Chapitre III

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Les cris stridents d'Elicia sortirent Rory et le reste de la maisonnée encore endormie, de leur sommeil. Rory avait la tête dans le coaltar en sortant du lit, rien d'étonnant vu ce qu'elle avait fait hier. Elle retrouva l'effervescence des matins d'école chez les Holt, les jumelles se chamaillant parce que l'une voulait piquer le gloss de l'autre, Evan qui passait des heures enfermé dans la salle de bain et Elicia qui braillait des chansons Disney à tout va. La bonne vieille routine. Une routine qui se chargea de lui rendre les idées plus claires.

Une heure plus tard, petit déjeuner avalé, la petite troupe se dirigea au trot, vers le Van rose à fleur de Vanessa. Un moyen encore plus sûr d'assassiner la vie sociale de Rory, non qu'elle s'en préoccupait à vrai dire. Cody, lui, avait son Scooter, ce n'était donc pas un problème pour lui. À une certaine époque, Rory allait à l'école dessus mais la conduite dangereuse de Cody l'effrayait plus que d'être ridiculisé de toute façon.

N'étant pas totalement remis de son manque cruel de sommeil et de l'alcool ingurgité, sans compter les joints, elle somnola la tête appuyée contre la vitre, ses écouteurs enfoncées dans les oreilles diffusant du reggae. Le trajet fut long car Vanessa déposa d'abord Elicia à l'école primaire puis direction l'Institut pour les autres petits monstres où lycéens et collégiens se côtoyaient avec dédain pour les premiers, fascination pour les deuxièmes. Ce n'était pas courant pour des enfants en famille d'accueil de fréquenter l'école privée du coin. Mais Vanessa et Bly ne lésinait quand il s'agissait de prendre soin des enfants qu'ils avaient à leur charge. Puis ils en avaient largement les moyens.

Bly était pâtissier, mais il n'avait pas n'importe quels clients. Tous les nantis de Malibu et de ses environs se battaient pour ses préparations. Vanessa, quand à elle, était styliste. Son rayon c'était les maillots de bain, les combinaisons de surf, de plongée, bref tous les éléments se rapportant à la plage. Inutile de dire qu'ici à Malibu, c'était le genre de chose qui cartonnait. Autrement dit, le couple pouvait largement s'occuper de 6 gamins sans attendre quoi que ce soit de l'État.

Rory n'attendit même pas que Vanessa se gara pour sauter à terre et s'en aller après un signe bref de la main. La mère de famille la suivit du regard jusqu'à ce qu'elle se perde dans la foule d'adolescents amassés sur la cour. Elle soupira lourdement puis fit des petites recommandations d'usage au reste de la bande. Les jumelles hochèrent la tête d'un air ennuyé mais Marvin et Evan écoutèrent avec la plus grande attention surtout Evan vu que c'était sa première année au collège.

Étant à des miles de toute cette ringardise comme elle aimait le dire, Rory entra dans l'immense bâtiment avec la façade en marbre, son emploi du temps en main et la clé de son nouveau casier. Son sac en toile noir accroché à son épaule, elle s'en alla d'un pas raide esquivant le plus possible les contacts avec les autres adolescents.

Parmi tout ce lot, elle vit des visages familiers comme Patricia Mayfair, la cousine de Tyler Chester, sa première amie ici, ainsi que des visages inconnus, des nouveaux ou des gens n'ayant jamais croisé sa route jusqu'ici. Elle trouva finalement son casier, le 315 sur sa gauche. Elle sortit son trousseau de clés mais se fit bousculer au même moment.

Son visage heurta le métal froid avec fracas provoquant quelques ricanements. Elle eut tout juste le temps d'apercevoir le dos d'Hugo qui ne se retourna même pas avant qu'il ne disparaisse dans un tournant. Elle ravala l'insulte qui menaçait de jaillir de sa gorge, se frotta le front endolori puis revint à sa tâche. Très mature Cerbère, grommela-t-elle entre ses dents.

Le casier s'ouvrit enfin, par chance cette année, elle n'avait pas hérité de celui d'un négligent qui ne l'avait pas vidé à la fin de l'année scolaire. Elle pût déposer ses livres de cours, fatiguée d'avance de cette année scolaire. Des fois, elle donnerait tout pour être invisible, passer inaperçue. Toute cette attention malsaine l'épuisait et la rendait encore plus irritable qu'elle ne l'était déjà. Mais quand on était une jeune métisse venant du ghetto et amputée d'une jambe c'était difficile de passer inaperçue.

Sad kidsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant