Chapitre 15

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Son sang glacé se mit subitement à bouillir et il put entendre sa respiration s'accélérer au souvenir de la noirceur d'encre de cette chambre. Cette étreinte passionnée qu'il avait rendu quelques fois sauvage se dessinait enfin devant ses yeux. Hadjar n'arrivait plus à la quitter des yeux, traçant son regard aiguisé sur ce visage qu'il avait pourtant observé de nombreuses fois. Il sentit les jointures de sa main se tendre, laissant deviner leur blancheur sous l'impulsion du désir qui commençait à refaire surface comme digue innarêtable.

Elle baissa les yeux et voulut le contourner mais il s'y opposa en se dressant devant elle. Surprise, elle redressa la tête, les sourcils froncés.

Conscient qu'ils n'étaient pas seuls, conscient que son comportement était sur le point de le trahir, Hadjar s'écarta de son chemin en précisant :

- Je dois vous voir dans mon bureau, ordonna-t-il sur un ton plus dur que prévu.

- Je ne peux pas, il va bientôt faire nuit, dit-elle d'une voix troublée. Est-ce que cela peut attendre demain ?

- Non, c'est urgent et de toute façons il n'est pas question que vous quittiez ce manoir.

Dans quelques secondes il deviendrait fou, songea-t-il en gravitant ses yeux aussi noir que du charbon sur ce corps qu'il avait essayait en vain d'imaginer. Maintenant qu'il n'était plus qu'une ébauche mais une peinture vivante, Hadjar sentit ses mâchoires se contracter violemment, aiguillonné par une émotion indicible.

- Venez, dit-il d'une voix plus amène en l'invitant à passer devant lui.

Elle tourna la tête vers Jacob pour lui adresser un regard confus puis le suivit jusqu'à son bureau. Hadjar qui se tenait derrière elle, absorba son odeur et à force de la humer avec concentration celle-ci devint aussi semblable que celle de cette nuit d'orage.

Elle portait son bébé et il n'avait pas besoin de test ADN pour le prouver. Cette pensée le rendit encore plus fou et désireux de la protéger envers et contre tout.

- Je ne comprends pas votre Altesse, lui dit-elle quand il eut fermé la porte.

Cette voix...comment avait-il fait pour ne pas la reconnaître ?

Il ôta son manteau qu'il jeta sur le bureau sans quitter son ventre arrondi qui portait son enfant.

Un sentiment jusqu'alors impossible à ressentir lui comprima la gorge et il s'amplifia lorsqu'il remonta ses yeux sur son visage délicat et pâle.

Était-ce le destin ?

Est-ce que cette pénitence n'en était pas une mais plutôt une réponse à ses longues prières ?

Hadjar ne croyait pas au hasard mais au destin oui, il y croyait.

Il se mit à fondre son regard qu'il savait animal sur sa poitrine qui se soulevait rapidement puis soudain un goût amer remonta dans sa gorge car elle était si jeune. Il se retourna pour qu'elle ne puisse pas voir son visage peint de dégoût et de culpabilité mêlés. Il n'avait pas seulement l'apparence d'un monstre, il en était un, mais pour la première fois de sa vie, le monstruosité de son péché lui vrilla les tempes d'une douleur bien pire que celle qu'il avait ressenti dans le bureau de Charles Hanton.

Puis brusquement cette culpabilité et ce dégoût disparurent à la pensée délicate de cette jeune femme qui lui avait offert ce qu'aucune autre n'aurait pu lui donner.

Assoiffé d'égoïsme, lui qui ne l'était jamais, avait désiré cette pureté et cette douceur. Il avait voulu désespérément l'explorer, s'y accrocher.

La captive du désert ( L'enfant secret du cheikh )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant