Chapitre 28

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PDV Carlos

Je glisse la fermeture éclair de ma veste tout en dévalant les escaliers. Je débouche sur le rez-de-chaussée qui fait office de salle de boxe. Deux gamins s'y entraînent sous l'œil attentif du roux avec lequel Asal et moi cohabitons depuis maintenant un an. Dans la pièce attenante se trouve le fameux salon de tatouage.

Dès l'instant où il me voit, le grand gabarit s'approche, les lèvres fendues en un demi-sourire. Cette sensation de malaise que je ne connais que trop bien me saisit quand mon regard se porte sur son œil de verre. Cette prothèse, il la porte par ma faute. L'octroiement, si facile, de son pardon n'a fait que renforcer mon sentiment de culpabilité. Je ne méritais pas tant de bonté. Surtout, je ne méritais pas son pardon.

─ Tu penses encore à ce qui s'est passé, n'est-ce pas ?

Je secoue la tête affirmativement. Comment ne pas y penser ? Il n'aurait jamais dû perdre un œil, encore moins lors d'un entraînement. Ce jour-là, j'ai carrément pété les plombs.

En ce temps-là, Hanna et moi étions à notre tout début d'amitié. Et quelle amitié ! On se taquinait à tout-va, ne remettant jamais le sujet qui fâche sur le tapis. On se cherchait sans pour autant se l'admettre, encore moins se l'avouer jusqu'à ce drame

Aujourd'hui encore, j'entends le hurlement aigu des sirènes. Je sens l'odeur métallique du sang. Ce même liquide qui bouillait dans mes veines de n'avoir pas pu finir ce que j'avais commencé.

Flashback

Je quitte la salle sous les regards réprobateurs de mes équipiers qui encerclent ce salaud. Il a le visage ensanglanté. Je ne l'ai pas loupé. Les autres, non plus. Si c'était à refaire, je le ferais encore et encore jusqu'à ce que mort s'ensuive. Ça leur apprendra à ne pas se mêler de mes affaires. Arrivé au vestiaire, je laisse libre cours à ma colère croissante. Je brise tout ce qui a le malheur de tomber entre mes mains. J'ai manqué mon coup. Encore une fois.

─ Arrête !

À travers le brouillard de ma hargne, je la distingue. Hanna ? Qu'est-ce qu'elle fiche ici ? Elle vient d'avoir un accident. Elle devrait donc être à l'hôpital. Je me tape le front à plusieurs reprises dans le but de me ressaisir. Putain de bordel de merde ! Ça s'est passé, il y a 4 ans.

─ Ton amie m'a appelé. Qu'est-ce qui t'as pris de t'en prendre à ton entraîneur ? Tes amis ? Et ce type, tu l'as complètement défiguré !

L'horreur se lit ouvertement sur son visage. Je la plaque sans ménagement contre les casiers.

─ Ta gueule !

La première personne que je croise en sortant des vestiaires est Asal. Elle recule vivement comme si elle a devant elle un fantôme ou pire encore le monstre du Loch Ness en personne. Le bleu sur sa joue retient mon attention. C'est de sa faute si je m'en suis pris à elle. Elle n'aurait jamais dû s'interposer entre cette enflure et moi, se mettre en travers de mon chemin. Elle a accidentellement reçu mon poing. Putain ! J'avais juré de ne jamais lever la main sur une femme. C'est lui et lui seul le responsable.

Je la dépasse rageusement. Je sors juste à temps pour voir Victoria Fuller s'engouffrer à l'arrière de l'ambulance qui part en trombe. Je cours derrière le véhicule sans parvenir à le rattraper. Merde ! Je trouve refuge, peu de temps après, dans un parc.

La nuit est tombée depuis bien longtemps lorsque je suis aveuglé par les phares d'une BMW. Hanna en sort. Qu'est-ce qu'elle fout là ? Je ne veux voir personne, encore moins cette écervelée. Je démarre ma moto une seconde fois. Pour aller où ? Je l'ignore. Une douleur aiguë me traverse le bras quand je m'écrase sur le sol devenu glissant par l'ondée qui a eu lieu.

HannaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant