Annabelle Storm - Les Oubliés de l'Empire

Chapitre 15 - Domus (Partie 1)

8 avril.

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Je ne sais pas pourquoi ça me hante. Peut-être parce que Maman tenait tant à savoir, comme si elle avait décidé sans moi de ce à quoi devrait ressembler ma vie d'adulte. Le médecin n'a eu aucun mal à lui lister tous mes recours, sans me demander mon avis. Chirurgie ; Fécondation in vitro ; Congélation de mes ovules...

3%. 3 putain de % de chance de pouvoir tomber enceinte et donc encore moins de pouvoir mener la grossesse à terme. Autant dire 0. Le jour où j'ai demandé s'il n'était pas préférable de tout en enlever définitivement, Maman a piqué une colère et Papa m'a insulté de tous les noms possibles, disant que nous vivions une époque corrompue par l'Alliance. J'ai plus jamais abordé le sujet. Pour eux, il était inconcevable que je ne puisse pas avoir d'enfant naturellement. Ils pensent que Dieu me teste, m'impose une épreuve. Que Dieu aille bien se faire foutre !

Quand j'en ai parlé à William, il n'a rien exprimé. Il s'est contenté d'acquiescer et d'ajouter cette information à toutes celles me concernant dans un coin de son esprit. Pourquoi je lui parle de ça ? À quoi bon ? On sort ensemble depuis tout juste un mois et on n'a même pas passé le cap du pelotage. Ça me convient. On parle beaucoup. Surtout moi, pour changer. Il m'apprend un peu à parler sa langue, mais c'est plus difficile que ça en a l'air. Des fois, il me parle de chez lui. De cette famille qu'il a quitté un jour, sans me dire pourquoi. Puis il m'a confié qu'il était venu sur Terre pour en trouver une autre, qu'il a longtemps cherché des noms. Il est toujours très vague quand il parle de ces choses-là alors je ne comprends pas bien. Peut-être qu'il attend de me faire suffisamment confiance pour dire réellement ce qu'il est venu faire ici.

D'abord, il y eut la pénombre, puis le calme et enfin la fraîcheur. À mesure qu'ils descendaient l'escalier en colimaçon, ils constatèrent à quel point l'ambiance avait changé. Le corps entier d'Annabelle émit un frisson, faisant se hérisser ses poils. Quelques ampoules éclairaient les marches sans laisser entrevoir la destination. Tout autour d'eux n'était que pierres froides et impersonnelles, donnant presque l'impression de pénétrer dans un donjon. Le seul bruit perceptible était les pas de la jeune femme dont les sandales claquaient le sol à un rythme régulier. Leag, fidèle à lui-même et à son apprentissage, l'accompagnait aussi la souplesse d'un félin. Même sur un vieux parquet grinçant, il ne ferait aucun bruit. À force de le côtoyer, elle n'était plus surprise, le contraire l'aurait été.

Au bout de quelques minutes, l'escalier déboucha sur une porte massive, tout en bois, ornée d'une poignée en bronze. Ce qui surpris Annabelle, c'était la structure en pierre qui l'encadrait. Elle était taillée en forme de colonnes telles qu'on en trouvait en Grèce ou dans des vestiges romains. Sans plus attendre, Leag força sur la porte, comme si elle ne pesait rien et tout deux furent éblouis par la lumière de l'autre côté.

Il leur fallut un moment pour s'accoutumer à la luminosité. Et tandis qu'elle plissait des yeux, Annabelle entendit alors de nombreuses voix, des rires, et des clapotis. Le spectacle qui se déroulait sous ses yeux était invraisemblable tant il n'avait rien à voir avec ce qu'elle avait pu imaginer durant leur descente. Le sol du nouveau lieu était entièrement recouvert de mosaïques, avec parfois quelques représentations de fleurs, d'objets ou de formes abstraites. Plusieurs personnes passèrent devant eux, sans leur prêter attention tandis qu'il découvrait un univers tel qu'ils n'en avaient jamais vu. L'endroit était une réplique presque exacte d'une villa romaine. Il y avait un petit bassin agrémenté de fontaines et de poissons qui apportait une ambiance bien plus apaisante que l'étage supérieur. Plusieurs colonnes encadraient l'espace autant qu'elle soutenait le plafond. La différence notable avec les véritables demeures d'époque était l'absence de lumière naturelle. Ainsi, il y avait un peu partout des luminaires, des torches et autres types d'éclairage qui ne laissaient aucun espace dans la pénombre. Toutes les personnes autour d'eux se distinguaient de la foule sur la piste. Leur tenue était plus sophistiquée, moins pailletée, certains arborant leur fortune plus que d'autres.