Chapitre 15

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"Je ne sais pas. Que dire, à part bonne chance ?"

Talya parvint enfin à la porte de leur salle. Il n'y avait pas de serrure, la seule chose qui empêchait les adolescents de partir était l'absence de poignée à l'intérieure. La jeune fille ouvrit le battant à la volée et dissipa ses illusions, redevenant visible. Eilynn était déjà debout et ne semblait pas surprise, contrairement à l'intégralité des autres qui la regardaient avec des yeux ronds.

- Vous attendez quoi, au juste ? leur lança-t-elle

Aussitôt, ils bondirent sur leurs pieds et se dépêchèrent de sortir, étrangement ordonnés. Edric passa en dernier, vérifiant au passage que plus personne ne se trouvait dans la pièce. Il allait refermer la porte quand Talya l'en empêcha.

- Il faut leur laisser quelque chose, quand même, lui sourit-elle

Il recula, ne comprenant pas où elle voulait en venir mais ne désirant pas perdre de temps. Elle se concentra, espérant de tout cœur que les faux captifs tiendraient le coup. Quelques secondes plus tard, le bourdonnement devint omniprésent et elle sentit qu'elle parvenait à ses limites.

Bien sûr qu'elle arrivait aux limites ! Elle n'était pas entraînée, couverte de son propre sang et exténuée.

Edric le remarqua et entoura sa taille de ses bras.

- Fais attention, Talya. Tu n'as pas besoin de faire ça si tu ne t'en sens pas capable.

Pas capable ? Comment ça, pas capable ?

- Tu penses que je ne suis pas assez forte ? le charria-t-elle en sachant d'avance qu'il allait bafouiller et rougir

Ce qu'il fit, tentant de s'excuser en balbutiant.

- Tout va bien. Je peux le faire, fais-moi confiance.

- Je te fais déjà confiance.

Ses mains tremblaient, mais elle puisa au fond d'elle et repoussa l'énergie qui l'habitait hors de son corps. Enfin, les faux adolescents apparurent dans la pièce, un peu transparents mais assez réalistes pour quelqu'un qui passerait en vitesse.

- Tu as créé des leurres ? fit Eilynn en parlant plus fort que nécessaire, comme pour être certaine que tout le monde l'entende

- Ça ne paraît assez évident, la rabroua Emira. Maintenant, on y va !

Elle prit la main d'Adalia et l'entraîna à travers les couloirs, suivie de près par les autres qui la suivaient automatiquement.

- Eilynn, tu peux t'assurer qu'il n'y a personne dans les parages ? demanda Edric

L'adolescente sourit étrangement.

- Bien sûr.

Elle ferma les yeux et ralentit le pas mais ne tenta même pas de savoir si quelqu'un approchait.

- Je ne vois personne à part nous, dit-elle après quelques secondes

Ne pas mentir, il ne fallait pas mentir. Elle vérifia rapidement dans sa poche que l'appel était toujours en cours puis se rapprocha de l'avant du groupe. Si un scientifique venait vraiment, il fallait qu'elle en soit la première informée.

- Je sais que tu caches quelque chose. je ne sais pas ce que c'est, mais je te préviens que s'il arrive du mal aux autres par ta faute - et s'il leur arrive quoi que ce soit, je te tiendrais pour responsable - je te tuerais moi-même. Compris ? lui siffla Emira

- Du calme, je ne compte rien faire.

Et c'était vrai ! Lilith et les autres s'en chargeraient.

- Attendez ! Il faut que je nous cache, au cas où, dit Talya

Elle jeta un regard suspicieux à Eilynn, qui fronça les sourcils. Talya ? Depuis quand Talya la soupçonnait-elle ? Lilith lui avait-elle dit quelque chose ? Quoi ? Elle lui sourit dans l'espoir qu'elle la détrompe dans son impression mais elle n'en fit rien, se détournant d'elle. Oh. C'était de mauvaise augure.

- Non, Talya, tu ne peux pas faire ça. Tu as déjà eu du mal tout à l'heure... commença Edric

- Ne me dis ce que je peux faire ou non ! le coupa Talya, agacée

Elle bloqua sa respiration, refusant qu'il ait raison. Elle devait absolument les protéger.

- Ne bougez surtout pas, murmura-t-elle

Ses illusions passèrent peu à peu entre les adolescents, s'entourant autour de leurs membres jusqu'à les faire disparaître entièrement. Eilynn commença à paniquer. Non ! Ils devaient se faire repérer ! Sinon... c'en était fini de tout, du lieu, de la Société, d'elle !

Il n'y avait plus qu'à espérer que Talya ne tienne pas le rythme très longtemps.

- C'est bon, leur lança-t-elle à bout de souffle

Edric la portait à moitié malgré ses protestations, et elle frissonnait à en claquer des dents.

Emira avança de nouveau, plus doucement. Les portes se succédaient, mais aucune ne ressemblait à une sortie et il n'y avait pas une seule fenêtre à l'horizon. Au bout d'un moment, ils croisèrent San, qui se dirigeait tout droit vers leur salle. Il les effleura et s'arrêta une seconde avant de reprendre son chemin. Une fois qu'il eut tourné à l'angle du mur, Talya désactiva tout ce qu'elle avait fait et souffla :

- Courez.

Se souciant peu du bruit qu'ils faisaient, ils se précipitèrent dans le labyrinthe de couloirs en espérant trouver rapidement une sortie. Finalement, ils tombèrent sur une porte plus grande que les autres, fermée par trois gros cadenas.

- Vous croyez que... ? débuta Eckarias

... avant de s'effondrer au sol après une détonation assourdissante.

Les Souvenirs PerdusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant