1er novembre

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Leo a remarqué que je n'ai pas dormi.

Le sommeil m'a fui. Ou peut-être est-moi qui ai tenté de lui échapper. Toujours est-il que je n'ai fermé l'œil de la nuit, passant de longues heures à fixer le plafond et à raviver le feu dans la cheminée.

Lorsque l'aube a percé l'horizon, je me suis aussitôt levé pour préparer le petit-déjeuner (encore de la soupe, pour ne pas changer). Ça a été ma première erreur.

La deuxième a été de ne pas répondre à Leo quand il m'a demandé si tout allait bien. Il était surpris de me voir debout avant lui, moi qui d'habitude suis un plus grand dormeur.

Tu me caches quelque chose, a-t-il déclaré plusieurs heures plus tard.

Nous étions alors assis devant la cheminée, où nous passions la majorité du temps depuis quelques jours. J'avais sorti un puzzle d'une des chambres de l'étage, et nous nous occupions à reconstituer l'image tout en empêchant Milo de voler les pièces.

Je dois avouer que je n'ai jamais été un bon menteur. Probablement parce que je n'ai pas eu l'occasion de m'entraîner. Je n'en ai jamais eu besoin. Ce qui fait que Leo m'a aussitôt percé à jour quand je lui ai assuré que non, je ne lui cachais rien.

Tu n'es rien obligé de me dire, mais si jamais je t'ai vexé, ou...

Quelque chose dans mon expression l'a forcé à s'interrompre, et il s'est enfoncé dans la couverture, les yeux baissés. J'ai dégluti avec difficulté avant de prendre mon courage à deux mains.

Je lui ai dit qu'il n'avait rien fait. Enfin, rien de mal. Que le problème venait juste de moi.

Ça commence toujours comme ça. "Ce n'est pas toi, c'est moi..."

Je lui ai répondu que nous n'étions pas dans un film, et que j'étais honnête, bordel Leo.

Leo a enfin relevé la tête, et dans la lueur des flammes, j'ai eu l'impression de voir ses yeux briller.

serait-ce de l'espoir ?

L'éclat des prunelles de Leo n'a pas diminué tandis que je lui expliquais ce qui m'arrivait. Que son baiser m'a tellement perturbé qu'il en est venu à déranger mes songes. Que je ne cesse d'y penser, et que je n'ai aucune idée de quoi ressentir.

Leo n'avait qu'une question à me poser.

Est-ce que ça te dérangerait de recommencer ?

Ma réponse fut immédiate.

Non.

Les instants qui ont suivi sont un peu flous dans ma mémoire, mais je me souviens de l'essentiel. De la façon dont Leo a rampé sur le matelas jusqu'à me rejoindre, assez près que pour que la chaleur de son corps remplace celle de la cheminée. De la façon dont ses yeux ont cherché les miens, avant de se poser sur mes lèvres. J'ai hoché la tête.

Puis il m'a embrassé.

Cela n'avait rien à voir avec le dernier baiser qu'il m'a donné. Cette fois-ci, je n'avais aucun doute quant à ses intentions. Ses mains ont saisi mon visage et ses doigts se sont entremêlés dans mes cheveux, m'arrachant un son à mi-chemin entre le gémissement et le grognement.

J'ai des frissons rien que d'y repenser. Je n'aurais jamais cru qu'un jour, j'écrirais une telle chose dans mon journal. Est-ce que vous y croyez, vous ? Ou pensez-vous que je suis en train de lentement perdre la tête, à coucher sur le papier mes songes et désirs non-assouvis ?

Je ne vous en voudrai pas si c'est le cas. 

HIRAETHOù les histoires vivent. Découvrez maintenant