Annabelle Storm - Les Oubliés de l'Empire

Chapitre 12 - Sur la piste d'une héroïne

« 28 février,

Cela faisait longtemps que je n'avais pas autant ri. J'ai vu William débouler vers moi, vexé comme pas possible, induisant que je lui avais menti sur moi. J'étais perplexe sur la raison de sa mauvaise humeur à mon égard jusqu'à ce qu'il m'explique que je ne pouvais pas être née un 29 février puisque le mois se terminait aujourd'hui, comme indiqué sur le calendrier chez lui. Je ne sais pas ce qui a été le plus drôle entre son incompréhension ou bien sa tête lorsque je lui ai expliqué le principe des années bissextiles, mais j'ai ri à en avoir mal aux côtes. Avoir cru être dupé par moi a révélé chez lui cette partie que je ne connaissais pas, mais elle était empreinte d'une émotion très forte. Pour quelqu'un d'aussi peu expansif que lui, c'était incroyable. Il a fini par rire aussi, et ce son a éveillé dans mon ventre une douce chaleur que je n'arrive plus à réfréner.

Bordel ! Je suis en train de tomber amoureuse de lui ! »

Le contenu de la valise s'était retrouvé disséminé sur toute la table de la salle à manger. Le tout sentait principalement le renfermé, mais avait été parfaitement conservé pendant plus de dix ans sans aucune anicroche. De l'extérieur, le contenant ne payait pas de mine. Sa taille moyenne laissait supposer contenir à peine de quoi se vêtir pour un week-end, mais ce n'était pas ce que Meryl avait décidé d'y ranger. Il y avait des albums, des documents, des sachets ou boites contenant des objets, tous ayant appartenu à cette dernière. Annabelle avait saisi un petit pochon à l'intérieur duquel elle en sortit une alliance en or blanc. L'anneau tout simple possédait une fine gravure ou les lettres W et M se mélangeaient harmonieusement. Rien qu'en découvrant ce premier souvenir elle s'était sentie envahi d'une forte émotion.

Leag et Jude étaient évidemment de la partie et feuilletaient plusieurs documents avant de les disposer sur la table en les nommant un à un.

- C'est un acte de mariage, déchiffra le tatoué tout en guettant les réactions de son amie.

- Et moi j'ai le titre de propriété d'une maison dans les régions Armondiennes, du côté d'Of'Ibur, ajouta Leag.

Ces noms parurent familiers aux oreilles d'Annabelle. De son côté, elle trouva dans un coin deux passeports universels, ceux-là même qui lui avaient servi pour rentrer sur terre avec sa mère. Un seul tampon figurait sur le sien tandis que celui de Meryl était beaucoup plus pourvu. Elle avait énormément voyagé durant sa courte vie.

- C'est quoi ce vieux truc ?

Jude avait mis la main sur un vieil appareil photo argentique tellement désuet qu'il ne comprit pas immédiatement ce à quoi il avait affaire. La jeune femme se moqua gentiment de son ignorance avant de le saisir et de vérifier son état.

- Elle voulait être photographe, se rappela-t-elle avec nostalgie.

Curieuse, elle ouvrit le boîtier à l'arrière et écarquilla les yeux en y découvrant une pellicule déjà entamée. À première vue, le contenu de la valise semblait seulement révéler quelques éléments du passé familial d'Annabelle sur Organtia jusqu'à ce que cette dernière ne trouve un élément sorti de nulle part.

L'album photo confectionné avec soin semblait raconter l'aventure de William et Meryl jusqu'à ce que cette dernière tombe enceinte. Beaucoup de visages inconnus apparaissaient au fil des pages, des rencontres qu'ils avaient fait à travers les deux mondes. Puis, à la toute fin, la jeune femme découvrit une ancienne photographie, en noir et blanc, jaunie par les années, et même déchirée sur un coin. Le cliché représentait simplement une jeune femme vêtue très sobrement d'une chemise rentrée dans une longue jupe en laine. Elle ne souriait pas et fixait l'objectif avec convenance, le buste droit et le regard intransigeant. Ses cheveux étaient coiffés avec soin, tirés en arrière par des épingles, avec de généreuses boucles pour donner du volume. À en croire la clarté de l'image, elle devait être blonde avec des yeux bleus, ou du moins dans une teinte claire. Elle était très élégante malgré la dureté exprimée, ne laissant apparaître que la peine.