XVII. Identité prescrite

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La respiration complètement retenue, la situation se mit à changer. Un pistolet sous la tempe, sous la menace de ne plus laisser son cœur battre. Sauf que, c'était évident, son cœur allait battre. Animée de contractions rythmiques régulières, jouant le rôle de pompes tandis que ses poumons jouaient le rôle d'un puit. A la recherche désespérée d'air, ses organes ne reçurent que l'eau chlorée en réponse. Il ne lui faudrait plus beaucoup de temps avant de lâcher prise, laisser la fraicheur s'installer en son sein et se retrouver morte. Une histoire de minutes avant que son corps ne remonte à la surface, flottant comme un banc d'algue, rien de plus que de la chair et des os prêts à se décomposer dans les courants artificiels. Pourtant, il n'a jamais été question de partir, au contraire, il fallait rester et tout vivre à nouveau. L'eau de la piscine pourrait-elle endommagé ses poumons, assez que pour lui en greffer de nouveaux? Blanche allait-elle reprendre un souffle aussi intense que celui lors de sa mise au monde?

"Bon t'as gagné, je suis pas doué aux concours d'apnée." Angelo croisa les bras contre son torse, encore essoufflé du défi que les deux amis s'étaient lancé.

Blanche lança un sourire traduisant de sa fierté envers sa propre personne, comme réponse. Elle se laissa basculé en arrière tout en battant des jambes pour prendre de la distance avec le rebord, éclaboussant son ami par la même occasion. Une fois bien au centre du bassin et sur le dos, la brune ferma les yeux et se concentra sur le bruit du mouvement de l'eau proche de ses oreilles. Le silence, ne perdura pas très longtemps puisqu'Angelo finit par la rejoindre.

"C'est super chouette que t'ai pris congé aujourd'hui et super bonne idée la piscine. On devrait vraiment en profiter avant que les gosses commencent à envahir les bassins. Il y aura de la pisse partout."

"Qui me dit que tu n'as pas déjà fait pipi?"

Les sourcils épais d'Angelo se rejoignirent comme conséquence de son mécontentement, il tira sur le bras de Blanche qui dût alors abandonner sa position de sirène sur le dos.

"Arrête avec ça, tu sais bien que ça me dégoûte. Pourquoi tu n'as pas proposé aux autres de venir?"

"Angelo, on est en plein milieu de la semaine et en plein milieu de la journée; les gens travaillent. Et pour être honnête, je suis ici en partie pour le travail aussi. Et j'ai jugé que tu étais la personne parfaite pour m'aider à avancer dans mon projet. Et c'est plus marrant de faire ça à la piscine plutôt qu'autour d'un café. Si tu veux pas m'aider, je peux juste te noyer."

Les boucles noires d'Angelo s'étaient complètement aplaties sous le poids de l'eau chlorée, laissant paraître une autre image du jeune italien. Ses cheveux lisses lui tombaient juste au dessus des yeux et touchaient presque ses épaules pour ceux à l'arrière; mettant ainsi en avant le dégradé de longueur à peine visible lorsqu'il avait les cheveux secs. Le blanc des yeux rougit par l'irritation, causée par les produits sanitaires utilisés dans l'eau de la piscine, faisait ressortir davantage ses iris de couleur miel. En plus d'avoir l'air douloureux, son regard avait l'air confus par les paroles de son amie.

"Ton projet ou celui de James?"

Blanche roula des yeux à l'écoute du prénom de son collègue. Elle plaqua son dos contre le rebord du bassin et posa ses deux coudes sur le carrelage en damier, la tête en arrière, elle souffla un bon coup avant de reprendre.

"C'est plus vraiment son projet en vrai. La boîte a repris la main dessus car ils y ont vu une occasion de se faire plein de thunes sur ceux qui n'ont plus rien à perdre, même pas leur propre vie et nous on vient leur vendre un semblant de raisons de vivre; des BD, des romans et les podcasts. Super, non?"

Blanche tendait les jambes de sorte à faire sortir le bout de ses orteils de l'eau, les fléchissant vers l'avant et vers l'arrière au rythme des vagues créées par les personnes occupant le bassin.

Passer le capOù les histoires vivent. Découvrez maintenant