My boyfriend

Coeur lourd

Sourcils froncés, je dévisage le blond aux cheveux court et au regard bleu qui se tient sur le seuil. La chose qui me saute aux yeux, c'est qu'il est vêtu de rien d'autre que d'une chemise appartenant à Ren. Serrant les lanières du sac contenant la nourriture, j'essaie de ne pas tirer de conclusion hâtive. Cela a tendance à être une habitude, mon entourage me le reproche souvent. J'esquisse un sourire poli, qu'il me rend aussitôt.

-Bonsoir, Ren kun est-il là ?

- Bonsoir, es-tu l'un de ses amis ? Entre, il est sous la douche. Me tutoie-t-il.

Nous devons avoir à peu près le même âge. J'entre à sa suite et ferme derrière moi, la tête pleine de questions. Ça se sent qu'il a l'habitude d'être ici, vu l'aisance qu'il dégage. J'ai l'impression de déranger et ce sentiment se renforce en apercevant la table dressée pour deux au salon. Il y a tout ce qu'il faudrait pour un dîner en amoureux. À peu près la soirée que j'avais prévu.

- Prends place s'il te plaît, il ne devrait plus tarder. Je t'offre quelque chose à boire ou à manger ? Ren vient de commander assez de nourriture pour toute une tribune. Plaisante-t-il.

- Vous ... Vous deux ... ?

J'hésite à connaître la réponse. Je me prends surement la tête pour rien, ils sont peut-être de la même famille ou juste de bons amis ?

- Hum, disons que nous sommes "amis avec avantages". Répond-il en esquissant un sourire espiègle. Désolé, j'ai hormis de me présenter. Moi c'est Shota Matsuda, enchanté et toi ?

Ami ... avec avantage ?

- Ha ... Haneul Suzuki, mais, appelez-moi Han. Vous vous fréquentez depuis longtemps ? C'est la première fois que je vous rencontre.

- Sept mois. Je ne sais pas si on peut considérer notre relation comme officielle maintenant. Et vous ?

- Moi ?! Fais-je, bêtement. L'esprit bloqué sur "relation officielle".

J'hésite une nouvelle fois quant à la réponse à donner. Pourquoi est-ce moi qui me sens coupable ?

- Oui, vous êtes amis depuis longtemps ?

- Amis ? Je répète, un goût amer en bouche.

L'impression d'avoir reçu un coup de poignard, me tord l'estomac. J'avoue qu'il avait un malaise entre nous depuis cet incident. Cependant, je pensais que l'on pouvait réussir à passer outre et que notre couple en ressortirait souder, mais je suis le seul à avoir cru cela. C'était censé être nos 1ans, je n'arrive pas à croire ce qui se passe. Est-ce une blague ?

- Mon ange, pourrait tu m'apporter une serviette s'il te plaît !? Hurle celui qui est censé être "mon" petit ami, depuis la salle de bain.

- Oui, j'arrive bébé. Excuse-moi un instant.

Mon ange ?!

Bébé ?!

Mon sang se glace dans mes veines. Avant que Shota ne s'en aille, je l'arrête. Il ne m'a jamais appelé autrement que par mon prénom et cela est aussi vrai pour la réciprocité. Ce constat me pousse à remettre en question notre relation. J'ignore comment réagir face à ces signes évidents. Notre histoire manque-t-elle vraiment de quelque chose ? Ou est-ce moi le problème ?

- En fait ... Je dois y aller.

Tout est confus dans mon esprit, mais la seule chose dont je suis certain à cet instant, c'est que je ne veux pas faire face à Ren. Mon cerveau a dû mal à assimiler ce flux d'information. Mes yeux picotent, je serre les dents, il est hors de question de me donner en spectacle.

- Déjà ?! Peux-tu attendre encore un peu ? Il a déjà fini.

- Pas la peine. Je vous ai assez dérangé ... Tenez.

Je lui donne le sac contenant la nourriture. Surpris, il tend la main pour le récupérer. J'ai beau être blessé et en colère, je n'arrive pas à lui en vouloir. Cela se voit que c'est une bonne personne ou c'est peut-être moi qui suis idiot. Il ne doit pas avoir la moindre idée du genre de connard avec qui il s'envoie en l'air. La bonne blague, c'est moi le cocu et je trouve encore le moyen de plaindre son amant.

- Souhaites tu lui laisser un message ?

- Dites-lui juste que Han est passé et ... Non c'est tout. Je me rétracte.

- Euh ... D'accord ?!

- Merci, passez une bonne soirée.

- Pareil à vous.

Une fois dehors, j'inspire profondément et ferme brièvement les yeux. J'envoie un message à mes meilleurs amis via notre groupe commun, pour les informer de mon arrivé. A l'instant où j'arrête un taxi, l'on m'interpelle. Reconnaissant la voix de mon soi-disant petit ami, je m'engouffre dans le taxi sans un regard en arrière.

- Démarrez s'il vous plaît.

Le chauffeur s'exécute aussitôt. J'ai juste le temps de voir Ren donner un coup de poing dans le vide. Me redressant, je laisse ma tête aller contre le dossier du siège. Je préfère ne pas rentrer directement chez moi, il pourrait s'y rendre. J'éteins mon téléphone portable et m'efforce à ne pas penser à ce qui vient de se produire. Ainsi, j'oublierais peut-être la sensation de mon cœur se brisant en morceaux.

Une ... deux ... trois gouttes, mes larmes coulent le long de mes joues. Couvrant mon visage des mains, j'éclate en sanglot.