11 - Butterflies

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Je finis par arrêter de soutenir son regard en orientant mes yeux ailleurs, un peu retournée par ce qui vient de se passer.

Ça me rappelle que je ne vous l'ai jamais décrit, je me suis contentée de vous dire qu'il sortait tout droit d'une pub de parfum.
Notre Monsieur Top Model est grand, genre 1m85 (en fait j'en sais rien, mais il est grand), il n'est pas culturiste (et tant mieux) mais, disons que le sport qu'il fait le lui rend bien, si vous voyez ce que je veux dire.
Et pour que vous compreniez pourquoi je disais qu'il était un cliché sur pattes, il est blond aux yeux clairs, pas bleus mais genre verts/gris. Il a les cheveux très courts et bouclés.
Aujourd'hui, il porte un large t-shirt blanc, un pantalon cargo kaki et des Air Max 90 blanches... Bref il est... t'as capté.

Revenons à nos moutons :

- On mange ? Je demande pour briser le silence et aussi parce que j'ai un peu faim.

Il me regarde en souriant. Je sais ce que veut dire son sourire. Il veut dire "ok, tu veux esquiver ce qui vient de se passer, donc je vais te laisser esquiver mais pas pour bien longtemps" et il a raison. Je suis en train de faire l'idiote pour retarder le moment gênant.

- Ouais, mangeons. Par contre t'as préparé à manger pour mille là !

- Ahah non, c'est juste que j'ai fait plusieurs choses mais en petites portions. J'aime bien avoir le choix et puis je connais pas tes goûts surtout. Je voulais aussi que t'aies le choix et éviter que tu n'aimes rien.

- C'est un truc de ouf comment tu te prends la tête pour tout Halima. Est-ce que ça se met en repos des fois là-dedans ? Dit-il en montrant ma tempe.

Je me contente de hausser les épaules avant qu'il ne reprenne.

- En tout cas ça me touche que t'aies pensé à moi donc merci. Et je suis sûr que je vais tout aimer.

- T'as intérêt, j'ai tout préparé avec amour, dis-je avant de commencer à manger.

On mange en discutant, pendant des minutes. C'est calme, léger, parfois drôle et je suis bien.

- Au fait, t'habites toute seule ? Parce que le jour où je suis venue klaxonner en bas de chez toi je me suis pas posé la question de savoir si ton daron allait descendre me démonter parce que je fais du boucan devant chez lui.

- Ahahahah, espèce de taré ! Non mais ce soir-là j'ai halluciné, je me suis dit mais c'est un fou en fait. C'est moi qui voulais te démonter oui !

- Franchement, tu pousses à bout aussi à ghoster. J'avais pas d'autre choix que d'employer les grands moyens !

- Mouais, bah sois rassuré. Mes parents vivent au Soudan et oui je vis seule ici... Dis-je, un brin mélancolique.

- Pourquoi t'as l'air triste en disant ça ?

- Triste, non. Mais ma vie là-bas me manque parfois.

- Ah parce que t'as grandi là-bas ? Je pensais que t'étais une pure souche 93 moi, rit-il.

- Eh non, je ne suis là que depuis que j'ai commencé la fac. Et comme je sais que tu vas te demander comment je parle si bien français. J'ai toujours été en école privée française et j'ai même passé 2 ans en France plus jeune, voilà.
Et toi ?

- Quoi moi ?

- Ben, t'as toujours vécu là ? Tu vis seul ?

- Ouais, un pur sang 93 moi malgré tes a priori sur moi au début ahah.
Je suis né là, j'y ai grandi et j'y suis toujours. Mais je vis seul depuis que mes parents sont partis s'installer dans le sud.

- T'as pas voulu partir avec eux ?

- Honnêtement j'y ai pensé mais déjà j'ai la fac et puis même si des fois j'en ai marre de n'avoir vu que ces tours toute ma vie, c'est chez moi, j'ai mes potes et je m'y sens bien en fin de compte. On verra plus tard...

- Voir quoi plus tard ?

- Wesh Halima t'es psy ou quoi ? Rit-il

- Mdr bah presque oui...

- Putain j'avais oublié ce détail ! Quelle idée moi aussi d'être tombé sous le charme d'une meuf en fac de psycho. Je me suis mis dans un bourbier là ahah !

Il vient de dire qu'il est tombé sous mon charme.

- T'es tombé sous mon charme ? Souris-je

- Tu vas pas me faire croire que tu ne l'avais pas compris Halima... Dit-il en me fixant.

Je me contente de sourire avant de reprendre notre conversation.
Nous avons discuté de tout et de rien mais surtout de nous pendant des heures. Nous avons joué au Uno puis à cache-cache (ouais on a vraiment joué à cache-cache).
Puis nous nous sommes posés, dans le silence. Pas un silence gênant mais reposant.

- On commence à y aller ? Je propose.

- Let's go, même si je me serais bien endormi là.

- Ouais non on va éviter les bails sombres. Je t'ai déjà dit que je veux pas finir aux faits divers du 20minutes.

- J'avais oublié. Je crois qu'il faut que tu te réorientes. La psycho ça te fait trop psychoter...

- Poubelle celle-là aussi !

- T'es dure en affaires toi, elle était pas mal pourtant.

Nous arrivons à la voiture, rangeons tout dans le coffre et prenons la route en musique. On chante, on rit. Le trajet se fait dans la bonne humeur jusqu'à chez lui.

- Voilà Monsieur, vous êtes arrivé à destination.

- J'ai passé une super bonne journée et tout était super bon.

- D'ailleurs, prends ce qui reste dans le coffre, je ne finirai pas moi.

- Ne me le dis pas deux fois, je vais bien manger ce soir !

Je ris face à sa remarque.

- Et pour répondre à ta question, oui je suis tombé sous ton charme et surtout sous ta personne tout court. Et là là, tu vas te foutre de moi et je vais te donner de nouveaux arguments pour que tu me traites de gars cliché mais je m'en fous.

Je pourrais avoir envie de le vanner tellement il me fait me sentir dans une comédie romantique mais son regard intense vers moi me fait perdre mon sens de l'humour.

Je peux Halima ? Dit-il, la main gauche sur ma joue droite et le visage proche du mien.

Je ne sais pas à quel moment il a réduit l'écart entre nos deux visages, collé son front au mien... Il m'a demandé la permission ? Oui, il vient de me demander la permission et ça me fait fondre sur place.

Je fais oui de la tête avant qu'il ne scelle nos lèvres, dans un doux baiser auquel je ne veux pas mettre fin.

Les papillons dans le ventre que je ne pensais n'être qu'une image sont bien réels, je les sens.

J'intensifie le baiser en encerclant son cou pendant qu'il caresse ma joue d'une main, alors que son autre main va et vient entre mes cheveux et ma nuque, sans jamais qu'on ne se lâche des yeux...

Il me semble qu'à cette heure-ci, le soleil a quitté son zénith depuis un moment, alors pourquoi fait-il si chaud ?


Halima, raconte !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant