I follow you.. in the dark

Telle ancêtre, telle descendance - Eeri

Je sors du miroir et m'étale à plat ventre sur le plancher de mon salon. J'avais oublié que la réception peut être violente si on s'y prend mal. En me relevant, je me frotte les genoux en grimaçant. Maintenant, je dois savoir comment ramener ma mère. Je pars m'asseoir sur mon canapé pour réfléchir à tout ça.

Entre Jaiden, la Comtesse et moi, je reste la plus vulnérable. Comme l'a dit Jaiden, qu'est-ce que je ferai si elle se pointe ? Et si Agathe ne s'en rend compte que trop tard ? Je tourne la tête vers le miroir, elle n'y est pas. Moi qui pensais l'avoir aidé à accéder à l'Autre-monde, voilà qu'elle se retrouve enfermée dans un miroir ! Je fais vraiment mal mon boulot !

Je n'ai pas le temps de me pencher sérieusement sur le problème de ma mère en voyant une âme apparaître dans ma chambre. Je repère tout de suite la couleur de sa brume : blanche, bonne.

Je dois me méfier, les traîtres c'est pas ce qu'il manque désormais.

— Nom, prénom, âge, date et lieu de décès ! dis-je sans la moindre politesse.

— Euh, je... bafouille l'âme.

— Alors ?

Au vue de sa réaction totalement perdue, je repose mes questions avec une voix plus douce.

— Eeri, 27 ans, je ne me souviens pas de la date ni du lieu.

Mon cœur rate un battement en entendant son prénom. Je la regarde de haut en bas, elle n'a rien à voir avec moi. Pourtant, elle porte mon prénom et on a le même âge.

— Comment es-tu morte ? dis-je inquiète.

— C'est flou...

Brume blanche, cause naturelle ou maladie. Je ne suis pas malade, et mourir à 27 ans n'est pas très naturel.

— Comment s'appelle ta mère ? enchainé-je

— Je ne sais plus, je n'ai plus rien.

— Connaissais-tu un Jaiden ?

— Non. Je ne sais pas, dit-elle perdue

Ca ne m'arrange pas. Mais pas du tout. Pas de date ni de lieu de décès, comment je fais là ?

— Tu ne te rappelle absolument de rien ? questionné-je.

Du coin de l'oeil, je m'aperçois de la présence d'Agathe. Mauvais signe.

— Tout est noir, répond l'âme.

Je tilte en entendant cela, au moment où je compte réagir, l'âme change d'apparence, Agathe disparaît. J'ai juste le temps d'esquiver l'attaque de l'âme en me jetant sur le côté. Quand je relève la tête, ma mère se tient devant moi.

— Bonjour, ma chérie, sourit-elle, je t'ai manqué j'espère ?

— Non, répondis-je du tac au tac.

Ce n'était pas ce qu'elle voulait entendre, elle apparaît devant moi, me saisit par le cou en me faisant reculer jusqu'à être plaquée contre le mur. Je sens des brûlures autour de sa prise. L'Obscurité est en train de me brûler.

— J'en ai marre d'être faible, lâché-je avant de lui mettre un coup de genou dans l'estomac.

Elle recule sur plusieurs mètres, les mains sur son ventre. Je l'attrape à mon tour par les cheveux et je viens lui plaquer la tête contre la table basse. Elle disparaît à ce moment pour m'empoigner l'arrière de la tête et me mettre à genoux. Quand elle se penche, j'en profite pour lui mettre un coup de coude dans le ventre puis d'enchaîner avec un coup de paume dans le menton. Elle se retrouve complètement sonnée et tombe dos au plancher. Je me relève rapidement pour me mettre au-dessus d'elle.

— Tu es devenue forte dis-moi, dit-elle en souriant.

— L'adrénaline connasse, répondis-je avant de lui mettre une droite qui l'assome complètement.

Jaiden et la Comtesse arrivent à ce moment. En me voyant au-dessus de ma mère, la Comtesse s'enthousiasme en frappant dans ses mains.

— Je suis tellement fière de toi ! J'en pleurerai !

— Fragile va, tacle Jaiden.

Ils viennent vers moi, je me lève afin que la Comtesse la saisisse par le col.

— Et si on l'interrogeait ?

— De quoi ? s'étonne Jaiden

— Venez.

Sans en dire plus, elle traverse le miroir en faisant suivre le corps de ma mère. On la rejoint aussitôt. Cette fois-ci je me prépare à me réceptionner correctement mais je rentre dans Jaiden.

— Pardon ! dis-je

— Y en a une qui a trop bu, sourit-il

— Pas du tout.

La Comtesse se dirige à l'étage, on le suis de près. Elle traverse le couloir puis ouvre une porte en balançant ma mère à l'intérieur.

— Ça va que c'est une âme ! lâche Jaiden.

— Bah pour une âme elle est lourde ! maugrée-je.

En pénétrant tous les deux dans la pièce, on remarque que la Comtesse a entravé ma mère en lui attachant les mains et les jambes. En observant de plus près les liens avec lesquels ma mère est retenue, je me rends compte que ce n'est pas du cordage. Cela ressemble plus à de la fumée s'échappant de l'Obscurité.

— Tu me poseras des questions plus tard Eeri, dit la Comtesse sans quitter ma mère des yeux.

— J'en avais pas, menté-je.

— Je suis ton ancêtre.

— J'en ai pleins, avoué-je.

Quand ma mère retrouve ses esprits et qu'elle se rend compte de la situation dans laquelle elle se trouve, la peur s'affiche sur son visage.

— Bonjour, commence la Comtesse.

— Qui... Qui êtes-vous !? panique ma mère.

— Vous avez sûrement entendu parler de moi, surtout quand vous avez su que votre fille avait hérité de ce don.

— Je ne vois pas de quoi vous parlez ! crache-t-elle.

— Ca vous parle la Comtesse Noire ?

Le visage de ma mère se ferme aussitôt. On l'entend bredouiller des mots mais on ne comprend rien. Elle regarde ensuite dans ma direction.

— Edward a dû vous parler de Jaiden non ? questionne la Comtesse.

— Non.

— Un bâtard jusqu'au bout, s'amuse Jaiden, vous n'êtes vraiment que des pions à ses yeux, et comme des cons, vous obéissez.

— Vous comptez vraiment vous attaquer à votre propre fille ? s'insurge la Comtesse.

— En quoi est-ce ma fille ?!

Je sens mon cœur se serrer, je me mords les lèvres. Comment ose-t-elle dire ça...

— Dès sa naissance, elle n'a porté que malheur dans notre famille ! crache ma mère, cette créature du diable !

Avant que la Comtesse ne réagisse, je m'approche de ma mère et lui demande de répéter.

— Tu n'es pas ma fille, mais un démon ! dit-elle en appuyant sur chaque syllabe.

— J'ai déjà entendu ça quelque part, chuchoté-je en faisant mine de réfléchir.

Je lui tourne le dos quelques secondes avant de lui décrocher une droite.

— Comparée à la Comtesse et Jaiden, je ne peux pas faire autrement pour t'éclater, me défendé-je.

— Jolie droite, avoue mon ancêtre.

— Merci !

La Comtesse nous demande ensuite à Jaiden et moi de quitter la pièce car elle souhaite s'entretenir seule avec ma mère. On acquiesce puis on quitte la pièce.