CHAPITRE 6 - Perdue

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Perdue, paumée, tout ce que vous voulez.

Avez-vous déjà tenté d’éviter votre ombre?

Pour résumer, fuir Teddy relevait de l’impossible. Il me manquait, et lorsqu’enfin je croisais ses traits familiers au bout d’un couloir bondé, mon coeur cognait et je voulais aussitôt me retourner avant qu’il ne m’aperçoive. 

L’unique solution restait le mensonge éhonté, chose que je détestais formellement et qui pourtant me sauvait la vie, définitivement. 

Ma récente révélation me prouvait que quelque chose clochait entre lui et moi, à commencer par nos attouchements pourtant anodins que je condamnais comme étant les auteurs de mes sentiments. 

Les excuses rocambolesques venaient avec une facilité improbable, me découvrant une nouvelle activité peu glorieuse.

Sa récente petite amie, Carla, était le portrait craché de l’étudiante bonne sous toutes les coutures. Elle était désespérément divine et le savait, à ses petits sourires fières et assurés.

Elle était l’excuse parfaite de mes disparitions.

- « Enfin, je te croise »

Une excuse malheureusement pas omniprésente.

Je détourne mon attention de mon téléphone, coupant aussitôt de son de mon application.

Son sourire franc me rend aussitôt malade.

Placé face à ma chaise miteuse, Teddy prend tout l’espace, ayant mon dos plaqué contre le mur.

- « ça va? Tu es bizarre ces derniers jours »

Dans le mille.

- « ça va, juste épuisée par les révisions »

Le ton de ma voix est complètement faux, c’en est flagrant. Je rive à nouveau mon regard en direction de mon écran, de peur qu’il ne découvre mes sentiments dans la façon dont mes yeux le scrutent. 

- « Léo? »

- « hum? » 

Je fais glisser lentement le contenu de l’application, défilant sans concentration les actualités que je ne regarde pourtant jamais. Je cherche désespérément une activité. Si possible, une activité me faisant oublier le grand gaillard qui bouffe toute mon oxygène.

- « C’est à cause de ton père ou.. de Austin? »

Je retiens de justesse une exclamation puis me reprend enfin.

L’idée n’était pas bête, même si Austin faisait parti de ma liste noire, contenant son unique nom, c’était le prétexte le plus simple pour couper court à toute discussion. Interdiction de parler de la figure paternelle que je n’avais plus, j’étais assez mal en point comme ça.
- « Je..Austin..c’est.. »

Je ne sais pas vraiment quoi dire, mais j’imagine avoir viser juste en croisant de nouveau ses prunelles claires étonnées, cherchant ce qui cloche dans ma pauvre tête.

- « Attends, tu es sérieuse? »

Son changement d’humeur me serre le coeur. Plus aucune émotion ne traverse son visage pourtant lumineux. Ses sourcils froncés inquisiteurs cherchent à déchiffrer mon attitude, que je masque à coup de minuscules hochements de tête. Je serre plus fort la housse en silicone du gadget entre mes doigts, la ferme intention de ne pas relâcher la pression de peur que mes yeux me lâchent honteusement et se vident de mon liquide lacrymal (déjà largement endommagé).

IMPERFECTIONSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant