ÉPISODE 11

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Vêtu de mon ensemble Nike, l'arrière de la tête écrasée contre le mur, j'attends. L'odeur du chlore devient de plus en plus insupportable. J'vais limite gerber là, mais je me retiens encore. Après cette petite heure de natation, on peut dire que je suis à bout d'force. À bout de force et le ventre vide en plus.

Je ferme un peu mes yeux et quand je les ouvre, c'est pour observer l'arrivée d'Alexis. Eh bah, il a pris sa vie le boug. Il se douchait et ça va faire plus de quinze minutes que j'l'attends comme un con. Bien sûr, on a pris une douche à tour de rôle parce que monsieur est mal à l'aise à l'idée d'être à poil devant quelqu'un. Autrement dit, bah c'est un coincé. Voilà, je vais pas en dire plus.

Le bon côté des choses, c'est que j'me suis lavé avant lui, parce que je suis son aîné – il est né en juillet et moi en février. Ouais, donc j'ai gagné.

Un autre bon côté, c'est qu'on peut enfin s'tirer d'ici. Je perdais patience wesh.

Mon sac sur le dos, j'avance vers la sortie suivi du blond à lunettes. On s'est mis d'accord pour bouffer dans un snack très proche du centre sportif. Après cette séance de nage, nos jambes ne sont plus aptes à parcourir de longues distances. Du coup, en moins de dix minutes, on est déjà devant l'enseigne : Campus Grill. Ça vend Kebab, Tacos, burgers etc. Nickel.

— Putain, j'ai faim sa mère, dit-il, alors que nous faisions la queue.

— Ouais, pareil.

On se regarde même pas quand on s'parle. Lui a les bras croisés et son pied tape contre le sol d'un geste répétitif. Le bruit des chaises et des discussions animait l'endroit. Et c'est pas une bonne chose, j'aurais préféré le calme en fait. Je soupire, une grimace déformant ma bouche. Y a un gros devant nous et il parle au téléphone de sa voix aiguë. Comment ça me casse les boules.

D'ailleurs... quand j'y pense là, c'est assez chelou qu'on vienne manger ensemble, genre Alexis Weber et moi. J'aurais jamais cru, hein. Après, faut dire que c'est par pur hasard et rien d'autre. Si je crevais pas de faim, j'aurais attendu d'être rentré. C'est donc certainement la première et la dernière fois.

Notre tour arrive après une putain d'éternité. Je commande un kebab et paye avec mes dix euros restant. Le caissier me rend la monnaie. Alexis, quant à lui, prend juste une salade et rien d'autre. Eh bah, il est comme ça lui. Je fronce les sourcils. Genre, il est sérieux à prendre une salade ? Il fait comme il veut hein, mais il vient de me dire qu'il avait grave faim.

— Une salade ? je demande, en prenant mon sandwich emballé.

— Ouais, quoi ?

On choisit une table quelconque, près des vitres du restaurant. Je retire ma veste et la pose sur le dos de la chaise.

— Une salade, ça coupe pas la faim mec, je réponds, avant de croquer dans mon kebab.

— Si, y a des tranches de poulet dedans.

— Pff... t'es comme ma mère toi wesh.

Il lève le regard vers moi, un sourcil haussé.

— Comment ?

— Bah elle cuisine que des trucs sains, genre... c'est barbant.

— Je mange jamais d'la malbouffe en vrai. C'est mauvais pour la santé et puis... ouais, j'aime pas.

Ouais, ça confirme bien qu'il est coincé. C'est vrai quoi ! Imagine tu viens à un snack pour manger une salade. En plus, il a mis une sauce citron dessus, ce qui arrange rien au goût de ce truc. Je parie que les morceaux de laitue datent de l'année dernière s'il-vous-plaît.

JÉRÉMY, aime Alex Où les histoires vivent. Découvrez maintenant