Chapitre 15 - Harry

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Je tourne en rond, regardant l'heure toutes les deux ou trois minutes. Si la matinée est passée relativement vite, ce début d'après-midi me semble interminable. J'attends des nouvelles de Louis. Mon dernier message n'ayant pas été distribué, je suppose qu'il est pris en charge.


Mon cœur balance. J'espère sincèrement que les résultats seront bons et pourront libérer Louis du centre. Égoïstement, j'aimerais qu'il doive rester encore un peu. Je n'ai pas envie de le voir partir.


Je souffle fortement et me dirige vers la petite cuisine. Je remplis la bouilloire et la mets en route. Pendant que l'eau chauffe, je sors mon grand mug isotherme et un sachet de thé. Je récupère un sweat dans la penderie et enfile mes baskets. J'attends les quatre minutes que mon thé infuse et sors de la petite maison.


Je parcours la distance qui me sépare du centre et de la plage. J'arpente ces rues depuis mon arrivée, plusieurs fois par jour avec le même sentiment qui m'envahit, l'empressement.


Au début, c'était pour le paysage. Les kilomètres de sable fin, les dunes et la mer à perte de vue. Le va-et-vient de la marée, les couleurs changeantes du ciel. Le vent et l'odeur des embruns. Et puis, il y a eu Louis. Et tout est devenu plus fort, plus important, plus pressant.


Je n'ai pas envie de quitter cette région qui m'apaise. Mais je sens que le départ imminent de Louis risque de tout changer.


J'emprunte le petit chemin de terre qui débouche juste devant le centre et souris en voyant la silhouette d'Augustin. Installé sur le banc, les deux mains sur sa canne, il m'adresse un signe de tête lorsqu'il me voit approcher.


Naturellement, je m'assieds à ses côtés après l'avoir salué. Je prends une gorgée de mon thé et prends une grande inspiration.


"Comment vous portez-vous Augustin ? je l'interroge avec intérêt.

- Ca va bien, gamin ! C'a été une bonne journée.

- Je suis content d'entendre ça !

- Ma famille m'a rendu visite. Ca fait toujours plaisir de voir qu'on compte encore un peu.

- Augustin, je souffle. Vous comptez pour votre famille. Un tempérament comme le votre, ça ne peut pas laisser indifférent !"


Le vieil homme hausse ses épaules, incertain. Il tourne son visage vers moi avant de reprendre.


"Quand les petits-enfants étaient petits et ma femme encore de ce monde, nous les avions à chaque vacance. Tout le monde nous rendait visite. Et puis, les enfants ont grandi, leur quotidien les a éloigné d'ici. Ils venaient moins souvent. Revoir ma fille et mon gendre tous les week-ends a été réconfortant. Je n'ai pourtant pas envie de quitter ma maison ici... soupire-t-il.

- Je comprends, je lui réponds sincèrement. C'est une belle région. Votre famille habite où ?

- A Caen. Ce n'est pas le bout du monde, mais..."


Augustin tape sa canne contre le sol.


"Je vais partir pendant une quinzaine de jours chez ma fille. Je crois qu'elle espère me faire comprendre que je serais mieux en ville, près d'eux.

LA REEDUCATION DES COEURSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant