Chapitre 2 - Découverte nocturne

98 13 0
                                    

Des cheveux bruns, une peau hâlée d'apparence si douce qu'elle avait déjà du mal à résister à l'envie de la caresser, un corps... sculptural. Si des doutes persistaient, ils n'avaient plus de raison d'être. Cet homme tombé des cieux était celui qui ne manquerait pas de lui briser le cœur et malgré sa bonne volonté, elle craignait de ne pouvoir lui résister bien longtemps. Sur ce point reposait toute sa malédiction.

La surprise de cet enchaînement d'événements passée, Calypso se mit au travail. Cet homme avait de grandes chances d'être un demi-dieu mais il venait de faire une chute de plusieurs milliers de mètres. Faisant appel à ses dons, elle demanda au vent de soulever son invité et l'emmena dans sa grotte. Là, elle le fit s'allonger délicatement au milieu de ses draps immaculés. Elle eut envie de se gifler lorsqu'elle songea avec ferveur à quel point elle le trouvait beau et paisible, à sa place, dans son lit, auprès d'elle.

Et voilà que ç'avait commencé ! Elle était fichue !

Ne voulant pas quitter son chevet - apparemment, cela lui était déjà impossible de se séparer de lui - Calypso pria ses amies éthérées de lui apporter un carré d'ambroisie et une dose de nectar. Nourriture des dieux, ils pouvaient aussi guérir leur descendance s'ils étaient consommés en petite quantité. Dans le cas contraire, le nectar et l'ambroisie s'avéraient mortels. N'étaient pas dieux qui le souhaitaient.

Calypso observa attentivement l'homme et caressa, de la pointe de ses doigts, son front plissé. Il semblait en pleine réflexion ou en plein rêve. Si c'était le cas, il devrait faire attention. Pour les héros, les rêves n'étaient jamais anodins. Jamais. Prémonitoires ou au sens caché, ils recélaient toujours une part de l'avenir.

- Merci, chères amies...

Calypso s'empara des remèdes incolores et inodores et les fit avaler au bel inconnu. Ce ne fut pas tâche aisée mais elle y parvint. Consciente des changements qui s'opéraient déjà en elle, la jeune femme décida de s'éloigner, non sans avoir effleuré la peau tentatrice de son hôte une dernière fois. Elle devait réfléchir. Si elle souffrait terriblement de sa solitude forcée, Calypso n'était pas désespérée au point de préférer la présence d'un homme irrésistible qui lui serait arraché lorsqu'il serait déjà trop tard pour son cœur.

- Oh Zeus ! Je sais que tu m'entends et que tu m'observes ! Quel plaisir tu dois retirer de me voir tourmentée ! C'est un pur divertissement pour toi qui es perché sur ton trône olympien ! Mais qu'a donc fait ce jeune héros pour mériter pareil châtiment ?

Il y eut un moment de silence, puis elle reprit.

- Oh sûrement pas grand-chose. Le roi des Cieux est susceptible, tout le monde le sait ! Et ses décisions toujours démesurées !

Calypso entendit le ciel lui répondre en grondant mais elle n'en avait que faire ! Elle n'avait plus peur. Elle avait vécu assez longtemps alors si telle était la solution pour en finir, elle continuerait à injurier le tout puissant, le grand Zeus. Elle attendit puis se défoula à nouveau en criant tous les noms d'oiseaux dont elle avait connaissance mais, une fois encore, elle ne fut pas exaucée. Zeus avait pris sur lui et elle vivrait. Il voulait certainement assister plus longtemps à sa déchéance...

- Tu n'as pas le droit de te plaindre, Calypso. N'as-tu donc rien retenu des récits d'Hermès ? De ce qui se passe partout autour de toi ? Tu es seule mais tu vis, dans un endroit magnifique qui plus est...

Désemparée, elle tourna le dos à la plage où elle avait hurlé sa rage et se mit en quête de ses dentelles de lune. A cette heure de la nuit, elles devaient être écloses. Elle ignorait pourquoi mais Calypso trouvait un certain réconfort dans ces fleurs nocturnes. Peut-être parce qu'elle savait que, tout comme elles, elle ne verrait jamais rien d'autre que cette terre. Elle se laissa guider par la lumière spectrale qui se dégageait de leurs pétales et atteignit l'endroit d'Ogygie où la majorité d'entre elles poussaient. Véritable petite prairie argentée, c'était son petit coin de paradis. Les larmes glissant sur chacune de ses joues, Calypso se laissa tomber à genoux au milieu de ses compagnes d'infortune et en profita pour déverser son désarroi et son chagrin.

Je reviendraiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant