CHAPITRE 55 - L'unique

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(Musique: Ray LaMontagne-Be here now)



RETOUR POINT DE VUE ELEONORE



Je ne sais pas trop quoi vous dire, tout comme j'ignore encore la suite probable à ce capharnaüm. J'aimerais plus de facilité, une possibilité de trouver une porte de sortie, un aller simple pour mon passé, pour mon innocence et surtout, pour faire marche arrière sur toutes ces erreurs commises, irréfléchies et blessantes.

Je voudrais laisser en cours de route mes doutes, mes défauts, pour me peaufiner une belle armure infaillible, une sorte de tortue ninja des temps modernes, sans les doigts de pieds flippants. J'ai passé mon adolescence à me murer dans un silence que j'imaginais rassurant, minimisant mon sort, minimisant toute cette hargne rien que pour adoucir l'aspect extérieur de ma petite personne. A presque 22ans, je commence doucement à prendre conscience de la gravité de certains aspects qui aujourd'hui encore, me poussent à me retrancher dans un mutisme handicapant.

On a pourtant tous une issue de secours, une main tendue qu'on imagine libératrice, presque irréelle. Elle est juste là, face à vous, bien écartée pour vous inviter à fuir la réalité, pour vous guider jusqu'à cette sensation euphorique.

Et si on lui échappe, si contre toute attente, l'agripper nous semble trop difficile, beaucoup trop synonyme de changements, de confrontations, de problèmes encore plus gros que ceux présents.

Et si on commet la plus grosse des erreurs en refusant?


Quelles en sont les conséquences?


Que deviennent ces battements irréfléchis qui somnolent sous cette fine couche d'épiderme?

Qu'arrive-t'il a ce sourire, qui lentement se meurt sur ce visage angélique?


Tout cela disparait d'un claquement de doigt, parce que tout est compté, tout se justifie et rien ne persiste.

Ce qu'il vous reste, c'est une couche épaisse de remords amères, la sensation d'avoir failli à votre avenir, d'y laisser un paquet d'organes vitaux sans pouvoir agir pour les reconquérir.


Ce ne sera jamais pour ta pomme Léo, il faudra t'y faire.


Mon père est mort le lendemain. Il est mort en compagnie de sa famille, d'une poignet d'êtres chères qui ne me comptait pas permis eux. Je le savais, même avant la sonnerie stridente envahissant les 4 murs de mon espace vital. Je le savais parce qu'il me manquait quelque chose en plus, quelque chose d'indescriptible, qui vous ronge sans réellement porter de nom.

Il est mort entouré, tout comme je m'empressais de rester cloitrer loin des remous, à l'abris de cette réalité.

Une ultime respiration, un dernier souffle avant la fin, avant les larmes et la désillusion.

Un ultime espoir de revoir mon papa, une dernière possibilité de donner un coup de pied à mon passé, à cet attachement sans faille.

Alors j'ai pris sur moi et j'ai persisté.


Comme un vrai petit bout de femme.

Un vrai petit bout de femme cagneux.

IMPERFECTIONSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant