Neflya

Chapitre 8_plan

Pour la première fois de toute ma vie, j'étais au-devant d'une foule qui me semblait gigantesque, et dont l'entière attention était focalisée sur moi. C'était peut-être déjà arriver, mais jamais avec autant de personnes, et jamais avec autant d'enjeux derrière.

Non, plus improbable encore : j'étais à la place de la reine. J'étais en train d'expliquer un plan d'attaque et de donner des ordres à un royaume entier. Les mains moites, la voix tremblante, je parlais de plus en plus vite avant que mes doutes ne me rattrapent, que j'arrête de parler une simple seconde et que je n'arrive jamais à repartir sur cet élan.

Ma gorge se serrait en un nœud de plus en plus étroit, les doutes me montaient à la tête. Je ne voulais qu'une seule chose : partir en courant le plus loin possible.

Encore une fois, pourquoi moi ? Pourquoi une vulgaire enfant de seulement quinze pauvres années, sans aucune capacité particulière ? Moi qui ne savais même pas faire un petit discours sans paniquer ? Et pourquoi personne n'avait encore remis en question mon autorité ? La reine était mourante, je n'étais qu'une enfant, alors pourquoi ne pas avoir encore remis en doute ma place ? Étaient ils tous complètement fou de mettre leur sort entre mes mains ?

Et si mon plan était complètement foireux ? Et si au lieu de sauver le monde tout le monde mourait par ma faute ?

STOP.

C'est moi que la prophétie avait désigné, et je ne pouvais pas donner mon rôle à qui que ce soit. C'était moi, peu importe pourquoi, c'était moi et personne d'autre, et ce n'était pas le moment de tout remettre en question. Plus maintenant, c'était déjà trop tard.

Après vingt interminables minutes d'explications et d'encouragements, je descendais de l'estrade et me dirigeais directement vers ma chambre, dans un état presque second, sans regarder qui que ce soit.

Maintenant que le royaume entier connaissait le plan, et le rôle de chacun, il n'y avait plus de retour en arrière possible. Si j'avais commis une erreur quelconque, je ne pouvais plus revenir dessus.

Lorsque j'arrivais devant mon lit, je me laissais tomber dessus comme une masse, et n'eux même pas le courage de me glisser sous les bras. Je me laissais doucement envahir par un sommeil brumeux.

Après ce qui me semblait être un rapide battement de cils, j'ouvrais les yeux, lourds et encore ensommeillés. Doucement, je pris conscience de la sensation contre ma joue : des très, très, très doux poils.

- Réveillée ?

Je tournais la tête vers les poils, prenant soudain conscience de l'anormalité de cette situation, et me retrouvais face à la reine. Je baladais rapidement la pièce du regard et demandais timidement :

- Combien de temps ai-je dormi ?

Doucement, je remontais les draps jusqu'en haut de mon cou, me sentant soudainement très nue, dans mon pyjama miteux, allongé sous le regard de la reine.

- Seize heures.

- SEIZE HEURES ?! M'écriais-je. Mon Dieu, je n'ai rien raté, j'espère ? On ne s'est pas fait attaquer, n'est ce pas ?

À mon grand étonnement, la reine éclata d'un rire, étonnement cristallin pour un rire de lion ailé.

- Ne t'en fais pas, il m'est arrivé la même chose après mon premier discourt : j'ai dormi une journée entière. Et non, tu n'as rien raté.

Je hochais doucement la tête.

- Par contre, on devrait agir au plus vite, avant que nos ennemis nous devancent. Les lions ailés et les griffons t'attendent pour la première phase de ton plan, ma fois plutôt bien imaginé.