Je fais l'amour à Anastasia avec une sorte de désespoir - et elle aussi. Je pense qu'elle veut me démontrer à quel point elle apprécie les efforts que j'ai faits pour elle, en la laissant me dessiner cette carte sur le corps. Quant à moi, je veux lui prouver combien il est important pour moi qu'elle m'accepte tel que je suis, complètement taré. Elle est merveilleuse. Elle est exceptionnelle. Je veux l'adorer à genoux. Je veux qu'elle sache que mon corps tout entier lui appartient désormais. Je suis à elle tout comme elle est à moi.
Je ne veux aucune barrière qui m'empêche de vénérer son corps. Je veux la sentir partout contre moi. Une fois que je l'ai débarrassée de son tee-shirt et de son soutien-gorge, je m'empresse de caresser ses seins avec vénération, de la bouche et des doigts, jusqu'à ce qu'elle gémisse sous moi. Je veux qu'elle réponde à mon toucher, qu'elle ressente exactement ce que j'éprouve.
Ça va être rapide. Ça va être violent et intense. Je glisse la main dans son jean et dans sa culotte, pour vérifier si elle est prête pour moi. Bon Dieu, elle est trempée ! Elle me désire, elle me désire vraiment, tout comme j'ai envie d'elle. C'est tout ce que j'ai besoin de savoir. Je sais enfin que tout va bien entre nous. Nous sommes ensemble.
Quand je la pénètre du doigt, elle réagit immédiatement en soulevant les hanches pour s'offrir davantage.
Je me rassois, je lui enlève son pantalon et sa culotte, puis je sors de ma poche un préservatif que je lui jette tout en enlevant mon jean et mon boxer. Je ne la quitte jamais des yeux, j'adore voir un désir intense briller dans ses prunelles. Nous sommes sur la même longueur d'onde. D'une main qui tremble, Ana déroule la capote sur toute la longueur de mon sexe. Puis je l'empoigne avant de rouler sur le dos, en l'installant au-dessus de moi.
- Toi dessus, dis-je les dents serrées. Je veux te voir.
Elle est à califourchon sur moi. Je la soulève pour l'empaler sur mon sexe douloureux. Je ferme les yeux tout en levant les hanches pour m'enfoncer plus profondément en elle. Je veux la posséder complètement. Bordel, que c'est bon ! Elle est brûlante. Elle est serrée. Elle est trempée tout autour de moi tandis que je la pénètre complètement. Nous sommes unis, joints, fusionnés comme si nous avions été créés l'un pour l'autre par le Tout-Puissant lui-même.
Mais les vieilles habitudes ont la vie dure - aussi je ne peux m'empêcher de lui tenir les mains. Nous avons pris un bon départ aujourd'hui, mais il va me falloir un certain temps pour abandonner ces réactions instinctives si profondément ancrées en moi. Un pas à la fois, a dit Flynn.
- C'est tellement bon d'être en toi, dis-je dans un murmure.
Elle ondule sur moi, de haut en bas, et je la regarde. C'est une vision érotique qu'elle m'utilise ainsi pour son plaisir. Le visage enflammé de passion, elle se mord la lèvre et gémit doucement. Mais j'en veux plus. Aussi je lui lâche les mains pour lui agripper les hanches. Elle se tient à mes bras pour s'équilibrer - c'est une zone autorisée. Je m'enfonce en elle, vraiment dur, vraiment profond, ce qui la fait crier.
Prends tout, baby. Tout est pour toi. Je suis tout à toi.
- C'est ça, baby, sens-moi.
Ana renverse la tête en arrière tandis que je continue à la marteler. Nous trouvons un rythme, ses mouvements sont accordés aux miens, et nous escaladons ensemble notre chemin vers le plaisir. C'est bon, c'est tellement bon de cette façon. J'adore surveiller les réactions d'Anastasia, son plaisir naturel et désinhibé. Nous sommes très proches à présent.
- Mon Ana.
Cet aveu s'est échappé de mes lèvres. Tu es à moi. Tu n'appartiens qu'à moi.
- Oui. Pour toujours, répond-elle.
Exactement. Pour toujours !
- Oh, baby.
Avec un gémissement rauque, je jouis tandis qu'Ana explose aussi dans un orgasme débridé. Ses cris de plaisir deviennent de plus en plus violents.
J'imagine que la nouvelle équipe de sécurité n'aura aucun doute sur nos activités. D'après mon expérience, ces gens-là ont une ouïe excellente. C'est utile dans leur boulot.
Nous retombons ensuite dans le lit, collés l'un à l'autre, en tentant de retrouver notre souffle. Elle est couchée sur ma poitrine, mais comme elle ne bouge pas, j'arrive à le tolérer. Dans cette position, je peux caresser les longs cheveux qui s'étalent dans son dos. J'aime beaucoup.
- Tu es si belle, dis-je avec sincérité.
Elle relève la tête et me jette un regard très sceptique. Elle ne me croit pas. Aussi, je me rassois et je la tiens très serrée, pour que nous soyons à nouveau nez à nez.
- Tu - es - belle, dis-je une seconde fois en martelant chaque mot.
- Et toi, tu es étonnamment gentil parfois, rétorque-t-elle en m'embrassant doucement.
Elle pense que je la complimente pour lui faire plaisir ? Bon sang, elle n'a vraiment rien compris. Il ne s'agit pas de fausse modestie : elle est sincère en se croyant banale. D'où lui vient un tel complexe d'infériorité, un tel manque de confiance en elle, alors qu'elle est si belle que je n'arrive pas à la quitter des yeux ? Elle m'hypnotise.
Je la soulève pour me retirer d'elle. Elle grimace - j'espère qu'elle n'a pas trop mal. J'espère que je ne suis pas trop brutal ou trop exigeant envers elle, mais je ne peux m'en empêcher, je la désire tellement, tout le temps. Et je sais qu'elle ressent la même chose.
- Tu ne te rends même pas compte à quel point tu es attirante, pas vrai ?
En la voyant s'empourprer d'embarras devant mon compliment, je l'embrasse doucement. Puis j'insiste :
- Tous ces garçons qui te courent après, ça ne te suffit pas comme preuve ?
- Des garçons ? Quels garçons ?
Bon sang, baby, est-ce que tu es aveugle ? Ils sont tous à baver derrière toi et tu ne les as même pas remarqués.
- Tu veux une liste ? Le photographe, il est fou de toi ; ce garçon dans le magasin de bricolage ; le frère aîné de ta colocataire. Ton patron.
Rien que penser à tous ces mecs qui la désirent me met en rage : je suis jaloux. Anastasia étant inconsciente de l'effet qu'elle a sur le sexe opposé, ça la rend vulnérable.
Elle ne comprend pas qu'ils bandent de tous en la regardant, qu'ils coucheraient avec elle au moindre encouragement. Elle ne sait pas comment fonctionne le crâne d'un mec. Mais moi, si. Moi, je sais exactement ce qu'ils pensent : ils veulent tous la baiser. Donc, il faut que je la protège.
Et puis, si la plupart des dangers sont actuellement hors de portée, il reste Jack Hyde - ce salopard passe huit heures par jour avec Anastasia, elle lui donner des ordres, à la faire obéir. Ça me déplaît.
- Oh, Christian, ce n'est pas vrai du tout.
- Crois-moi. Ils veulent coucher avec toi. Ils désirent ce qui est à moi.
Je ne le permettrai jamais, tu es à moi, je protège ce qui est à moi.
Je la serre contre moi tandis qu'elle passe les deux mains dans mes cheveux ; son expression me dit qu'elle est toujours sceptique
- Ce qui est à moi, dis-je encore, en resserrant mon étreinte autour d'elle.
- Oui, à toi, accepte-t-elle avec un sourire.
Elle est peut-être naïve, mais je suis certain de pouvoir lui faire une confiance totale. C'est un sentiment agréable. Je suis un harceleur : je l'espionne, je la surveille, aussi j'ai appris sans contestation possible qu'elle se montre toujours parfaitement franche envers moi. Je sais aussi qu'elle ne me tromperait jamais - ce n'est pas dans sa nature. Je dois simplement la protéger des autres enfoirés qui la guettent dans l'ombre, pour lui tomber dessus à la première occasion.
Mais si j'avais cru que laisser Anastasia me dessiner une carte sur le corps suffirait à rassasier sa curiosité insatiable et son besoin de me toucher, je me suis trompé.
- Les limites sont toujours intactes, déclare-t-elle. Je voudrais explorer.
Elle trace du doigt la ligne rouge sur mon épaule. Malgré moi, je réagis instantanément en me crispant.
- L'appartement ? Dis-je en espérant la distraire.
Tu rêves en couleur, Grey.
Tout à coup, je réalise une chose étrange : je n'ai jamais fait visiter à Ana tout mon appartement. Il faudra que je rectifie cet oubli prochainement.
Bien, il est évident qu'elle meure d'envie de me toucher. Est-ce que je peux le supporter ? Je le voudrais, je voudrais lui plaire... mais si je n'y arrive pas...?
- Et à quoi penses-tu précisément, Miss Steele ?
Je préfère être averti pour savoir à quoi m'attendre. Du bout des doigts, elle effleure doucement mon visage. J'adore ses caresses si douces, je les trouve apaisantes - du moins, à cet endroit.
- Je veux juste te toucher là où je peux, dit-elle.
Lorsque son doigt passe devant ma bouche, je l'attrape avec mes dents pour la mordre doucement, tout en réfléchissant à sa proposition. Suis-je ou non capable de faire ça pour elle ?
- Ouille ! Proteste Anastasia.
Je prends une profonde inspiration.
- D'accord.
Je peux le faire. Je relâche son doigt et me concentre pour me détendre et la laisser faire ce qu'elle veut. J'imagine que, quelque part, je devrais être heureux qu'elle veuille me connaître davantage, me caresser, me toucher. Avant d'aller plus loin, je veux me débarrasser du préservatif toujours collé à ma queue. Je me penche pour enlever ce truc répugnant et le laisser tomber sur le sol.
- Je déteste ces trucs. J'ai bien envie d'appeler le Dr Greene pour qu'elle vienne te faire une injection.
En fait, c'est juste pour vérifier ce qu'Anastasia va dire. J'ai déjà prévenu le bon docteur qui doit débarquer demain. J'annulerai si Ana pète un câble devant ma proposition
- Et tu crois que le meilleur gynéco-obstétricien de Seattle va accourir à ton appel ? Ironise-t- elle.
Oh oui, baby, pour des honoraires exorbitants et une nouvelle donation à son œuvre caritative, le Dr Greene est tout à fait prête à faire une autre visite à domicile.
- Je peux être très convaincant, dis-je doucement.
Vu qu'Anastasia semble accepter mon idée, je vais laisser le docteur venir demain. J'ai très envie d'oublier les préservatifs et de la voir pendre un traitement contraceptif permanent. Autant changer de sujet pendant qu'elle est de bonne humeur. Je lui caresse les cheveux.
- Franco a fait du beau travail, dis-je. J'aime ce dégradé.
- Cesse de changer de sujet ! Proteste-t-elle.
Ah, elle pense que je recule le moment où elle va me toucher... En fait, j'imagine qu'elle a raison. Je la déplace pour qu'elle soit à nouveau à califourchon sur moi, le dos appuyé contre mes genoux relevés. Quant à moi, je m'étends sur mes coudes et je me prépare au pire.
- Vas-y, touche !
Merde, je suis vraiment mal à l'aise. Et pourtant, il faut que je fasse un effort. Elle me regarde droit dans les yeux tandis qu'elle suit la ligne du rouge à lèvres sur mon ventre. Elle reste à l'intérieur des limites dessinées, mais je ne peux m'empêcher de grimacer en la voyant approcher des zones interdites.
Anastasia fronce les sourcils, soucieuse.
- On n'est pas obligés...
Elle est si tendre, si douce et si compatissante. Son attitude me rend plus déterminé encore à la laisser faire. J'essaie de lui expliquer ce que je ressens :
- Non, ça va. Ça demande quelques... ajustements de ma part. Ça fait longtemps qu'on ne m'a pas touché.
- Mrs Robinson ? Je hoche la tête.
- Je n'ai pas envie qu'on parle d'elle. Ça va gâcher ta bonne humeur.
- Je peux le supporter.
- Non, Ana. Tu vois rouge dès que je mentionne son nom. Mon passé est ce qu'il est. C'est un fait. Je ne peux pas le changer. Encore heureux que tu n'en aies pas, parce que ça me rendrait fou.
Et c'est la vérité. Qu'Anastasia ait été vierge explique sans doute pourquoi, dès le début, elle a été pour moi tellement différente de toutes celles qui l'ont précédée dans ma vie.
- Ça te rendrait fou ? Plus que tu ne l'es déjà ? Demande-t-elle avec un sourire.
- C'est de toi que je suis fou.
C'est presque un aveu de mon amour pour elle...
- Dois-je appeler le Dr Flynn ?
Non, baby, John sait déjà que je suis complètement taré.
Anastasia s'agite et m'incite à baisser les jambes. Puis elle pose à nouveau les mains sur mon estomac et, très doucement, les déplace sur ma peau. Je ne peux m'en empêcher : à nouveau, je me raidis.
- J'aime te toucher, murmure-t-elle.
Elle fait glisser ses doigts plus bas, sur mon nombril, puis encore plus bas... Vers une zone où son intérêt me convient tout à fait. Oh oui, ça me botte. Et plus encore.
Aussi, le reste de l'après-midi se passe de façon très satisfaisante. ***
En y réfléchissant sous la douche, je trouve que les choses ont bien avancé. Anastasia est désormais consciente de mes limites. Elle s'est montrée remarquablement conciliante et compréhensive dans sa façon de gérer mon haptophobie. J'espère que je pourrai maintenant me détendre avec elle. Je ne cesse de le découvrir, encore et encore : c'est une femme exceptionnelle.
Un peu plus tard, je vais dans mon bureau un moment. Quand je remonte chercher Ana, je sais qu'elle se prépare dans sa chambre pour le bal masqué. J'ouvre la porte sans frapper et je reçois un choc devant une vision qui, une fois encore, me rappelle à quel point j'ai de la chance.
Anastasia est belle à tomber.
- Je peux t'aider, Mr Grey ? Je suppose que tu viens pour une autre raison que me mater d'un air ahuri.
En fait, je voulais la surprendre avant qu'elle n'ait fini de s'habiller parce qu'il m'est venu une idée érotique quelque peu tordue - qui, je pense, aidera Ana à se détendre durant le gala. Je la trouve dans sa penderie, la main déjà tendue vers la robe en satin argent - qu'elle envisage sans doute de choisir pour ce soir. Elle ne porte que de la lingerie délicate et sensuelle, c'est le plus beau spectacle qu'un homme puisse souhaiter.
Je n'arrive pas à la quitter des yeux. Figé sur place, je peux jurer que mon cœur a raté un battement. Elle est magnifique. Tout simplement magnifique, sa mince silhouette mise en valeur à la perfection. Le corset noir qu'elle porte lui donne un décolleté époustouflant. En dessous, elle a une toute petite culotte en dentelle qui ne couvre que l'essentiel. Quant à ses longues jambes fines, elles sont gainées de bas de soie. Je ne peux détacher d'elle mon regard.
Avec beaucoup de mal, je finis par retrouver la capacité de parler.
- Je savoure le spectacle, merci, Miss Steele.
J'ai toujours su qu'elle serait superbe dans des habits haute couture, mais Anastasia dépasse tous mes espoirs. Machinalement, j'ajoute :
- Rappelle-moi d'envoyer un petit mot pour remercier Caroline Acton. (Je la vois me jeter un regard interloqué, déjà quelque peu jaloux, aussi je précise :) La vendeuse de chez Neiman's qui s'est occupée de tes achats.
Oui, Ms Acton a été remarquable. Elle a rempli à la perfection sa tâche. Je suis heureux de voir qu'Ana a choisi pour ce soir la robe longue en argent, c'est ma préférée - celle que je lui aurais conseillée si elle m'avait demandé mon avis. Elle est d'une coupe très simple, droite, classique. Et cette couleur argent met en valeur sa chevelure brune, sa peau de perle et ses grands yeux bleus.
Je ne peux m'empêcher d'avouer :
- J'ai la tête ailleurs.
Mais quel homme à ta place ne serait pas dans le même cas, Grey ? - Je vois ça. Que veux-tu, Christian ?
Avec son petit air pincé, elle agit comme si je la dérangeais dans ses préparatifs. Bien, j'ai quand même un petit cadeau à lui offrir, c'est pour ça que je suis venu. Je sors de ma poche les boules Ben Wah. Aussitôt, les yeux d'Anastasia s'écarquillent. Je la rassure, parce qu'il me semble que son expression démontre une légère appréhension.
