Chapitre 1 : Welcome in America

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Les États-Unis d'Amérique avaient une drôle d'odeur.

C'était la première chose qui était venue à l'esprit du pilote en descendant du cargo militaire de la Marine nationale. Le reste semblait plutôt normal. Des soldats à gauche, des avions à droite, cette base n'était en rien différente de celle dont le soldat français avait décollé une dizaine d'heures auparavant. Une chose avait tout de même énormément changé, ses cervicales. Le voyage ne leur avait définitivement pas été bénéfique. Quel idée aussi de l'envoyer avec le matériel, comme si sa vie ne valait pas plus qu'un fusil d'assaut. Tout ça parce que l'armée souhaitait que le seul français au kilomètre à la ronde garde un œil sur le précieux butin durant le trajet. Mais ce n'était pas la seule sécurité qui avait été mise en place. Le soldat avait bien remarqué la petite douzaine d'hommes armés jusqu'aux dents qui l'attendait de pied ferme un peu plus loin sur le tarmac. Et ce comité d'accueil n'était clairement pas pour lui mais bien pour les larges caisses en sa possession. Autant de mystère et de vérification, le pilote commençait à penser que la France devait être sacrément désespérée pour envoyer une telle cargaison contre sa seule présence à l'école. Mais à quoi bon se tordre l'esprit quand on a enfin la chance de fouler le sol de Top Gun. Plus réputé, ça n'existe pas dans le monde du pilotage. L'année '86 souriait pour le tout récemment gradé qui, sous la demande d'un soldat un peu plus vieux que lui, se dirigeait maintenant vers l'intérieur du bâtiment aux allures de hangar.

A peine entrée, on lui fit rapidement comprendre, dans un anglais quelque peu compliqué à déchiffrer pour un français, que son arrivée avait pris du retard, qu'il doit donc rejoindre le commandant de l'école dans la salle de briefing et que par conséquent ses quartiers lui seront présentés plus tard dans la journée. Il se dirigea alors dans la direction qu'on lui avait indiqué et une fois devant la porte, attendit que l'officier de garde annonce sa présence à son supérieur. Son apparence jusque là n'avait pas paru poser de problème, peut être est-ce simplement parce que personne ne sait ce que le Frenchie faisait dans les parages. C'était l'hypothèse la plus plausible car, dans sa condition - parce que, de son point de vue, dans l'armée, son genre est une condition - sa présence était une première pour l'école. C'était un outsider.

Lorsque la porte s'ouvrit de nouveau, on l'invita à s'avancer entre les deux rangs de fauteuils occupés par des jeunes hommes de son âge. Trois autres militaires, tous bien plus âgés et plus haut gradés que le Marin français et ses camarades Américains se dressaient à l'avant de la salle. Voilà ses instructeurs pour les prochaines semaines. Sur les trois, seulement un des gradés lui faisait face au bout du passage. De son mètre quatre vingt presque menaçant, le regard sévère et la moustache en brosse poivre et sel peignée à la perfection, le récemment promu lieutenant de vaisseau reconnue de suite le Commandant dont il avait eu l'occasion de faire la connaissance par le passé. Le Commandant Mike "Viper" Metcalf. Le pilote s'arrêta face à lui, regroupa ses pieds en faisant claquer les talons de ses rangers, laissa un de ses bras le long de son corps tandis que l'autre se dirigeait vers son front pour saluer son supérieur avec tout le respect qui lui est dû.

"At ease, dit-il en saluant en retour."

Juste au mot de repos, tout son corps se détendit. Ses mains se rejoignirent lentement derrière son dos alors que ses pieds reprenaient un écart plus naturel. Tout les regards étaient tournés vers le nouveau venu. Une vraie bête de foire. Il est vrai qu'avec son calot vissé sur le crâne, sa chemise blanche impeccable ornée d'épaulettes noires et dorées, son pantalon bleu marine et ses rangers noirs récemment ciré, le soldat français se démarquait très largement des Américains aux uniforme exclusivement marron sable qui l'entouraient. Même la discipline dans sa posture semblait les intriguer. Le pilote pouvait sentir tous ces yeux qui le fixaient avec curiosité. Qu'il veuille l'accepter ou pas, il venait officiellement de sauter dans le grand bain. Être le meilleur pilote de France est insignifiant ici. Encore plus lorsque, face à ces hommes, se présente...

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