Nous sommes montés au premier étage, puis au deuxième. C'était un grenier, auquel on accédait par un escalier. Un paravent, un simple paravent marquait l'entrée dans une grande pièce, peut-être 30 mètres carrés.
Sur la gauche en entrant, contre le mur, il y avait une commode. Juste à côté, un miroir en pieds. Je me suis regardée dedans ce soir-là, et le lendemain matin aussi.
Et puis des sacs plastiques, des choses qui traînent par terre. Et au fond, une petite fenêtre de laquelle on voyait, deux étages plus bas, la terrasse, avec la grande table, et le reste des invités. A cette heure-ci il y avait sous les fenêtres une quinzaine de personnes encore debout, qui discutaient pendant cette belle, très belle nuit estivale.
Au bas de cette petite fenêtre, un matelas. Il ne fait qu'une place. Et dessus, un seul oreiller, et une petite couette. Je suis épuisée, je m'allonge dessus.
Toute habillée.
Du 8 au 10 août, j'étais chez lui. Quand je suis arrivée, je lui ai fais des avances. Moi. Je l'embrassais, toujours plus, et puis ses mains sont descendues sur moi et je les ai laissées faire, parce que j'avais envie d'elles. J'étais heureuse. C'était un matin d'été, il faisait beau, il faisait chaud, dans la pénombre de cette chambre où deux adolescents se découvraient. Et puis arrive le grand moment. Ma première pénétration. Il essaie. Et ça ne marche pas. Moi, j'ai honte. Je me dis que c'est de ma faute, parce qu'après tout c'est ma première fois, mais pas la sienne. Donc le soucis vient de moi. Je n'ai pas su me détendre, je l'ai mal fait.
Il me dit qu'il est frustré, et m'abandonne, nue dans son lit, pour aller "se finir" (je le cite) dans les toilettes juste à côté. Et ça dure, plusieurs minutes. Pendant ce temps je me rhabille. Je me dis que ce n'est pas grave, (enfin, pas trop) qu'on réessaiera le soir. Et dans l'après-midi, j'ai mes règles. On comprend tous les deux que je les aurai pour le reste de mon séjour. Et puis, le lendemain soir, à cause de ces mêmes règles, j'ai terriblement mal au ventre. Je me tord de douleur, j'ai envie de vomir. Je ne supporte pas ses câlins, j'ai juste besoin de dormir, mais je n'y parviens pas. Une deuxième fois, parce qu'il "ne supporte pas de voir quelqu'un souffrir comme ça" (je le cite encore) il m'abandonne. Il va dormir dans la pièce voisine. Le lendemain matin, quand je me réveille, je n'ose pas aller voir s'il l'est. Je me dis que je devrais être plus malade que ça, je m'en veux d'aller bien. Je me dis que je lui mens, que c'est mal.
Alors ce 12 août, deux jours après ce double échec. Je me sens triste. J'ai l'impression, moi, de l'avoir laissé seul, qu'il attendait beaucoup de moi et que je n'avais pas su répondre à ses envies. Et donc, que je devais remédier à cela.
Je suis donc habillée sur ce matelas. Et lui, lui a envie que cette situation change. Il vient m'embrasser, il me caresse. Je le repousse, je suis fatiguée, j'ai envie de dormir. Mais il continue. Fermement je lui dis non, je suis trop fatiguée, pas ce soir, une autre fois.
Alors il se détourne de moi, une troisième fois. Je vais pour le prendre dans mes bras mais il me dit "non. Soit on le fait, soit tu ne me touches pas. Mais j'ai trop envie de toi pour juste te faire un câlin." Je m'excuse, et j'ai envie qu'il me dise que ce n'est pas grave, qu'il comprend. Mais non, il me répond "et puis on ne se voit plus pendant deux semaines après, et puis avec ta prépa tu n'auras plus le temps pour moi."
Ce qu'il se passe dans ma tête à ce moment-là ? Je me dis que je l'abandonne encore une fois. Qu'encore une fois, parce que je suis une gamine, je n'ai pas su être une bonne petite amie. Alors qu'est-ce que je fais... Et bien la chose la plus simple à faire à ce moment-là. Je lui dis que je suis désolée, je l'embrasse, je lui dis d'accord. Et je laisse ses mains glisser sur moi, ma main glisser sur lui.
Et puis il essaie d'entrer en moi, et n'y arrive pas. J'ai mal. Mais je décide qu'il faut que ça se fasse. Que je ne peux pas le décevoir encore une fois. Alors je viens sur lui. Et j'essaie de le laisser entrer en moi. Je souffle, fort, non pas de plaisir mais de douleur. J'ai mal, je sens une larme glisser sur ma joue mais je l'enlève de ma main. Surtout ne pas lui montrer que j'ai mal. J'entends des voix qui proviennent de la terrasse. Je veux que quand tout ça sera fini il descende les rejoindre et me laisse dormir.
Il est en moi. Je me souviens de cette sensation que je ne trouve pas très agréable. J'ai mal. Je monte, je descend, j'ai mal. Il souffle fort. Il y prend du plaisir. Pas moi. Mais je me dis que s'il est heureux c'est parfait.
Je me retrouve sur le dos. Il entre en moi de nouveau. Plus facilement cette fois, bien sûr. Il commence ses allers retours, de plus en plus vite, il me baise.
J'aurais pu chercher un autre terme. Mais le bon c'est celui-là. Je ferme les yeux. Je veux qu'il jouisse. Parce que je veux que ça se termine mais qu'il soit content. A ce moment-là je me dis simplement que je n'aime pas le sexe, que ce n'est pas pour moi, et que ce n'est pas grave. Qu'à partir de maintenant je me forcerai un peu pour son plaisir. C'est ce que je me dis à ce moment-là.
Et enfin, il jouit. Et je simule, je soupire dans son râle, je l'embrasse. Il se retire de moi, et je me rhabille. Je cherche ma culotte et mon t-shirt, je ne veux pas dormir nue.
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Trop plein
Non-FictionL'art du témoignage est un art compliqué. C'est choisir de faire entrer le public dans son intimité. Raconter une agression sexuelle, parce que c'est ce que je vous raconte dans ce livre, c'est presque pire. Je vous demande de plonger avec moi dans...