Voilà plus d'une année que le Dragon doré ne s'était pas montré. Douze longs mois, durant lesquels, le captif du roi Lauan vivait un véritable calvaire.
Il ne fut guère facile au début pour Lauan de sortir son artillerie et de tout mettre en œuvre pour le faire parler. Torturer son propre fils demandait un sang-froid incomparable. Pour s'aider, Lauan se força à se rappeler la façon dont sa première épouse était morte. Cela lui permettait de ressentir un semblant de rancoeur. Sans compter que, lorsque le roi se regardait dans le miroir, son visage n'avait plus rien de ce qu'il avait été jadis.
Malgré tous ces mois passés, son visage était marqué grossièrement. Les deux joues brûlées, la cicatrice n'avait guère disparut, sa peau était gondolée, irrégulière, creusant ses tissus. Sans compter la méchante balafre qui traversait sa joue, comme un demi sourire. Elle avait blanchi avec le temps mais n'était pas invisible. Son nez ayant été cassé, il restait quelque peu cabossé.
Le roi avait beau tout faire pour prendre soin de lui, son visage restait marqué et aucun remède miracle n'existait. Pour le peuple, les marques qu'affichaient le roi montraient en lui un homme courageux, prêt à tout pour protéger son royaume. Alors Lauan s'en servit, en partie pour oublier la beauté qu'il avait perdu.
Il se maria peu de temps après l'emprisonnement de Natanaël, avec une femme de bonne famille. Ses cheveux blonds étaient longs, flamboyants, son visage juvénile sans défauts et son corps frêle rappelait la jeunesse à Lauan. Elle était à peine âgée de vingt ans mais il souhaitait déjà lui faire des enfants. Pour lui, il était primordial d'avoir un fils, car il lui était impossible de savoir si, maintenant réveillé, il vieillissait.
De son côté, Natanaël périssait dans les cachots. Dans l'humidité, l'obscurité, la famine. Les rats étaient ses principaux camarades de cellule. Il vécut l'été par une chaleur étouffante sous terre, sans possibilité de se rafraîchir et le seul moyen qu'il avait de boire, était celui de récupérer l'eau de pluie passant par les petites lucarnes atteignables uniquement par des géants.
L'hiver fut rude. Cette fois, le froid emporta avec lui plusieurs détenus voisins. Natanaël grelottait jour et nuit, sa peau rougissait, restait marquée. Ses plaies ne guérissaient pas toujours, ses cheveux poussaient, sa barbe aussi et son esprit s'évadait très souvent, afin d'oublier le calvaire dans lequel il vivait.
— Ouvre les yeux, Natanaël, entendit-il comme un murmure près de son oreille.
Alors il rouvrit ses beaux yeux bleus. Les mains de son épouse dégagèrent sa vue, et il put apprécier le paysage qui s'offrait à lui. De grandes falaises, de l'herbe verdoyante, des fleurs colorées, un paysage vallonné à perte de vue. Il se retourna vers sa dulcinée qui s'était installée sur une couverture. Elle tapota la place à côté d'elle pour l'inviter à la rejoindre.
Il s'installa près d'elle et lui donna un raisin à manger et vice versa. Elle souriait, à pleines dents. Son visage rayonnait de bonheur, ses yeux reflétaient l'amour, ses lèvres invitaient à l'embrasser et son corps incitait à la luxure...
— Comment te sens-tu ? Lui demanda-t-elle de sa douce voix.
— Je me sens toujours apaisé près de toi, Gorgia, rétorqua-t-il.
Elle lui sourit et mangea un nouveau raisin. Elle ferma les yeux ensuite, inspira profondément puis expira longuement par la bouche.
— Hm... c'est si bon de se retrouver seuls, dans un endroit si calme, loin de tout.
Elle rouvrit les yeux pour toiser son époux.
— Parfois je rêve de vivre loin des autres, loin des Hommes. J'ai la sensation que toi et moi sommes trop différents pour vivre avec eux ou tisser des affinités, reprit-elle.

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L'Armure du dernier Dragon [INTÉGRALE]
FantasyAeria est une jeune noble à la beauté sans pareille. Elle a cependant constamment été vendue à des hommes pour que sa beauté profite également à ses parents. Le jour où ceux-ci passent un pacte avec le Roi des Landes, un homme connu pour sa cruauté...