Chapitre 33

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PDV Carlos

Je suis partie avec Monsieur Pitu en Kentucky voir mon frère. Je ne sais pas quand nous reviendrons. Laisse tes clés sous le paillasson.

Robyn<3

De la feuille de papier, je ne fais qu'une boulette que j'envoie chier. N'empêche qu'une fois sous la douche, je ravaude... je ravaude chaque phrase point par point. C'est clairement une lettre de rupture, sans quoi elle ne m'aurait pas demandé de laisser la clé qu'elle m'a donnée sous le tapis. C'est insensé ! songé-je en secouant la tête. Néanmoins, elle ne donne pas de date de retour. Elle a bel et bien mis les voiles aussi avec le machin très tôt vu l'heure qu'il est actuellement. Ça ne lui ressemble pas. La Robyn que je connais est une adepte de la grasse mat'. De plus, elle n'entame jamais une journée sans prendre un bon café. Or la machine à café est intacte. Ce qui ne peut vouloir dire qu'une chose : j'ai merdé, hier et pas qu'un peu.

─ Qu'est-ce que j'ai bien pu faire ou dire comme connerie ? me questionné-je en mon for intérieur.

Des séquences de nous, la veille, affluent comme pour me rafraichir la mémoire. Je me rappelle la perplexité à laquelle elle était en proie lorsque nous avons quitté la fête sans dire au revoir. Mon irritation était si facilement palpable qu'elle n'a pas osé prononcer un seul mot durant tout le trajet. Quand j'ai posé les yeux sur elle à nouveau, j'ai su... j'ai su que je serais incapable de lui faire l'amour. Oppressé par un violent désir, je l'ai d'abord prise en levrette dans ce passage étroit localisé entre l'épicerie du coin et son immeuble, puis contre la porte d'entrée. Je ne saurais dire exactement à quel moment nous avons regagné la chambre, mais je peux affirmer, et avec certitude, que je l'ai bien baisée.

Le sexe, conjugué à des émotions sombres comme la colère et le ressentiment, a la vertu d'un punchingball. Quand ça arrive, il fait ressortir notre côté bestial. Un animal, voilà ce que j'étais hier, mué par ce besoin insatiable de la pilonner encore et encore. Mais ce n'est pas ça qui l'a poussé à partir. Les marques dans mon dos et le souvenir d'elle réclamant toujours plus sont des preuves tangibles du plaisir qu'elle a pris. Pourquoi diable est-elle partie alors ?

Mes pensées se tournent inexorablement vers elle. Mon corps entier se raidit devant la vision des deux tourtereaux en train de s'envoyer en l'air. Elle prend son pied, assise sur lui en califourchon. Ma mâchoire se crispe davantage, faisant grincer mes dents... N'y tenant plus, je pousse un très long rugissement qui se répercute dans la cabine. À bout de forces, je m'appuie des deux mains sur le carrelage. Je demeure dans cette posture pendant longtemps.

L'eau qui coule du pommeau et m'asperge a l'effet d'un calmant, si bien que j'en viens à me demander : qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ? Elle aime ce couillon. Et alors ? Je devrais être heureux pour elle. Mais c'est plus fort que moi. Je tiens trop à elle pour ne pas être jaloux quand d'autres gars s'en approchent. Hier encore, je l'ai vue. Je la vois souvent quand Robyn et moi faisons l'amour. Ça aussi, c'est plus fort que moi. La vérité est que je n'ai aucun contrôle sur mon corps, mon esprit dès qu'il s'agit d'Hanna Fuller.

─ Bon sang ! Qu'est-ce qui m'arrive ? me demandé-je à haute voix cette fois.

S'impose à mon esprit ce moment à la fête, quand je l'ai perdue des yeux. L'absence du guignol m'a d'emblée mis la puce à l'oreille. Je me suis mis à leur recherche me figurant sans peine la position dans laquelle je les surprendrais. J'ai cru devenir fou en entendant son appel à l'aide, pire en voyant cette ordure installée sur ses jambes, braguette ouverte. Je n'ose même pas imaginer ce qui serait advenu si je n'étais pas intervenu à temps. L'essentiel est que je l'ai arrachée des griffes de cette charogne, me rassuré-je, calmant ainsi mon sang qui bouillonne dans mes veines. Mais ensuite ?

HannaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant