Acte 3, scène 5 : Rites Nymphiques

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Scène 5

POLÉMARQUE ET LES FEMMES

Polémarque est dans le centre-ville d'Athènes, l'air perplexe.

POLÉMARQUE : Cet homme cache plus d'étrangetés qu'il ne veut bien le dire. « Mon âme à ton âge se berçait comme la plume ». Mais quelle est donc cette sorcellerie ? (Il voit tout à coup aux abords de la cité un bâtiment.) Oh, il s'échappe des odeurs inhabituelles. Mmmmh ... l'air sent bon le jasmin et le lilas. (Il se dirige vers le bâtiment et s'y introduit furtivement. Il voit alors une statue d'Aphrodite aux seins nus dans l'entrée.) Par tous les dieux, où suis-je tombé ?! (Il dirige sa main vers le sein. Puis, un cortège entre sur scène. Il s'arrête et observe le cortège. Il aperçoit des silhouettes de femmes.) Quelle est donc cette absurdité ? Par Hercule ! Est-ce le cortège des Océanides ?

LES FEMMES : Nous voulons rentrer chez nous. En voilà assez, notre maîtresse nous attend.

POLÉMARQUE : Voilà ! C'est ce que je disais.

UNE FEMME : (Elle se détourne du cortège.) Oh ! Voici un jeune éphèbe. (Polémarque se cache derrière la statue.) Ah ! Il est parti. C'était sûrement un étranger.

POLÉMARQUE : (Derrière la statue.) Hmmh ... Je dois constater les allées et venues. C'est mon rôle de soldat. Ainsi, je partirai quand il n'y aura plus personne. (Il voit une autre statue plus loin avec cette fois, un homme qui tient une jeune sirène dans les bras.) Je dois absolument réaliser ma tâche de cet angle stratégique. Je vais me cacher pour plus de prudence. (Il s'infiltre derrière la statue et remarque une grande toile en fond. Il veut alors l'inspecter et passe à travers. De l'autre côté, il y a une pièce débordante de vapeur d'eau et de parfums exotiques.) Je ne discerne plus que des silhouettes de femmes qui semblent dévêtues. Les vapeurs me préservent de ces rites nymphiques ... ma tâche de soldat m'appelle. (Une silhouette fine et gracieuse plonge dans un bain et l'éclabousse.) Par Calypso ! (Il s'approche, en prenant un vase sur un présentoir et se cache le visage avec. Une main tendue de femme prend alors les lilas dans le vase et s'en orne la tête.) Déesse Hécate ! (Il est alors frôlé par une autre. Elle l'entraîne dans les bains en lui tenant la main.) Déesse Héra ! (Elle le mène dans le sauna principal avec les autres femmes. Polémarque est dans son chiton, les femmes veulent le lui enlever. Il les repousse, non sans mal et se retranche dans un coin de la pièce.) Ô Aphrodite, que me fais-tu faire là ? (Il se fait le plus petit possible. Une femme qui tient une écuelle d'huile dans les mains passe juste devant lui. Elle la verse sur le dos d'une autre. L'autre murmure à son oreille.)

UNE FEMME : Que penses-tu de notre mode de vie ? Crois-tu qu'il soit juste que nous soyons tous au service d'un seul homme, élevées dans un régime pour en être les mères ?

L'AUTRE FEMME : C'est notre destin. Les années coulent inéluctablement vers le jugement d'Héra. (Elle fait s'écouler l'huile.) Si nous effectuons bien notre travail, nous serons récompensées.

LA PREMIÈRE FEMME : Oui mais Héra est la reine de l'Olympe ! Regarde-nous. Nous sommes mères et pourtant esclaves, puisque nous passons nos journées à nous faire belles pour des hommes. Je veux plus que cela !

UNE AUTRE FEMME : Nous pouvons faire plus que cela. La loi de mon cœur me l'oblige. Il appelle à la révolution ! Aucune divinité ne peut aller à son encontre.

LA PREMIÈRE FEMME : Oui ! J'ai le même vœu que toi. Mais que pouvons-nous faire ?

LA FEMME : (Avec l'huile.) Parmi nous, il y en a une qui a décidé de changer notre condition. Je suis avec elle.

LA PREMIÈRE FEMME : Je veux vous rejoindre !

L'AUTRE FEMME : Moi aussi !

LA FEMME : (Avec l'huile. Elle s'adresse à l'ensemble du groupe.) Certes mais pensez-vous que vous êtes les seules à vouloir la liberté, mes sœurs ?

LES FEMMES : Non. Nous sommes toutes uniques et indépendantes !

(Elles s'exaltent toutes et rient ensemble.)

POLÉMARQUE : (À lui-même.) Ô toutes les déesses, par pitié ! Je veux quitter cet endroit. Arès, prenez-moi si vous le souhaitez mais faites cesser le conflit de mon cœur ! (Dans son élan, il passe derrière les femmes et sort du sauna, il se dirige vers la sortie mais ne retrouve plus la toile dans l'entrée.) Le voile du Monde s'est abattu sur moi ! (Il marche à tâtons les mains en avant et touche un buste de Socrate.) Seul cet homme possède la vertu. Guide-moi, ô maître ! (Il voit alors un autre buste devant l'entrée, il passe derrière les rideaux et retrouve la sortie. Puis, il remarque la statue d'Aphrodite dans l'entrée. Il dit.) Ce n'est pas moi, ce n'était qu'une ombre.

(Il sort.)

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