- Ce n'est pas ce que tu crois.
- Éclaire ma lanterne, chuchote-t-elle.
- J'ai pensé que tu pourrais les porter ce soir.
Je la surveille tandis qu'elle analyse ma proposition - et ses conséquences.
- À cette soirée ?
Quand j'acquiesce, elle paraît choquée. Vraiment ? Est-ce bien la même femme qui a décidé de ne pas porter de culotte la première fois qu'elle est allée chez mes parents ?
- Tu me donneras une fessée plus tard ? Insiste Anastasia.
- Non. (En remarquant sa déception, je me mets à rire.) Tu voudrais que je le fasse ?
Je comprends bien qu'elle soit troublée. Elle en a envie et, en même temps, elle craint la douleur. Elle doit se souvenir de sa fessée érotique et du plaisir qu'elle en a retiré. En fait, elle ne sait plus ce qu'elle veut. Je lui précise quand même ma position :
- Rassure-toi, je ne te toucherai plus comme ça, même pas si tu m'en suppliais.
Il n'est pas question que je risque, une fois encore, de tout foutre en l'air. Je ne veux plus jamais ressentir un tel sentiment de perte. Aussi, Anastasia ne connaîtra aucune douleur, aucune punition. Uniquement du sexe vanille - épicé, d'accord, mais comme nous le savourons tous les deux. Je lui tends les boules pour la tenter, avant de dire :
- Alors, tu veux jouer ? Tu pourras toujours les enlever si c'est trop difficile à supporter.
Je sais très bien qu'elle les a adorées la première fois. C'est un avantage avec les boules à orgasme : elles fonctionnent même sans fessée. Elles sont simples, discrètes et efficaces. Le sex-toy parfait. Après quelques heures, Anastasia sera désespérée que je la baise... et je ne serai que trop heureux de la soulager. Bien sûr.
En fait, mon but est de la distraire pour l'empêcher de réfléchir aux problèmes que Leila nous pose. J'ai donné à l'équipe de surveillance des instructions très strictes pour rester discrète, et je ne veux pas qu'Anastasia s'inquiète inutilement. S'il y a le moindre problème durant la soirée, c'est Taylor, le directeur d'opération, ou moi, l'employeur, qui en seront notifiés - mais sûrement pas Anastasia. Je veux qu'elle remarque à peine les agents dispersés autour d'elle alors qu'ils veilleront sur elle de très près. Les boules argentées l'aideront certainement à penser à autre chose.
Je suis enchanté quand elle accepte, timidement, de les utiliser.
- Bravo. Viens ici, je vais te les mettre, une fois que tu auras enfilé tes chaussures.
Je meurs d'envie de voir ses longues jambes sensuelles dans des sandales Louboutin, surtout maintenant qu'elle a des bas de soie. Pour moi, il n'y a rien de mieux. J'adore les bas de soie, j'adore les hauts talons.
Je lui prends la main pour la stabiliser tandis qu'elle enfile ses chaussures. Bon Dieu, quelle est belle ! J'ai la sensation que ses jambes ont doublé de longueur. En temps normal, je suis beaucoup plus grand qu'elle, mais à présent Ana m'arrive presque à l'épaule.
Ses jambes sont superbes, minces, délicates et racées - et aussi sensuelles que je l'imaginais. Anastasia n'a, bien entendu, aucune idée de l'effet qu'elle a sur moi. Je bande comme un malade. D'ailleurs, j'ai commencé à la minute même où je suis rentré dans la chambre et que je l'ai vue.
Je la conduis près du lit, je veux l'admirer et y penser toute la soirée quand nous serons en public. Je tire un fauteuil que j'installe en face d'elle, puis je m'assois sur le lit avec elle debout devant moi.
- Quand je hocherai la tête, tu te penches en te tenant à la chaise. C'est compris ? J'ai un peu de mal à parler de façon cohérente.
- Oui.
- Bien. Maintenant, ouvre la bouche.
À mon avis, elle s'attend à ce que je lui enfourne les boules... au contraire, c'est mon index que je mets entre ses lèvres tout en lui ordonnant :
- Suce.
Elle obéit. Elle suce. Fort. Et je manque gémir. Mon imagination s'emballe tandis qu'elle utilise ses dons particuliers pour la fellation sur mon doigt. En même temps, je mets les boules dans ma bouche pour les humidifier et les réchauffer avant de les placer en elle. Quand j'essaie de retirer mon doigt Anastasia, cette petite démone, me mord. Je ne peux retenir un sourire malgré mon geste d'avertissement. Je suis toujours pris de court par tant d'audace et de vivacité. Bien sûr, j'adore aussi cet aspect de son caractère. Pour le moment, il faut que je place les boules avant de perdre la tête et de la baiser, ici et maintenant.
Je hoche la tête. Immédiatement, elle se penche en avant et s'agrippe aux accoudoirs du siège. J'ai devant moi un cul magnifique à peine couvert par une petite culotte de soie et de dentelles. Je l'écarte avec soin sur le côté et pénètre Anastasia d'un doigt, vérifiant si elle est prête à recevoir les boules. C'est le cas. C'est absolument le cas. Elle est trempée. Je ne peux m'empêcher de penser combien elle recevrait facilement ma queue au lieu de mon doigt... J'ai du mal à me contrôler, mais je sais que si je me maîtrise à présent, le sexe un peu plus tard sera encore meilleur, surtout après que les boules aient eu leur effet magique.
Aussi, je les place avec soin en place, une par une, bien au fond. Puis je rajuste la culotte d'Ana avant de placer un baiser d'adoration sur ces fesses splendides. Mmm, une peau si douce, un bombé si tentant... Je voudrais les mordre... Je voudrais les frapper... Je baisse les yeux sur les longues jambes gainées de soie que je caresse de la cheville à la hanche, avant d'embrasser la chair nue au sommet des cuisses d'Ana. D'une voix pleine d'admiration, je murmure :
- Tu as des jambes superbes, Miss Steele.
Ça m'enivre de penser que je suis le seul à savourer un tel spectacle. Personne ne saura ce qu'Anastasia porte sous sa robe longue ce soir. Cette créature merveilleuse m'appartient. Elle est à moi. Toute à moi. C'est une idée dont je ne me lasse pas.
Je me redresse, la prends par les hanches et la presse contre mon érection douloureuse.
- Peut-être que je te prendrai comme ça quand nous rentrerons, Anastasia. (Comme ça et de
toutes les façons dont tu me laisseras le faire.) Tu peux te relever maintenant.
Je me penche et lui embrasse l'épaule. J'ai un autre cadeau pour elle, que je sors de ma poche en
priant le ciel pour qu'elle l'accepte avec autant de bonne grâce que ma première offrande.
- Je les avais achetées pour que tu les portes au gala de samedi dernier. Mais tu m'as quitté... (Ma voix s'étrangle quand j'évoque cet enfer que j'ai dû traverser,) alors je n'ai pas eu l'occasion de te les donner.
Passant le bras devant elle, je lui tends l'écrin rouge qui contient les boucles d'oreilles de chez Cartier. Je me suis demandé un moment si je devais ou pas les lui donner... quelque part, ces pendants sont associés dans ma tête à la souffrance que j'ai endurée quand elle est partie.
Mais j'ai décidé que, si Anastasia les acceptait ce soir, ce serait un signe que nous avons réellement progressé. Ces pendants d'oreilles seraient alors le garant de ma seconde chance, de ce nouveau futur qu'elle m'offre. Aussi j'espère qu'elle les recevra sans faire de difficultés. Si elle repousse mon cadeau, ce sera de mauvais augure
- C'est ma seconde chance, dis-je nerveusement.
Anastasia prend la boîte et l'ouvre. Puis elle étouffe un cri en voyant les pendants en diamants. Ils sont simples, classiques et magnifiques. Quatre diamants de chaque côté - de la plus belle eau, bien entendu. Anastasia ne le réalise probablement pas, mais moi, je le sais. Pour ma compagne, je ne veux que le meilleur.
- Elles sont ravissantes chuchote-t-elle, pleine d'admiration. Je te remercie.
Elle les aime ? Oui, elle paraît vraiment les aimer, j'en suis enchanté - et rassuré. Les diamants de la seconde chance ont été acceptés de bonne grâce, Anastasia est heureuse, tout sourires. Moi aussi. C'est exactement ce qui doit arriver quand on offre à quelqu'un un cadeau : le plaisir est mutuel. À nouveau, j'embrasse son épaule avec une joie intense. J'ai eu raison de suivre mon instinct, de courir le risque de donner à Anastasia ces boucles d'oreilles, c'était ce qu'il fallait faire.
- Tu portes la robe en satin argent ? Dis-je à titre de vérification.
Je veux savoir lequel des trois masques préparés par Mia je dois lui donner ce soir. J'ai indiqué à ma sœur les coloris de chacune des robes longues d'Anastasia, au cas où elle n'aurait pas choisi celle que je préférais.
- Oui. Est-ce que ça va ?
- Bien sûr. Je te laisse te préparer.
Je préfère m'en aller, mon self-control commence à vaciller. Je ne jette pas un regard en arrière avant de m'enfuir jusque dans ma chambre pour m'habiller.
***
Je suis dans le vestibule, occupé à donner à l'équipe de sécurité quelques consignes de dernière minute. Je sais bien que les trois agents qui entourent Taylor sont parfaitement expérimentés, ils connaissent la routine. Ils sont tous armés, ce qui ne me plaît guère, mais Taylor y tient absolument. Il prétend qu'il lui est impossible de faire bien son travail dans le cas contraire. Effectivement, quand je pense à Leila, une femme armée, probablement animée d'intentions hostiles, déséquilibrée et obsédée, j'imagine qu'il a raison. D'ailleurs, Taylor ne se sépare jamais de son arme. C'est un des rares sujets sur lequel nous n'avons pas du tout le même point de vue.
J'ai accepté que Taylor m'enseigne les techniques de conduite pour éviter les filatures - en fait, ça m'a intéressé. J'ai par contre refusé d'apprendre à tirer. Les parents ont toujours milité contre les armes en vente libre aux États-Unis et je suis tout à fait d'accord avec eux. Le fait de posséder une arme accentue les risques d'un dérapage en cas de conflit, et les conséquences en sont bien plus graves. Mais Taylor et ses hommes sont des agents expérimentés, aussi ils ont l'habitude de gérer les situations tendues.
Ce soir, Taylor prend deux voitures blindées avec des pneus résistants et des réservoirs d'essence protégés anti-incendie. Bien entendu, les membres de l'équipe ont l'habitude des conduites d'évasion d'urgence.
Chaque homme porte une oreillette avec micro caché dans la manche pour communiquer entre eux avec efficacité et discrétion. Ce sont des appareils high-tech ; pour moi, ils ont l'avantage d'être invisibles. La plupart des gens, en particulier Anastasia et ma famille, ne seront pas au courant que ces hommes sont sur le qui-vive. J'ai averti mon père que j'avais augmenté ma sécurité personnelle, mais sans lui donner tous les détails, ainsi que Taylor me l'a recommandé.
Pendant que je parle, je réalise tout à coup l'attention des hommes se détourne de moi. Ils regardent tous par-dessus mon épaule quelque chose ou quelqu'un derrière moi... et tous sont la mâchoire béante.
Je me retourne : Anastasia, un peu anxieuse, attend à l'embrasure de la porte. Elle est magnifique. Les hommes reprennent vite une attitude plus professionnelle, cessant de dévisager avec des yeux écarquillés cette vision de beauté et de grâce. Je pense cependant qu'ils réalisent pourquoi je suis aussi protecteur envers elle. Elle paraît si jeune et si fragile tandis qu'elle se tient timidement au milieu de la pièce, dans son superbe fourreau d'argent. Il est évident qu'elle a besoin de protection.
Anastasia se détend dès que je lui souris, aussi je réalise que c'est mon approbation qu'elle attendait avec tant d'anxiété. Je dois me rappeler qu'elle a plus l'habitude des jeans et des converses que des diamants et des robes haute couture.
M'approchant d'elle, je me penche pour lui embrasser les cheveux. Elle a un parfum divin, comme d'habitude.
- Anastasia, tu es à couper le souffle.
Elle s'empourpre et jette un coup d'œil nerveux aux agents de sécurité. La plupart des femmes seraient heureuses d'être admirées et de se retrouver au centre de l'attention générale, mais ce n'est pas le cas d'Anastasia, qui est gênée et mal à l'aise.
Pour la détendre, je lui propose :
- Une coupe de Champagne avant de partir ?
De plus, ça donnera aux hommes le temps de préparer les voitures avant notre départ.
Anastasia accepte mon offre avec plaisir. J'adresse un signe de tête à Taylor. Ryan et Reynolds partiront les premiers afin de faire un tour de reconnaissance avant notre arrivée. Taylor nous conduira, Sawyer à ses côtés.
Anastasia se précipitant dans la cuisine, je la suis et sors du frigidaire une bouteille de Champagne. - C'est l'équipe de sécurité ? Demande-t-elle.
Elle paraît soulagée de ne plus être sous les projecteurs.
- De protection rapprochée. Ils sont sous la responsabilité de Taylor. Il est aussi formé à ça.
Je sais qu'Anastasia fait confiance à Taylor, aussi j'espère qu'elle sera rassurée de savoir que les hommes sont sous son commandement.
- Il est très polyvalent.
- En effet. (Mais j'estime que nous avons suffisamment parlé de lui.) Tu es ravissante, Anastasia. Santé !
J'aime qu'elle ait repoussé ses cheveux derrière ses oreilles pour exhiber ses pendants : les diamants renvoient des éclats de lumière chaque fois qu'elle tourne la tête. Je voudrais lui acheter davantage de diamants... si elle me laissait faire.
Elle me parait empourprée... Je me demande si les boules d'argent commencent à faire effet sur elle. Combien de temps sera-t-elle capable de tenir avant de réclamer de moi un soulagement ? Bon sang, rien que d'y penser, je bande encore.
- Comment te sens-tu ? Dis-je d'une voix rauque.
- Très bien, merci, répond-elle avec un sourire innocent.
Tu crois ça, Miss Steele ? Mais la soirée ne fait que commencer. Attends et tu verras...
- Tiens, tu vas en avoir besoin. Ouvre.
Je lui tends une poche de velours qui contient le masque d'argent que Mia lui a fait. Ma sœur est réellement douée pour ce genre de choses, ses productions sont éblouissantes.
Je remarque qu'Anastasia examine le masque avec un air éberlué, aussi je lui explique :
- C'est un bal masqué.
Taylor n'est pas du tout content. Pour lui, ça ne fait que compliquer la tâche de l'équipe. Comment repérer Leila si elle fait une apparition ? Je sais également qu'il déteste l'idée que la soirée se termine par un feu d'artifice parce que le bruit couvrirait celui d'un coup de feu. Il m'a plusieurs fois recommandé de partir avant les premiers pétards... je lui ai dit que j'en déciderai plus tard.
Je regarde ma montre. Ryan et Reynolds auront besoin d'un peu plus de temps pour leur reconnaissance, aussi je dois retarder notre départ. Je propose à Anastasia de visiter une pièce de mon appartement qu'elle ne connaît pas encore, ainsi que je l'ai réalisé tout à l'heure. Je suis certain qu'elle l'appréciera : après tout, elle adore les livres.
Je la conduis dans ma bibliothèque, située juste en dessous de ma salle de jeu. Ces derniers temps, j'ai rarement l'occasion de lire, et c'est bien dommage, parce que mes étagères contiennent une pleine collection de premières éditions. Anastasia sera la bienvenue si elle veut y piocher.
- Tu as une bibliothèque ! S'écrie-t-elle, tout excitée. Il y a aussi un billard dans la pièce.
- Oui, c'est la pièce des boules, comme l'appelle Elliot. L'appartement est assez grand. Je me suis rendu compte aujourd'hui, quand tu as parlé d'exploration, que je ne t'avais jamais fait visiter les lieux. Nous n'avons pas le temps maintenant, mais j'ai pensé te montrer cette pièce. Peut-être que je te défierai au billard dans un futur assez proche.
J'ai l'intention de te baiser sur la table de billard. En fait, j'ai l'intention de te baiser dans toutes les pièces de mon appartement, je trouve cette idée incroyablement bandante. Je vais passer des heures à rêver des endroits que nous n'avons pas encore baptisés, il n'y a certainement pas que ma pièce de jeu qui offre ici des opportunités intéressantes. Tu verras, Miss Steele, mon imagination peut se montrer très créative.
Anastasia m'adresse un sourire béat. Étrange, je l'aurais plutôt imaginée me dire qu'elle ne savait pas jouer - et dans ce cas, j'aurais proposé de lui apprendre. Cette idée m'enchante : je la vois déjà penchée en avant sur la table, son cul d'enfer se frottant à mon sexe. Au contraire, je lis dans ses yeux un plaisir malicieux, comme si elle avait d'autres idées qu'elle ne m'exprimait pas.
- Quoi ? Dis-je, étonné.
- Rien, répond-elle du tac au tac.
Elle cherche (en vain) à effacer de son visage son air victorieux. Merde, pense-t-elle réellement pouvoir me battre au billard ? Elle rêve ! Je manque éclater de rire à cette idée, mais je ne veux pas avoir l'air de me moquer d'elle.
- Eh bien, le Dr Flynn va peut-être découvrir tes secrets. Tu le rencontreras ce soir.
Je pense qu'il vaut mieux que je l'en avertisse. Après tout, John m'a menacé de voler Anastasia un moment au cours de la soirée. Il en a tellement entendu parler, il est naturel qu'il veuille rencontrer cette femme qui a une telle influence sur moi.
- Le charlatan hors de prix ?
Anastasia paraît tout à coup très nerveuse.
- En personne. Il meurt d'envie de te connaître.
J'ai un sourire... le bon docteur Flynn m'a lancé un défi pour la soirée, pas vrai ? Je me demande ce qu'il aura inventé.
***
Quand Anastasia et moi montons dans mon Audi Quattro, il y a Taylor au volant, et Sawyer à ses côtés. Assis sur la banquette arrière, je tiens la main d'Ana dans la mienne et lui caresse doucement les doigts. Elle se tortille, aussi je comprends que les boules de Ben Wah doivent déjà l'échauffer. Ana se mord la lèvre, puis elle croise les jambes. Cherche-t-elle à bloquer le mouvement des boules infernales en elle ?
Non, baby, ça ne marche pas comme ça. Les Chinois étaient de vrais pros.
Sans doute pour se changer les idées, Ana me demande :
- Où as-tu trouvé le rouge à lèvres ?
Je lui réponds par un muet « Taylor ». Je ne souhaite pas le dire à voix haute devant son collègue. Par certains côtés, Taylor est très pudique même s'il détesterait savoir que je lui attribue cette douteuse qualité. À cette idée, je ne retiens pas un sourire moqueur et Ana éclate de rire...
Pas longtemps ! Son rire a dû ranimer les boules, aussi elle s'interrompt très vite en retenant à peine un gémissement. Les lèvres arrondies sur un « Oh », elle écarquille les yeux. Je la contemple, le regard lourd de désir
- Détends-toi, dis-je. Si c'est trop difficile...
... je trouverai bien un moment pour te sauter chez mes parents. Évidemment, je ne peux l'exprimer à voix haute. J'embrasse encore les mains d'Ana, avant de sucer son petit doigt.
Grey, tu es sadique... oh, c'est vrai, tu le savais déjà !
Ana me jette un regard noir, puis elle ferme les yeux et cherche à se reprendre. Quand elle me regarde à nouveau, elle me sourit avec une telle chaleur que c'est à mon tour d'être mal à l'aise. Bon Dieu, cette attraction sexuelle entre nous est vraiment incroyable ! Mais au moins, elle est mutuelle...
Anastasia veut savoir comment va se passer la soirée. Je commence par répondre « le train-train habituel », mais elle me rappelle que ça n'a rien d'habituel pour elle. Merde ! Je ne cesse de l'oublier. Tous ces gens venus étaler leur argent ; cette vente aux enchères, la tombola, le dîner, les danses, j'en ai tellement vus... Pour moi, c'est souvent d'un ennui mortel. Mais ma mère sait comment organiser une soirée.
J'ai l'impression que le trajet s'est déroulé à toute vitesse, je n'ai vu qu'Anastasia à mes côtés, si belle, si sensuelle. Nous sommes pourtant arrivés devant la maison de mes parents. J'indique à Ana qu'il est temps de mettre nos masques. Le mien est noir, il correspond à ma sombre personnalité. Les yeux bleus d'Ana paraissent immenses, soulignés ainsi par son ravissant masque en filigrane argent. Je vois bien qu'elle est nerveuse, sans doute - comme elle vient de me le rappeler - parce qu'elle n'a jamais encore assisté à un gala de cette envergure.
- Tu es splendide, Anastasia, dis-je pour la rassurer avant que nous quittions la voiture.
J'ai promis à Taylor que je resterai autant que possible aux côtés d'Ana, ce qui rendra son travail plus facile. Pour moi, c'est loin d'être une épreuve : c'est le seul endroit où j'ai envie de me trouver ce soir. De plus, je suis le seul à vraiment connaître Leila, aussi j'ai davantage de chances de prévenir Taylor si elle s'approche de nous. Je suis également certain d'être capable de la gérer : Leila est une soumise innée et j'ai été son maître. C'est un lien à jamais gravé dans son cerveau : si je lui donne un ordre, elle obéira.
Je préfère ne pas avoir à tester ma théorie avec Anastasia dans les parages.
Après avoir été photographiés, nous suivons la horde des autres invités. Je prends mentalement note d'en réclamer un tirage pour ajouter à ma collection de nos photos « officielles ». Les rares clichés que j'ai de nous deux en public me sont très précieux : je l'ai réalisé durant notre rupture. Maintenant, avec ma seconde chance, j'ai la ferme intention d'en avoir le plus possible.
Chaque année, mes parents ne lésinent pas pour ce gala - après tout, c'est l'une des principales sources de revenus de « Unissons-nous ». Bien entendu, je verse ma quote-part malgré les souvenirs désagréables que provoquent les divers projets que finance la fondation. Ma mère, toujours sensible et compatissante, évite généralement d'évoquer devant moi le côté pratique. Elle sait cependant qu'elle peut compter sur mon soutien financier. C'est le moins que je puisse faire : user de mon immense fortune pour des dons aux œuvres caritatives de valeur.
Je remarque qu'Anastasia paraît songeuse... j'espère qu'elle ne ressasse pas le problème que nous pose Leila. Avec un sourire, je lui tends un verre de Champagne.
Je la conduis ensuite vers la pergola où jouent quelques musiciens. De nombreux invités y sont déjà agglutinés. C'est une autre promesse que j'ai faite à Taylor : rester le plus possible dans des zones confinées, afin que les agents puissent scruter la foule qui m'entoure.
Tout à coup, une force de la nature - c'est-à-dire ma petite sœur - se jette sur nous.
- Christian ! Hurle-t-elle.
Alors qu'un tourbillon de tulle rose s'agrippe à mon cou, je remarque que Taylor, à quelques mètres de moi, parle dans le micro de sa manche. Il rassure sans doute le reste de l'équipe, en les prévenant qu'il s'agit de ma sœur et non d'une menace potentielle. D'ailleurs, Mia, grande, avec une silhouette pulpeuse, ne ressemble pas à la description de Leila, petite et mince.
Elle m'a déjà lâché pour s'adresser à Anastasia
- Ana ! Oh, ma chérie, tu es splendide ! s'écrie-t-elle en serrant dans ses bras.
Je suis vraiment heureux que ma compagne, si timide, s'entende avec ma sœur. Manifestement, Mia a décidé de prendre Anastasia sous son aile. Sauf que... elle est très extravertie, aussi malgré son cœur d'or, elle peut se montrer... envahissante.
- Il faut absolument que je te présente mes amies, déclare Mia en entraînant Ana.
Je les suis du regard tandis qu'elles rejoignent quatre autres jeunes femmes. Malgré leur masque, je les reconnais toutes, y compris cette pisse-vinaigre de Lily. Je n'ai jamais compris pourquoi Mia supportait depuis l'école primaire cette garce envieuse. Mais c'est une des caractéristiques de ma sœur : elle est loyale envers ses ami(e)s. Quand je vois Lily s'en prendre à Anastasia, je décide qu'il est temps pour moi de libérer ma compagne.
Anastasia paraît très heureuse que je vienne à sa rescousse. Nous circulons parmi les gens les plus riches et les plus célèbres de Seattle. Je garde Ana à mes côtés, tout en scrutant la foule à la recherche de Leila. Je suis quasiment certain que, si elle s'en donne la peine, elle réussirait à se faufiler chez mes parents, malgré toutes les précautions de Welch et Taylor. J'espère qu'Anastasia ne réalise pas ma tension permanente, mais... non, je ne crois pas. Elle est trop occupée à regarder ce qui se passe autour d'elle. De plus, elle a déjà bu quelques verres de Champagne. Pour le moment ça va, mais je garde le compte de ce qu'elle ingurgite. Elle parait un peu perdue - toutes ces présentations et tous ces noms à retenir doivent lui faire tourner la tête... sans compter que les boules Ben Wah font leur effet.
Peut-être même ne pense-t-elle qu'au moment où je la baiserai ?
Tant mieux, baby. Ça viendra. Très vite !
Nous discutons actuellement avec Jonathan Eccles, qui dirige une importante chaîne télévisée de Seattle. Il est grotesque avec son masque de grizzly dont la fourrure jure avec son crâne chauve. Il demande à Ana dans quelle branche elle travaille.
- Dans l'édition, répond-elle avec un sourire timide. Chez Seattle Independant Publishing.
- Chez SIP ? J'ai entendu la rumeur d'un rachat forcé.
Merde ! Je cache ma contrariété. Comment Eccles en a-t-il déjà eu vent ? Je pensais avoir couvert mes arrières. Ce vieux renard à beau être chauve et ventripotent, il n'a rien perdu de son acuité, je me demande comment Anastasia va se sortir de cet interrogatoire...
- Je ne suis qu'une simple assistante, Mr Eccles, répond-elle d'un air innocent. Je ne saurais rien de ce genre de choses.
On lui donnerait le bon Dieu sans confession. Je la scrute, sans rien exprimer de mes pensées. Je suis surpris.
Ana... ainsi tu es capable de mentir...mais l'as-tu vraiment fait ? Le meilleur des mensonges, c'est dire la vérité, sans tout dévoiler.
Il est maintenant temps de prendre nos places. Je fais semblant de chercher où nous sommes assis, mais je le sais déjà : à la table centrale, avec toute ma famille. Bien entendu, Taylor et moi devions connaître à l'avance ce genre de détail, pour placer les agents aux meilleurs endroits possibles. Du coin de l'œil, je les vois tous les quatre prendre position. Ils sont aux aguets et ne cessent de scruter la foule en restant suffisamment discrets.
Le visage de ma mère s'éclaire lorsqu'elle voit Anastasia approcher à mon bras. Elle est très élégante ce soir, dans une robe longue en soie vert menthe. À cinquante ans, c'est une femme superbe, aussi belle à l'intérieur qu'à l'extérieur. Elle a le cœur pur. Je l'admire profondément. J'ai même pour elle une véritable vénération.
- Ana, quel plaisir de vous revoir ! Vous êtes superbe.
J'entends la sincérité dans sa voix et j'en suis fier. Ça m'étonne que l'opinion de ma mère sur la femme que j'ai choisie compte autant pour moi. Je suis un adulte. Il y a des années que je décide seul de ma vie, de mes choix, de mon futur... Je ne suis pas soumis à l'approbation de mes parents, merde !
Plus tôt dans la soirée, Anastasia m'a dit une phrase qui m'a troublé : « ta mère devait être très fière de toi ». Quelque part, c'est vrai. Mais c'est également un mensonge. Si ma mère savait la vérité, sur mes perversions, sur la noirceur qui m'habite...
Ouaip, elle ne serait plus si fière, pas vrai, Grey ? Quelle honte ! Tu n'as jamais été capable d'être le fils qu'elle mérite. Heureusement qu'elle a Elliot et Mia.
- Mère, dis-je en me baissant pour l'embrasser sur les deux joues.
Comme elle le fait souvent, elle proteste que je suis trop cérémonieux. Mais je ne peux être aussi naturel envers mes parents que le sont mon frère et ma sœur. Je ne l'ai jamais pu. Ce n'est pas dans ma nature.
Parce qu'Elliot et Mia méritent l'amour qu'ils reçoivent, pas toi. Tu as raison de rester à l'écart, tu évites de les contaminer par ton âme obscure. Tu es à ta place : hors du cercle magique.
Mais Anastasia sera peut-être ta passerelle pour pénétrer dans leur monde...
Bien entendu, mes grands-parents Trevelyan sont présents ce soir. Ils sont étonnamment en forme pour leur âge. Il y a un bout de temps que je ne les ai vus, mais je sais pertinemment qu'ils ont été prévenus de l'existence d'Anastasia. J'aurais sans doute dû avertir Ana, pour la préparer, mais c'est trop tard. À peine ai-je fait les présentations que ma grand-mère se précipite sur elle :
- Oh, s'écrie-t-elle, accrochée à la main d'Ana, il a enfin trouvé quelqu'un, c'est merveilleux ! Que vous êtes jolie ! Eh bien, j'espère que vous ferez de lui un honnête homme.
Anastasia a l'air très gênée. Bon Dieu ! Est-ce que toute ma famille considère miraculeux que j'aie enfin trouvé une compagne ? Je n'ai pas encore trente ans, bordel ! J'ai quand même été super occupé à bâtir un empire, non ? D'accord, Elliot change de fille chaque semaine, et alors ? Pas moi. Et je ne vois rien d'anormal à mon comportement. Et puis, ils n'ont aucune idée de ce que je fais de mon temps libre. Je pourrais très bien... euh, collectionner des timbres... qu'est-ce qu'ils en savent ?
C'est ça, Grey, pourquoi pas ? Un dominant philatéliste.
Maman s'interpose rapidement pour sauver Anastasia des griffes de ma grand-mère. Quand Ana lui jette un coup d'œil reconnaissant, ma mère lui adresse un sourire rassurant - la vraie mère poule ! Elle a déjà intégré Ana dans la famille, c'est évident.
Mon grand-père intervient alors, pour donner à Ana son opinion sur son épouse :
- Ne faites pas attention à cette vieille folle, ma chère. Elle croit que son âge l'autorise à dire toutes les âneries qui passent par son cerveau embrumé.
Mes grands-parents s'adorent, mais ils ne peuvent s'empêcher de se lancer des piques. J'y suis accoutumé, bien entendu, mais je me demande ce qu'Anastasia va en penser. Elle ne m'a jamais parlé de ses grands-parents, aussi je présume qu'ils sont tous décédés depuis longtemps. Je ne me souviens pas avoir lu quoi que ce soit à leur sujet sur dans son dossier, il faudra que je pose la question directement à Ana.
Heureusement, Mia allège l'atmosphère en attirant l'attention générale : elle nous présente son compagnon de ce soir. Je m'en étrangle à moitié. Comment ? Ma sœur aurait-elle un copain sans que j'en sois prévenu ? Et comment a-t-elle pu aussi vite... ? Elle est à peine revenue de Paris, bon sang ! D'où sort ce putain de Sean ? Tout en lui serrant la main, je l'examine avec suspicion. Il faudra que je vérifie plus tard qui est ce garçon. Il parait jeune, immature... un gamin. Peuh ! Je suis certain qu'il n'a pas la carrure de maîtriser Mia. Elle a dû l'inviter au dernier moment. Elle est souvent trop impulsive.
De vieux amis de mes parents, Lance et Janine Jefferson, complètent notre table. Je n'ai pas encore vu mon père. Anastasia est assise entre moi et mon grand-père, bien à l'abri. Nous sommes également cernés par les agents de ma sécurité, mais je ne le crois pas qu'Anastasia puisse les voir sans se retourner. Parfait. Elle n'aura donc pas lieu de s'inquiéter.
Je comprends enfin pourquoi mon père n'est pas avec nous quand il monte sur l'estrade. Son masque doré de Polichinelle ne lui accorde nullement l'anonymat. Il est très grand, avec des cheveux gris et une voix tonnante qu'on reconnaîtrait n'importe où. Lui et ma mère forment un couple superbe, ils sont mariés depuis plus de trente ans.
Il fait son discours habituel, en réclamant à chacun de mettre « la main à la poche » pour soutenir le travail fantastique de son équipe ; il rappelle aussi combien « Unissons-nous » leur est cher. Je sais bien que c'est à cause de moi... mes parents ont lancé cette fondation peu après mon adoption. Je sens peser sur moi le regard d'Ana, ce qui me rend nerveux. Je ne veux pas que mon passé intervienne entre nous, bordel ! D'un autre côté, Ana sait déjà tant de choses... c'est très libérateur pour moi de ne pas avoir à me cacher d'elle, même si je n'y suis pas encore accoutumé. Jusqu'ici, il n'y avait qu'avec Elena que...
Non, je ne veux pas penser à elle. Pas ici. Pas ce soir.
Mon père passe ensuite le micro au maître de cérémonie, puis il quitte l'estrade pour venir nous rejoindre.
- Quel plaisir de vous revoir, Ana, dit-il en l'embrassant sur les deux joues.
Il doit vraiment approuver ma compagne pour être aussi familier envers elle. S'il ne l'aimait pas, il ne s'en cacherait pas. Bien sûr, il resterait poli, mais il a une attitude glaciale envers ceux qui ne lui plaisent pas.
Embrasser Ana comme ça est aussi pour mon père une façon de l'accueillir dans le cercle familial. Quelque part, ça me fait chaud au cœur. Tout le monde est heureux de me voir avec elle.
Sauf Elena peut-être. Bien sûr, elle ne fait pas partie de ma famille, même si elle me connaît mieux que tous les autres. Je sais qu'elle désire m'aider, veiller sur moi, mais je suis heureux qu'elle ne soit pas là ce soir. Je n'ai pas besoin qu'elle complique les choses. Nous avons suffisamment à gérer pour le moment, à cause de mon ex-soumise vagabonde. Quand une vague de colère monte en moi, je la repousse. Leila est malade. Ce n'est pas vraiment de sa faute.
Maintenant, le gala est lancé. Très excitée, Mia se propose pour être chef de table. Ensuite, chacun doit sortir un billet et le signer de son nom, pour la tombola de fin du repas. Anastasia paraît affolée. Elle n'a pas dû penser à amener de l'argent.
Bien sûr, Grey, elle ignore le déroulement habituel d'une soirée caritative. Elles sont réservées aux gens très riches, et Anastasia n'a jamais eu d'argent à dépenser ainsi.
Ce n'est pas un problème. Ma famille sait qu'elle provient d'un milieu simple, aussi nul ne s'attend à la voir participer financièrement. Ana est avec moi : c'est naturellement à moi qu'il revient de payer pour elle.
- Tiens.
Je lui tends un billet de 100 $ et mon Montblanc pour qu'elle le signe de son nom. J'aime beaucoup ce stylo encre. Quand je signe un marché de plusieurs millions de dollars, je trouve que ça vaut le coup de le faire avec un stylo fiable. Je déteste les Bic bas de gamme qui crachotent au bas d'un contrat
Anastasia accepte mon billet et le signe.
- Je te rembourserai, promet-elle.
Sûrement pas, Miss Steele. Il n'en est pas question.
J'évite cependant d'en faire le commentaire à voix haute. Je ne veux pas que nous nous disputions en public. Si Ana m'en reparle une fois de retour à la maison, je lui exprimerai clairement ma position : il n'est pas question que j'accepte d'elle un cent. Je pensais que nous avions dépassé ce stade quand elle a reçu de bonne grâce mes boucles d'oreilles - apparemment, ce n'est pas le cas.
Je la vois regarder d'un œil inquiet l'alignement des verres et des couverts devant elle. Elle doit craindre de les utiliser mal à propos. Elle n'a pas à s'inquiéter, je la conseillerai si besoin est au cours du service. Quelque part, ça me plaît d'être son mentor. Ce n'est pas tout à fait la même chose qu'être son maître, mais quand même...
Je surveillerai aussi ce qu'elle boira. Je ne veux pas qu'elle abuse. Elle a déjà pris suffisamment de Champagne pour se détendre.
Les pans du chapiteau ont été relevés sur l'arrière. Nous admirons le superbe coucher de soleil sur Seattle et la baie Meydenbauer. J'aimerais bien, un jour, vivre au bord de l'eau. Souvent, cette pensée me vient quand je sors en bateau et que j'examine de loin les propriétés si exclusives, si bien protégées.
Depuis quelques temps, j'ai une équipe qui surveille les maisons disponibles à la vente. Plus elles sont bien placées, plus elles partent vite, aussi il faut que je sois décidé à l'avance pour un éventuel achat. D'ailleurs, ce n'est pas la maison qui m'intéresse, mais l'emplacement. On peut toujours abattre une bâtisse, l'aménager, la reconstruire... surtout avec un frère dans le bâtiment, spécialisé dans ce genre de projet.
En voyant Anastasia admirer la vue, je me demande si elle aimerait vivre dans un tel contexte et quel genre de demeure lui plairait... il n'est pas question qu'elle partage éternellement l'appartement de Katherine. Déjà, va-t-elle accepter de rester chez moi ? J'espère qu'elle s'y sentira bien.
Mon appartement de l'Escala convient parfaitement à mes goûts et à mon mode de vie, mais peut- être qu'Anastasia le trouve trop masculin, trop fonctionnel. C'est pour cette raison que je lui ai montré ce soir la « salle des boules » - ou la bibliothèque comme elle l'a très justement nommée. J'utilise rarement cette pièce, mais j'ai pensé qu'Ana l'aimerait. Peut-être pourrais-je y installer un bureau pour elle... elle y serait tranquille.
Attends une minute, Grey... je croyais que cet arrangement n'était que temporaire, jusqu'à ce que Leila soit retrouvée ?
- Tu as envie ? Dis-je à mi-voix.
Elle sait très bien que je ne parle pas de son appétit pour la nourriture. Les boules argentées sont en place depuis un bon moment déjà. Ana doit en ressentir les effets. J'espère qu'elle a envie d'une partie très spécifique de mon anatomie.
- Très, chuchote-t-elle en réponse.
Elle n'hésite pas à me regarder bien en face. Merde ! Je bande déjà. Les boules d'argent font leur effet, mais pour nous deux. Il nous est impossible de nous esquiver pour le moment, aussi nous devons garder notre désir mutuel sous pression un peu plus longtemps.
Mon grand-père s'adresse ensuite à Anastasia et bavarde gaiement avec elle. C'est un vieux monsieur adorable, je suis heureux de voir qu'Ana se détend avec lui. Elle écoute ses anecdotes avec un intérêt sincère et non une simple politesse. Mon grand-père le réalise et lui sourit avec affection.
Bien entendu, Mia parle beaucoup, avec animation. Son compagnon de ce soir, Sean, ne tient pas la distance : il est effacé, quasiment muet. Il est difficile pour un homme de rivaliser avec ma sœur.
Ma grand-mère refuse qu'on l'oublie. Je pourrais jurer qu'à chaque année qui passe, elle devient de plus en plus caustique. Elle balance quelques vannes pas trop gentilles à mon grand-père. J'imagine qu'il y est habitué : la plupart du temps, il lui répond sur le même ton.
J'ai alors une discussion intéressante avec Lance Jefferson. C'est un brillant homme d'affaires, mais il s'intéresse beaucoup trop à son image. Il ne comprend pas ma décision de renoncer à certains brevets concernant une toute dernière technologie que GEH développe afin de produire des téléphones portables auto-mécaniques. D'après lui, je risque de perdre énormément d'argent.
Ne connait-il pas Ernst Friedrich Schumacher ? En 1973, après le premier choc pétrolier et la reprise de la mondialisation, cet économiste britannique a publié une série d'essais passionnants21 qui critique l'économie occidentale. Le grand public a fini par comprendre que les États-Unis devaient changer d'optique. Le monde occidental, bien à l'abri dans sa petite bulle s'est trop longtemps cru exonéré des crises mondiales. Mais les masses deviennent dangereuses quand elles sont désespérées. Il me parait évident que c'est notre rôle de les aider à atteindre eux aussi un niveau de vie décent.
- Il faut lutter contre notre illusion, nourrie par les réussites scientifiques et les techniques modernes étonnantes, de posséder un pouvoir illimité. Aucun problème de production n'est gérable sans distinguer revenu et capital. Chaque économiste et homme d'affaires le fait, bien entendu, dans sa profession. Alors, pourquoi ne pas l'appliquer ailleurs ? L'homme n'a pas créé la nature. Il l'a simplement trouvée et ne peut rien faire sans elle.
D'après Schumacher : « il faut traiter la nature comme un capital et non comme un revenu ». Je m'emballe un peu sur ce sujet qui me passionne.
Manifestement, Lance ne comprend pas du tout ma philosophie. Pour moi, un des avantages d'être très riche est de pouvoir améliorer la vie des moins favorisés. Certains me croient philanthrope, mais c'est faux. Je n'ai rien d'un homme charitable. Je suis parfaitement heureux de faire un profit substantiel en achetant mes sociétés, en les modifiant, en les revendant avec bénéfice. En chemin, je fournis des emplois. C'est ma façon d'équilibrer et de justifier un mode de vie dont la plupart des gens rêvent sans jamais l'obtenir. Je crois en ma liberté totale de dépenser mon argent à ma guise, et je regarde cette distribution de ma fortune comme une dépense qui me plaît. Mon bateau, par exemple, n'est pas uniquement un luxe frivole : le construire a fait travailler mon chantier naval - et offert un salaire à ses employés. De plus, la voile me permet de faire baisser ma pression, mon stress, et d'être plus efficace. Je suis gagnant des deux côtés. Même économiquement, c'est rentable, parce que je teste en personne toutes les améliorations de mes concepteurs.
Je n'ai jamais oublié ce qu'était la faim et le manque de soins. À mon avis, il est de mon devoir et de ma responsabilité de financer largement les œuvres caritatives qui le méritent - par exemple celle de ce soir, mais aussi d'autres projets intéressants qu'on me demande de soutenir. Simplement, ça ne m'intéresse pas de voir ma gueule dans les journaux. Je ne recherche aucune publicité. Elle n'a rien à voir avec mes motivations. Je me tape de l'avis des autres...
Bien sûr, ces galas sont souvent perçus comme des opportunités de rencontres utiles, permettant de futurs marchés rentables. Je n'ai aucune objection à étendre mon réseau de connaissances, du moins tant qu'on n'en abuse pas.
Ce soir, je trie les gens qui m'intéressent : ceux avec lesquels je ferai éventuellement des affaires, et je les présente à Anastasia. Je sais bien que la plupart des invités sont curieux au sujet de la femme accrochée à mon bras. Je ne vois aucun mal à doucher la rumeur qui me donnait pour gay. Je me fous complètement que les gens soient homo, hétéro, bi... Pour moi, ce n'est pas ce qui les définit. D'ailleurs, comment pourrais-je les juger ? Mais vu que je suis hétérosexuel, sans contestation possible, je préfère être référencé sous ce titre. Et j'ai désormais une ravissante compagne que je veux présenter au monde entier.
Je ne m'intéresse pas du tout aux obséquieux thuriféraires qui m'approchent dans un intérêt personnel. Je suis poli, vu que je suis chez mes parents, mais glacial. Je ne peux les encadrer. Une de leur technique préférée, c'est de se vanter d'une connaissance quelconque et de me regarder comme si je devais être impressionné. Ce n'est pas le cas. Je me fous complètement qu'ils aient été Harvard avec X ou Y, ce n'est pas pour autant que je compte les financer. Je ne perds pas de temps avec ces gens-là. Je ne les présente pas à Anastasia.
Le repas est délicieux. Je suis heureux de voir qu'Anastasia mange avec appétit. Elle se montre moins difficile sur le sujet ces derniers temps, aussi j'espère sincèrement qu'elle ne tardera pas à récupérer les kilos qu'elle a perdus quand nous avons rompu.
Une fois le dessert servi, la tombola est tirée sur chaque table. C'est l'invité de Mia qui gagne l'enveloppe. À mon avis, c'est la seule chose que Sean Machin retirera de sa soirée. Je ne pense pas que Mia lui porte le moindre intérêt.
À mes côtés, Anastasia s'agite de plus en plus. Quand elle prend le prétexte d'aller aux toilettes, j'oublie absolument tout le reste. Enfin ! Voilà ma chance de profiter de l'effet des boules à orgasme.
- Je vais t'accompagner, dis-je immédiatement.
J'ai déjà prévu où j'allais l'emmener pour un petit intermède sexuel.
Dès qu'Ana se lève, tous les hommes de la table le font également, par politesse. Merde ! Difficile d'être discrets. Je m'en fiche, personne ne verra rien d'anormal au fait que je guide Anastasia dans les méandres d'une demeure qu'elle connaît encore très peu. C'est alors que ma petite sœur intervient.
- Non, Christian ! C'est moi qui accompagne Ana ! Décide Mia avec autorité.
Qu'est-ce qui lui prend? Aurait-elle une sorte de radar anti-baise qui se déclenche pour interrompre mes plans de coucher sans délai avec Anastasia ?
Nous sommes à table en compagnie de mes parents et de mes grands-parents : il m'est difficile d'insister ouvertement. J'ai beau être désespéré et savoir qu'Anastasia l'est aussi, je me vois contraint d'accepter la défaite sans rien en montrer. Que puis-je faire d'autre ?
Anastasia, entraînée par Mia, me jette un regard horrifié. Taylor et Sawyer la suivent à bonne distance. Quel dommage ! C'est vraiment frustrant ! J'espère vraiment avoir une autre occasion dans un futur très proche.
Quand Anastasia revient, je devine qu'elle a enlevé les boules parce que son sac est plus gonflé. C'est déjà la mise aux enchères. Je lui passe la liste des lots proposés, qu'elle étudie avec intérêt
- Tu as une propriété à Aspen ? S'étonne-t-elle.
À l'entendre, on dirait que j'ai commis une sorte de crime. Pourquoi réagit-elle avec tant de hargne ? Les gens nous regardent. Il m'est impossible de lui parler dans de telles circonstances, aussi je l'incite à se taire d'un geste impératif.
- Tu as d'autres propriétés ailleurs ? Insiste-t-elle dans un chuchotement furieux.
Je hoche la tête... une fois encore, je lui indique que ce n'est pas le bon moment pour une telle discussion. Je n'apprécie pas du tout le ton qu'elle a employé envers moi, surtout en public. Aurait- elle trop bu ? Ou bien est-ce l'effet de la frustration sexuelle ?
- Je t'en parlerai plus tard, dis-je sèchement.
D'ailleurs, je n'ai pas réellement la tête à la vente aux enchères, pas plus qu'à mes diverses propriétés. Je suis toujours en train de ruminer ma contrariété pour cette occasion manquée. Anastasia n'est pas la seule à être frustrée. Ma sœur est vraiment pénible parfois !
- Je voulais aller avec toi, dis-je, pas tellement aimable.
Je n'aime pas voir mes plans contrariés. Je n'en ai pas l'habitude. Et puis, quelque part, j'en veux à Anastasia - de façon très injuste et presque puérile. Elle aurait dû attendre un meilleur moment pour se lever et aller aux toilettes. Si elle avait davantage réfléchi, nous ne serions pas tous les deux aussi mal à l'aise.
Elle a détourné les yeux. Je la vois scruter la salle. Merde ! Qui cherche-t-elle ? Aurait-elle fini par réaliser qu'elle était surveillée de près...
Il nous est impossible de parler ou de faire des projets tant que les enchères sont en cours, sous le regard des nombreux invités. Nous devons rester assis. Vient enfin le lot que j'ai proposé : une semaine dans ma propriété à Aspen. J'écoute d'une oreille, sans réellement y prêter attention. Les enchères sont déjà à 20 000 $... Ce n'est pas mal.
Et tout à coup, mon cœur s'arrête, parce qu'une voix que je ne connais que trop bien crie juste à mes côtés :
- Vingt-quatre mille dollars !
C'est Anastasia. Tout le monde à notre table se retourne pour la dévisager, sidéré, sachant bien qu'elle ne possède pas tant d'argent à dépenser.
Moi, bien entendu, je sais ce qu'elle fait. C'est ce putain de chèque pour cette saloperie de ferraille qu'elle appelait une voiture. Elle n'a jamais voulu de mon virement. Elle pense encore pouvoir me défier alors que je lui ai exprimé clairement mes vœux à ce sujet ? Elle ose me jeter un tel gant en public ? Je suis tellement furieux qu'il me faut réellement faire un effort pour que ça ne se voie pas. Comment ose-t-elle ? Je veux - non, j'exige ! - qu'elle garde mon argent.
Elle l'a gardé et offert à une œuvre caritative, juste pour te prouver sa position, Grey. Et alors ? Tu préférerais qu'elle l'ait dépensé pour des babioles inutiles ?
- Vingt-quatre mille dollars à la charmante dame en robe argentée, crie le commissaire-priseur. Une fois, deux fois. Adjugé !
Des visions d'Ana, le cul nu et rougi par les coups, me passent devant les yeux. Je sens la rage irradier de moi en vagues brûlantes.
Miss Steele, ça va être chaud pour toi.
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50 nuances de Grey version Christian. Tome 2 Passion
RomanceLa rencontre de Christian Grey, richissime homme d’affaires aux goûts extrêmes, avec Anastasia Steele, étudiante désargentée, l’a précipité dans une relation inhabituelle qui a irrémédiablement modifié son mode de vie. Quand Anastasia le q...