Chapitre 6

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Je suis allée voir Jared peu après ma discussion avec Olay. Je ne sais pas pourquoi, ou bien peut-être que je le savais dans le fond, mais je ne voulais pas me l'admettre. J'étais jeune et encore idiote. Je passais mon temps à repousser les choses, à chercher une vérité qui n'y était pas. Aujourd'hui, je sais pourquoi je suis allée le voir.

Si Jared m'admirait, j'étais fascinée par lui. C'est à partir de ce jour que j'ai compris. Les choses ne seraient plus jamais comme avant à partir du moment où je posais volontairement les pieds dans son monde.

Je me suis avancée d'une démarche sereine. Se dégageait de moi une confiance innée. Dans le fond, avais-je réellement confiance en moi ? Probablement pas. On se base toujours un peu sur la figure maternelle pour évoluer, grandir et voire même s'affirmer. Ma mère n'était pas un modèle. Il n'y avait plus que moi pour devenir ma propre source d'inspiration.

Jared s'est arrêté dans son mouvement quand il m'a vue et ses yeux se sont mis à briller.

— Quelle agréable surprise !

Je l'ai dévisagé de haut en bas. Aujourd'hui encore, cette habitude me poursuit.

— Je veux comprendre, ai-je lancé avec conviction.

— Comprendre ? Que voulez-vous dire, ma chère ?

Son sourire s'est agrandi et j'ai pincé des lèvres.

— Je veux vous comprendre. Vous ne me devez rien, mais j'estime mériter la vérité. Qui plus est quand vous affirmez être un imposteur.

— Je ne suis pas un imposteur. Je suis simplement Jared.

J'ai tiqué. Un silence s'est ensuivi. Il a posé son arc contre l'arbre, puis s'est tourné vers moi.

— Très bien. Je vous raconterai tout, mais seulement parce que j'estime aussi que vous méritez la vérité. Et je ne suis absolument pas en train de céder à cause de votre joli minois, ou encore à la façon que vous avez de m'observer, loin de là.

Mon cœur s'est figé et je me suis retenue de sourire. Au lieu de cela, j'ai plissé les yeux, les bras croisés sur ma poitrine.

— Comment suis-je en train de vous observer ?

J'ai tenté de calmer les battements de mon cœur, mais celui-ci n'en faisait qu'à sa tête. Il aurait couru un marathon pour les beaux yeux de Jared. Il aurait galopé jusqu'aux fins fonds des déserts ardents, gravi des montagnes juste pour le revoir encore une fois sourire de la sorte.

Il a fait un pas en avant et j'ai pensé dans ma tête qu'il en restait trois pour que nous nous touchions.

— Pour être tout à fait honnête, je ne saurais dire. Vos yeux ont cet éclat intense qui vous différencie des autres femmes.

— Vous affirmez donc que je suis différente.

J'ai souri à mon tour, mais plus pour me moquer de lui. Il a pris ma réplique très honnêtement et a fait un autre pas en avant. Deux pas nous séparaient d'un contact physique. Un simple contact physique et qui, pourtant, me donnait chaud au corps.

— Différente... Je n'apprécie guère ce mot. Sommes-nous réellement différents les uns des autres ? Vos yeux le sont, c'est une évidence mais... Vous êtes bien au-dessus de cela, Danïa.

— Prenez garde, vous êtes presque sur le point de me courtiser.

Mon sourire s'est étiré et il s'est figé, comme presque surpris. Surpris de mon sourire ? Il a ouvert la bouche, puis l'a refermée.

Il a fini par dire d'une voix douce :

— Vous aimeriez que je le fasse, n'est-ce pas ?

— Moi ? Il serait importun de ma part de vous laisser faire, étant donné votre lien avec votre prétendue épouse.

— Je n'ai aucune épouse, Danïa.

— Quelqu'un doit bien vous attendre quelque part.

Il a fait un autre pas en avant. Je n'ai pas reculé. Si j'étais jeune, je n'étais pas une chochotte. Encore aujourd'hui, je ne le suis pas.

J'ai dû lever la tête pour le regarder dans les yeux. Mon cœur battait si fort dans ma poitrine que j'ai cru qu'il allait exploser.

— Personne ne m'attend, et je dirais fort heureusement. Il semblerait que mon cœur ait patienté tout ce temps dans l'espoir de vous trouver.

J'ai cru que j'allais défaillir. Jared était sérieux. Il n'y avait aucun sourire de malice sur ses lèvres. Rien qui m'indique qu'il se moquait ouvertement de moi.

Il n'y avait qu'un pas entre nous, un seul pas entre son corps et le mien. Le moment était si intense que j'ai pensé, à un moment, qu'il allait m'embrasser. Il n'en a rien fait. Pas ici, et pas dans cette atmosphère. Autour de nous, le monde était bruyant. Si mes parents me surprenaient, j'allais passer un sale quart d'heure. Et pour Jared, cela aurait été pire.

— Je vous ai dit que je vous contemplais, Danïa. Mon admiration pour vous est bien au-delà. Me laisserez-vous vous courtiser ?

Pourquoi diable aurais-je dit non ? Jared aurait pu être un voleur, je m'en fichais. Mais il me fallait tout de même réfléchir. Je le connaissais à peine.

— Une fois que je saurai qui vous êtes réellement, vous aurez ma réponse.

Il a hoché la tête, puis a reculé d'un pas.

— J'ai un cadeau pour vous.

J'ai froncé les sourcils. Un cadeau ? Jared a fouillé dans sa poche, et m'a tendue une fleur.

— En l'honneur du fameux Jeu des Roses, prenez cela en guise de mon attachement pour vous.

Il m'a souri et j'ai rétorqué :

— Ce n'est même pas une rose. C'est un coquelicot.

Et un très joli coquelicot. Jared s'est alors penché vers moi et m'a murmuré :

— Là est encore une fois toute la subtilité, ma douce.

𝐋𝐞 𝐉𝐞𝐮 𝐝𝐞𝐬 𝐑𝐨𝐬𝐞𝐬 | BONUSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant