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Evy

- Ev' ! Dépêche toi ! On va être en retard !
Ma mère hurle depuis le bas de l'escalier. Et ça me rend dingue ! "Ev'" ... mais qu'est ce que je déteste quand elle m'appelle comme ça. Elle ne peut pas faire comme tout le monde ? Evy, ce n'est pas si compliqué, si ?

- Pas la peine de te pomponner enfin, on va chercher ton frère.
- Premièrement, je ne me pomponne pas. Deuxièmement, ce gars n'est pas mon frère.

J'ouvre la porte de ma chambre. Descends les escaliers alors que j'ai juste envie de faire demi tour.

Je déteste l'idée ...

Mon papa est mort. Mon père aussi ... Luc, mon père biologique, est mort juste avant ma naissance. Un tragique accident sur son chantier de travail. Christian, mon papa, celui qui m'a élevée, celui qui m'a tout appris, celui qui a veillé sur moi, est mort il y a peine deux ans. Comme tous les jours, il est parti travaillé, il m'a appelée durant sa pause déjeuné mais ensuite il n'est jamais rentré. Rupture d'anévrisme. Il paraît qu'on ne pouvait rien prévoir.
Il ne reste plus que moi et ma mère, Lucile. Grande, fine, charismatique, imposante avec sa coupe garçonne mais un instinct maternel proche de 0.

Je me regarde dans le miroir de l'entrée. Toujours trop petite, toujours les 5 kilos de trop, toujours trop pas terrible.

Ma tornade de mère se rue sur la porte d'entrée, sac à main et clé de voiture attrapé à la volée. Je ne sais pas pourquoi elle est si pressée.

Je déteste toujours l'idée.

L'idée qu'un intrus va s'incruster chez nous. je revois la scène. Il y a trois jours seulement, ma mère et moi dînions à la cuisine quand son portable a vibré. Vu le silence qui régnait à table, impossible de le rater. Comme d'habitude, elle m'a sourit et dit "c'est sûrement important".
Bon sang, qu'est ce que j'aurais préféré qu'elle ne décroche jamais ...
Quelques minutes plus tard, elle est revenue, blanche comme une morte, la bouche encore ouverte. Elle a juste murmuré :
Maxime vient s'installer
Maxime ?
Le fils de Christian, que je n'ai plus vu depuis cinq ans. Le gamin mal élevé qui venait squatter la piscine pendant l'été. Mais surtout, qui a bien fait comprendre à mon père, son père, qu'il était bien mieux sans lui. Je déteste ce gars, déjà rien que pour le principe.

Sa mère est décédée d'un cancer, il n'a aucune famille alors apparement ma mère s'est sentie l'âme d'une bonne sœur et a décidé de l'accueillir chez nous.

- Tu comprends, je fais ça pour son père, enfin ton père, enfin tu comprends !
Je comprends surtout qu'elle a peter un câble oui !

Et nous voilà en route pour l'aéroport, accueillir ce puceron arrivé tout droit d'Europe. L'Italie n'aurait pas pu le garder franchement ?

Le trajet dure plus ou moins une heure et je n'ai pas envie que ma mère m'explique encore pourquoi elle fait ça en m'implorant d'être une petite fille modèle. Je branche mes écouteurs à mon portable, ferme les yeux et me laisse envahir par la musique, mon refuge.

Inévitable Où les histoires vivent. Découvrez maintenant