Chapitre 2

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Un mal de crâne abominable vrille la tête de Morgane lorsqu'elle ouvre les yeux, mais elle met de côté sa douleur pour se concentrer sur son environnement, qui ne lui évoque pas grand chose. Elle sent le métal froid autour de ses poignets, et probablement une autre chaîne sur l'une de ses chevilles, autour de sa botte, de même que la pierre contre son visage et ses mains. La pièce est sombre, mais la pré-Élitienne distingue quelques traces de sang sur le sol, qui paraissent anciennes. La couleur délavée lui indiqua que ces tâches avaient sans doute fait l'objet d'un lavage, avant que l'objectif de nettoyer les pierres ne soit abandonné. La pièce était circulaire, sans chaise, sans table, sans meuble. Quelques balcons plus haut faisaient un promontoire pour l'observer, mais aucun moyen de savoir où la femme se trouvait.

Une porte s'ouvrit et Morgane tourna sa tête vers l'origine du son, voyant le visage de Louis Serra dans l'obscurité, ainsi que celui d'autres Élitiens aux noms inconnus. Ils se mirent dans les balcons au-dessus d'elle, et la fausse humaine songea que l'agencement de la pièce lui évoquait un peu la Tour des épreuves. Pour un peu, elle se serait presque relevée et présentée au jury avec le sourire impatient à l'idée d'avoir une nouvelle branche à son arbre doré.

— Vous avez été arrêté hier soir dans le cadre du décès du roi, ainsi que de celui d'une vingtaine de gardes royaux, pour trahison envers l'école de l'Élite, pour alliance avec nos ennemis, ainsi qu'usurpation d'identité, annonça le capitaine des Élitiens d'une voix forte. Ne sont retenus pour le moment à votre égard que l'assassinat des gardes royaux, la suspicion de trahison envers l'école et l'usurpation d'identité.

L'heure n'était pas à la plaisanterie, donc Morgane se retint de faire un trait d'esprit, prenant l'attitude sérieuse qui était attendue en de telles circonstances.

— Monsieur, je plaide l'innocence pour toutes ces accusations. Les gardes royaux étaient déjà morts lorsque je suis arrivée dans la chambre du roi, mais je n'avais croisé la route que d'un seul corps avant. Je n'ai jamais trahi l'école, et je n'usurpe l'identité de personne.

— Prendre le nom d'un pré-Élitien ayant disparu il y a près d'un siècle, apparaître dans la chambre d'un mort, posséder une arme qui pourrait être celle ayant tué les gardes royaux, et enfin permettre à William Estaffes de nous échapper, je doute que cela ne puisse pas être qualifier d'assassinat, de trahison et de vol d'identité auprès d'un mort.

Les humains étaient stupides au goût de Morgane, mais elle se sentait encore plus stupide de ne pas savoir comment mettre fin à ces accusations grossières qui manquaient de fondements. Elle fouilla dans sa mémoire à la recherche d'une idée, avant de songer qu'elle avait froid. Négligemment, elle ralluma son arbre doré, provoquant des murmures étouffés chez l'assistance.

— Quoi ? J'avais froid, et il fait sombre, se justifia la femme.

— Pourquoi possédez-vous un Exploit ? s'enquit un homme brun à la carrure impressionnante.

La pré-Élitienne songea à mentir, mais elle savait que peu importe ce qu'elle dirait, on ne la croirait de toute façon pas.

— La direction de l'école me l'a donné...

— Cessez vos mensonges, gronda le capitaine de l'Élite. À part le capitaine, les dernières personnes à avoir obtenu un Exploit sont les Estaffes, et c'était il y a plus d'un siècle !

— Louis, nous pourrions utiliser la Carte dorée, et voir qui est ce jeune homme, proposa un blond à l'air placide. La carte ne ment jamais, c'est le meilleur moyen de savoir qui est cette personne.

— Oh, super ! Faites ce qu'il dit, vous allez voir que je ne mens pas ! s'écria Morgane avec soulagement.

L'attente dura un moment avant qu'un Élitien ne revienne avec la carte en question et ne se poste devant elle. L'homme avait des dizaines de cicatrices sur son visage, ses cheveux blonds semblaient mal coupés et il paraissait fatigué. Sans l'avertir, il lui lança un éclair doré, forçant Morgane à réagir en lançant une attaque à son tour, moins puissante, mais suffisamment forte pour que les deux attaques se percutent et disparaissent, ne touchant personne.

La pré-Élitienne cachéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant