard.
- Je t'ai jamais vu aussi sentimentale de toute ma putain de vie.
- La ferme, j'espère qu'il est hetero, dis-je en me rasseyant.
- Imagine, ça aurait été un cercle vicieux.
- Tu ne veux pas te venger, parfois ?
- Non, je veux pas lui montrer qu'il m'a atteint, je veux lui chier a la gueule en lui montrant que j'ai réussi ma vie pendant que lui il fait le mendiant devant notre club de strip tease.
- Sérieux ? dis-je en explosant de rire.
- Je l'ai vue la dernière fois, il m'a demandé de l'argent, je me suis mis devant lui et je l'ai fixé. Il m'a reconnu et a vite perdu son sourire.
- Tu aurais dû le tuer.
- Non, tu n'imagines pas sa tête quand il me voit tous les jours avec une liasse de billets.
- Je veux voir ça, un de ces jours.
- Il a l'air de regretter.
- Mon cul, oui. Il a fait ça pour l'argent et c'est tout. Ne commence pas à vouloir le pardonner. Il t'a manipulé, et est sorti avec toi juste pour l'argent. Il t'a frappé, humilié, et t'a vendu à ton père. C'est à cause de lui, sans lui ton père ne t'aurait pas foutu a la porte.
- Ton pere t'aurais foutu a la porte, si il avait appris que tu etait lesbienne.
- Il m'aurait défoncé, mais il m'aurait gardé. Il m'aurait vendu de la même façon.
- Quelle connard quand même.
- La vengeance, Ilan. Il n'y a rien de mieux dans ce monde.
- Tu arrives à te venger, moi ça me terrifie de revoir mes bourreaux.
- Tu veux savoir un truc, Ilan ?
- Non.
- Ta gueule. Entre toi et moi, le plus fort c'est toi. Tu ne te rends pas compte de la force qu'il faut pour passer tous les jours devant son pire cauchemar et lui sourire au nez. Tu penses que si tu étais fort tu te serais venger, mais c'est tout le contraire. Le silence est la pire des vengeances.
- Alors pourquoi tu fais que de te venger ?
- Parce que je suis faible. Je suis incapable de rester sans rien faire face a mes bourreaux. C'est un acte de pure faiblesse, dis-je en reportant mon regard sur le ciel.
- Tu as juste peur de souffrir à nouveau, ça ne fait pas de toi quelqu'un de faible, juste quelqu'un d'épuisé.
- C'est là ou tu te trompes, Ilan. J'ai pas peur de souffrir, j'ai peur de sourire.
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Let Me Hurt You - En bêta-lecture
RandomLexa, psycho-criminologue dans la prison de haute sécurité, est admiré pour son travail par ses collègues. Mais elle est aussi crainte par ses hommes. Chef d'un grand cartel, ses mots d'honneur sont: Cruauté, froideur, et Sadisme. Certains l'appelle...