Chapitre 3.

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Caligula, de son vrai nom Caius César, naquit le 31 août de l'an 12 après JC, sans doute à Antium. Il était le troisième fils de Germanicus, neveu et fils adoptif du futur empereur Tibère, et d'Agrippine l'Ancienne, petite-fille de l'empereur Auguste.

Détail qui n'est pas sans importance, le petit Caius, descendant direct d'Auguste, se trouvait également être, par sa grand-mère Antonia, l'arrière-petit-fils du vaincu d'Actium, le lunatique Marc-Antoine.

Alors que son troisième descendant mâle poussait ses premiers cris, Germanicus, l'un des meilleurs soldats de son temps, se trouvait sur les bords du Rhin, fort occupé à guerroyer contre les Germains. Il avait fort à faire : il s'agissait alors de modérer l'ardeur combative des Barbares qui, sous la conduite de leur chef Arminius, avaient infligé, quelques années plus tôt une défaite au général romain Varus et anéanti ses légions. Agrippine, accompagnée de toute sa famille, rejoint son époux. C'est là, sur la frontière du Rhin, qu'ils apprirent que le vieil empereur Auguste était mort et que Tibère avait accédé au pouvoir suprême.

Ce décès ne changeait pas grand-chose aux espérances politiques et dynastiques du père de Caligula. En effet, le vieil Auguste avait pris toutes les dispositions utiles pour lui assurer l'avenir le plus radieux. En définitive, ce serait lui, Germanicus, fils adoptif et d'ors et déjà successeur désigné de Tibère, qui héritera de l'Empire si son "père" venait à mourir ou renonçait au trône. Or, le nouvel empereur n'était plus tout jeune, il était usé par des années de vie militaire et, qui plus est, sujet à de fréquentes crises de déprime. Il suffisait donc que Germanicus attende quelques années, voire quelques mois, pour que, sans pleurs ni grincements de dents, le pouvoir tombe.

Mais les soldats, eux, ne l'entendaient pas de cette oreille ! Pour eux, la désignation de Tibère n'était qu'une farce ! On essayait de les lanterner ! Les Sénateurs de Rome avaient désigné un Princeps ? Soit ! grand bien leur fasse ! Mais eux, ils avaient le droit imprescriptible de choisir un Imperator ! Selon la logique du Principat, cette prétention pouvait paraître légitime : dans le système politique conçu par Auguste, le chef politique de Rome, celui que, par facilité, nous nommons "empereur", cumulait deux fonctions : il était tout autant le chef du Sénat et du Peuple que le commandant en chef des armées romaines. Pour les soldats, la question de leur bon droit "constitutionnel" ne se posait donc pas. Il s'agissait plutôt d'un problème de "ressources humaines". Ils voulaient que Germanicus ceigne immédiatement le bandeau impérial plutôt que cette vieille ganache blanchie sous le harnais de Tibère.

De murmures en récriminations, la situation se dégrada très sérieusement. Plusieurs légions entrèrent en rébellion ouverte. Les plus excités des soldats offrirent même la pourpre à Germanicus, lui proposant de le mener à Rome afin de l'introniser. Germanicus refusa catégoriquement.

Cela ne refroidit pas les enthousiasmes ! Comme les légionnaires, de plus en plus insistants, de plus en plus nerveux, devenaient menaçants, Germanicus songea à mettre sa petite famille à l'abri en l'éloignant du camp. Les soldats comprirent alors qu'ils avaient été trop loin. Honteux de leur conduite, ils arrêtèrent la voiture qui emmenait Agrippine et ses enfants dans une ville voisine, et, mouillant leurs rudes cuirasses de larmes de repentir, demandèrent à leur commandant en chef "qu'il leur épargnât une telle marque de défiance". C'est sans doute à l'occasion de cette réconciliation entre le général et ses légions que, pour flatter l'armée encore échauffée, le petit Caius fut présenté sur le front des troupes, revêtu d'un habit militaire miniature, avec des godillots réglementaires à sa taille. Après avoir aussi résolument repoussé les offres tentatrices de ses soldats que les assauts des Germains, qui avaient tablé sur une vacance du pouvoir à la mort d'Auguste pour éprouver la résistance de l'Empire, Germanicus fut rappelé à Rome où Tibère lui accorda les honneurs du triomphe. Malheureusement sa popularité le mena à sa perte.

A Travers Le Temps. Tome 6. L'Âge de Rome.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant