Chapitre 8

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Kira

Alors que je n'avais pas encore digéré la nouvelle, Alocer arriva le premier.

Trainant une chaise derrière lui, il la plaça face à moi et s'assit. Il passa les premières minutes de notre rencontre à m'observer de ses yeux chocolats irisés d'or et de noir. En provocation, je fis de même. Il portait une tenue de chevalier cuivrée avec un lion rugissant gravé sur le plastron. En y regardant de plus près, sa face me fit penser à un lion, surtout à cause de sa tignasse noire opulente qui lui tombait sur les épaules. Il se tenait droit, jambes croisées dans une position quelque peu aristocratique, tandis que moi j'étais en tailleur adossée au mur en lambeau, la gueule d'un Valraven reposant sur ma cuisse. Le silence devint insoutenable alors je finis par le rompre.

- Vous êtes quoi ? Manticore ou sphinx ?

- Manticore, les sphinx ont des ailes. Et toi ?

- On va dire indéterminé. Vous allez m'empoisonner si je ne fais pas ce que vous voulez ?

Les manticores étaient réputés pour attaquer sournoisement leur adversaire avec du poison.

Il eut une espèce de ricanement, sans pour autant montrer la moindre émotion. Puis il finit enfin par se lever, il épousseta son pantalon puis sortit. Lorsqu'il revient cette fois-ci, il avait retiré son armure et trainait derrière lui une table sur laquelle se trouvait une autre chaise. En fait, il n'avait pas fait qu'enlever son armure il s'était carrément changé. Désormais il arborait un pantalon à pince sombre couplé d'une chemise rouge ornée d'un col jabot. Il était chic, je ne pouvais pas lui retirer ça.

Il plaça le tout contre le mur avec une grande élégance.

- S'il te plait, cette fois, prière de ne pas détruire le matériel, tu arrives bien à le faire avec ton animal alors fais un petit effort. Maintenant on commence.

- Et par quoi ?

- Par vos bonnes manières, très chère. Il serait temps, c'est abominable.

Je réprimai un grognement à son égard cela aurait été lui donner raison. Hors de question de le satisfaire. Alors j'encaissai l'attaque directe. Il me regarda avec un air suffisant, s'assit en croisant ses jambes, encore une fois.

- Bien, commençons, il y a du travail.

Ses cours ne furent non pas durs, non, ça aurait été le paradis. Ils étaient bien pires que ça ! Effroyables !

Il voulut corriger par la force chacun de mes gestes, de mes pas et de mes mots. Je dois dire qu'au début je m'étais moquée de lui. Je l'avais grandement sous-estimé. Il commença par me faire marcher droite, un livre en équilibre sur la tête. De sa chaise, il me lançait ses remarques de façon impérieuse. Cet exercice me parut dans un premier temps stupide, mais il prenait un malin plaisir à rajouter un autre bouquin à chaque fois que j'en faisais tomber un, pesant ainsi monstrueusement sur le sommet de mon crâne. « J'avais déjà remarqué au conseil que tes manières étaient des plus déplorables. Je vois que rien n'a changé. S'assoir sur les genoux d'un homme n'est vraiment pas approprié, jeune fille » me fit-il un matin. Me remémorer ainsi le passé, me mit hors de moi, si bien qu'une onde noire se propagea. Sa réaction fut presque instantanée, et il déploya un champ de force autour de lui et de la table.

Pendant quelques secondes, aucun bruit ne sortit de sa bouche. Le silence fut finalement rompu par le bruit qu'il émettait tandis qu'il sirotait sa tasse de thé. Puis il reposa la tasse dans sa coupelle.

« Eh bien moi qui croyais avoir expressément demandé que tu ne t'en prennes plus aux meubles. Cela n'a pas été d'une grande efficience de toute évidence ».

L'Île d'Hécate, Tome 1 : ProphétieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant