IX.Peins moi en rouge

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Cela faisait une bonne demi-heure qu'Olivier et son compagnon avaient déserté les lieux, laissant James et Blanche confronter leurs démons. Juste après s'être complètement vidée dans les toilettes -lui semblant mouvantes- du bar, elle avait pris soin de se rincer la bouche pour ne laisser aucune trace. Pourtant, le goût métallique du sang qui lui coulait du nez persistait, rendant l'ambiance de la fin de soirée plus sombre, prête à dégainer sa salive ensanglantée sur le visage de James au moindre faux pas.

Toutes ses petites voix dans la tête lui suppliant de tout gâcher avant que quelqu'un ne le fasse à sa place, une autre fille ou lui-même. James avait profité de sa position de nouvelle recrue, lui faisant croire qu'elle était spéciale, qu'elle transformait l'ascenseur en une pièce sans aucune issue, réduisant la possibilité de reprendre son souffle à néant, lui faisant croire que le regard de la brune l'emmenait en constante chute libre. Ses amis n'appréciaient pas le ténébreux, ils étaient là pour rendre la situation rationnelle, lui ouvrir les yeux, la seule chute libre possible dans ce foutu ascenseur serait seulement causé par un détachement des câbles, pas à cause de son regard, ses lèvres ou sa tenue du jour.  Ce soir, elle couperait les câbles.

Mais pas tout de suite, Blanche voulait jouer, le bar n'était qu'à huit-cent mètres de chez elle. Si les choses n'allaient plus dans son sens elle pourrait simplement marcher dix minutes et s'enfoncer dans ses draps réchauffés par le gros corps de Carlos.

" Ce matin, pourquoi est-ce tu m'as répondu par une question?" "Tu dors souvent avec tes collègues féminine?"  "Ça m'est déjà arrivé, oui. Mais je ne comprends pas très bien ce que ça change."  Toutes les paroles échangées avec son collègue quelques jours plus tôt ont décidé d'établir leur campement dans son esprit, elle les utilisait comme carburant pour maintenir le jeu malsain qu'elle avait en tête. Chaque mot prononcé par son collègue était aspiré par notre protagoniste, ils étaient répétés, amplifiés et jetés dans les flammes qui composaient l'intérieur de son être. Son haleine métallique n'aidait pas Blanche à se calmer, au contraire, elle imageait le sang qui lui coulait dans l'arrière de la gorge comme une conséquence à tous les évènement de la vie qu'elle ne voulait pas vivre, subir. Son ras-le-bol de la vie avait un goût et une couleur; il était salé, métallique, rouge mais sombre, dépourvu d'oxygène. 

"Blanche? Blanche tout va bien?" la voix de James résonnait dans la tête de Blanche, elle était lointaine et atténuée par la musique, lui donnant l'impression d'être sous l'eau, les poumons complètement submergés.

Elle se ressaisit, clignant des yeux plusieurs fois, rendant sa vue sur James de plus en plus clair à chaque battement de cils, il était devant elle, Olivier était parti depuis un moment. Maintenant Blanche, maintenant.

Elle s'avança passa sa main sur la nuque de James, elle le sentait se crisper, elle sourit et continua son chemin dans les cheveux de son collègue, elle les empoigna et rapprocha son visage à quelques centimètres du sien. James s'apprêta à parler lorsqu'elle s'empara de ses lèvres, elle ne voulait rien entendre, fatiguée des remarques, des réponses et des conseils. Blanche n'avait qu'un souhait, ne plus devoir réfléchir, laisser son corps savourer l'instant présent et laisser son cerveau gérer les ennuis qu'elle aura plus tard, bien plus tard. Soudain, elle sentit perdre le contrôle; James prit son visage entre ses mains, plaqua sa collègue contre le mur le plus proche et fit de sa bouche son sanctuaire. Il explora chaque centimètre de sa bouche avec sa langue, reprit la valse interrompue quelques jours plus tôt, le corps de Blanche se liquéfia sur place. Son coeur battait beaucoup trop fort pour elle, sa respiration saccadée entre chaque pause que lui offrait son partenaire, elle sentait les gouttes de sueurs lui couler le long de la tempe. Elle perdait pieds, elle avait initié ce jeu malsain mais elle était entrain de le perdre. Putain, putain, PUTAIN. 

Passer le capOù les histoires vivent. Découvrez maintenant