Calypso se réveilla à l'aube, sous le pépiement enchanteur des oiseaux. Reposée, l'esprit désencombré, elle se sentait disposée à entamer cette journée, une de plus à passer sur Ogygie. Se prélassant sous les rayons du soleil venus caresser sa peau, Calypso se tourna d'un côté, puis de l'autre, étirant les bras pour détendre ses muscles endormis. Ce faisant, elle gémit de bien-être et se leva, prête à se mettre aux fourneaux. Ses amies des airs n'étaient pas encore là mais la jeune femme ne s'en formalisa pas, elle aimait les savoir en train de s'amuser, tout là-haut dans le ciel. Sur le point de faire voler les ingrédients nécessaires à la préparation de son petit-déjeuner favori, des petits pains accompagnés d'olives, de fromage et d'une belle grappe de raisin tout droit sortie de son jardin, elle se rendit compte de la vaisselle soigneusement entassée sur un des meubles de cuisine.
- Par Hadès, comment ai-je fait pour oublier ? marmonna-t-elle.
Caspian. Le héros tombé des cieux. Son cœur en péril. Leur petite dispute.
- Mais où donc est-il passé ?
Calypso fit le tour de sa grotte, en quête de son invité forcé, en vain. Avec l'espoir un peu fou qu'il était parti, sans avoir eu le temps de lui déchiqueter le cœur, la fille d'Atlas s'activa à la confection de sa collation matinale, un sourire au coin des lèvres. Au fond d'elle, elle savait qu'il était inutile de se faire de fausses idées, aussi alléchantes puissent-elles être, mais il n'était pas interdit de rêver. S'il avait besoin d'elle ou de quoi que ce soit qu'elle put lui apporter, nul doute qu'il saurait se faire connaître. En attendant, Calypso apprécia la quiétude de ce matin ensoleillé. Elle qui s'était tant plainte de ce calme n'en revenait pas de revenir sur ses pensées ! Chantonnant un de ces airs entêtants, elle plaça tout ce qu'il lui fallait sur un plateau en bois et sortit. Parfois, sa curiosité piquée, elle se demandait ce que le monde moderne avait produit de nouveau en matière de musique. Elle aurait aimé le savoir, quand bien même elle détesterait. La brise l'effleura avec délicatesse, laissant des frissons agréables naître sur sa peau pendant qu'elle descendait le long du sentier qui la mènerait sous une de ses tonnelles de jasmin, en dessous de laquelle était disposé de quoi s'asseoir. Elle était de bonne humeur et décidée à ce que rien n'entrave ses projets. Profitant du bonheur qu'elle ressentait, elle huma le doux parfum qui se déployait tout autour d'elle et croqua dans un de ses morceaux de pain. Pour la première fois depuis des siècles, elle ferma les yeux et gémit sous l'explosion de saveurs qui eut lieu dans sa bouche. Mais que lui arrivait-il ? Était-ce lié à Caspian ? Était-ce sa présence qui, déjà, provoquait la relaxation de son corps ?
Son rêve éveillé ne dura pas bien longtemps, cependant. Un raclement de gorge la ramena sur terre et lui fit ouvrir les yeux.
- Bonjour... la salua-t-il, l'air un peu gêné.
- Bonjour...
Calypso était incapable de faire semblant. Elle ne souhaitait même pas lui faire face. Elle ne savait pas vraiment comment réagir en société et leur dispute d'hier, aussi ridicule fut-elle, l'agaçait encore.
- Je voulais m'excuser pour cette nuit, je ne voulais pas te froisser.
Elle prit le temps de l'observer cette fois et le regretta aussitôt. Enfin pas réellement. Sous la combustion de ses joues, elle détourna la tête et cligna des paupières. Dieux, qu'il était beau ! Comment avait-elle pu oublier qu'il était encore à moitié nu ? Elle n'avait pas pris le temps de lui donner de nouveaux vêtements !
- Quelque chose ne va pas ? l'interrogea-t-il, visiblement inconscient de l'effet qu'il produisait sur elle.
Calypso inspira imperceptiblement et se retourna, s'efforçant de le regarder dans les yeux.
VOUS LISEZ
Je reviendrai
RomansaTous les millénaires, Calypso voit s'échouer un héros sur le sable fin de son île, Ogygie. Et chaque fois, l'histoire se répète. Charmée malgré elle par les valeurs chevaleresques et la beauté hypnotique de ces jeunes hommes, Calypso finit toujours...