Chapitre 7

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Je n'en reviens pas. J'ai peut-être été un peu dur en affirmant que rappeur n'était pas un métier mais il le méritait ! Depuis notre rencontre, il n'arrête pas de me traiter de petite bourge alors qu'il ne me connaît même pas. Il a commencé à me chercher, maintenant il sait qu'il peut me trouver. Bien sûr je sais que mon monde a des défauts, de nombreux défauts d'ailleurs. Mais je n'y suis pour rien. Je n'ai pas choisi de naître dans une famille riche. Je déteste ça, d'ailleurs. Ca me met hors de moi qu'un type sorti de nul part se permette de me juger sans savoir que je me suis toujours rebellée contre les privilèges que les gens comme moi, ceux qui sont « bien nés », ont. Il ne se doute pas que j'ai refusé l'appui de mon père pour entrer dans mon école de journalisme, que j'ai trouvé mon job dans cette rédaction et que je paie mon loyer toute seule.

Il t'a rendu ton portefeuille alors tu ne le verras plus. La petite voix dans ma tête à raison. Qu'il me juge si ça lui chante, ça ne m'atteint pas.

Je suis furieuse quand je sors de l'immeuble. Les mecs sont toujours là et semblent encore plus alcoolisés qu'il y a dix minutes.

- Alors on te manquait déjà, pétasse ?

- C'est vrai qu'elle est bonne cette salope.

C'est la goutte d'eau. Tout dans cette journée craint : ce quartier, cette rue, ces mecs.

Dans un élan de colère, je lance :

- Vos gueules bande de petites bites.

Je ne sais pas pourquoi j'ai dit ça. D'habitude, je suis plutôt du genre à la fermer pour éviter les problèmes, mais je suis en colère à cause de Finn, et c'est eux qui vont prendre.

J'ai à peine le temps de faire un pas que deux types se postent devant moi, m'arrêtant dans ma lancée. L'un est grand et épais, l'autre maigrichon avec un piercing à l'arcade.

- Répète ce que t'as dis.

- Tu veux qu'on te montre si on a des petites bites, sale pute ?

Le plus costaud des deux s'approche de moi et tente de m'attraper le bras. Je recule mais suis freinée dans ma lancée. Mon dos percute le torse d'un autre type. 

- T'es bonne toi, dit-il en poussant mes épaules pour me ramener vers le grand costaud. Le groupe m'encercle à présent. Ils parlent tous en même temps, si bien que j'ai du mal à me concentrer sur ce qu'ils disent. Je n'entends que leurs rires gras. 

Je hurle :

- Ça va, arrêtez ! Laissez-moi partir ! 

Prise de panique totale, j'essaye de trouver une brèche pour m'échapper mais dès que je fais un pas, les mecs se rapprochent pour m'empêcher de passer. Il y a cinq mecs autour de moi, en train de m'insulter et de me pousser et je ne sais absolument pas quoi faire pour m'en sortir. J'aurais dû faire de la boxe. Pourquoi je n'ai jamais fait de boxe ?

Au bout de quelques secondes qui me semblent être des heures, j'entends une voix s'écrier :

- Lâchez la !

D'un coup, mes agresseurs détournent leur attention de moi. Je suis sous le choc et tout va beaucoup trop vite. Je reconnais Finn, accompagné d'Antoine, celui qui m'a ouvert la porte, du grand métisse et d'un autre mec que j'ai vu là-haut, foncer dans le tas et frapper les mecs qui un peu plus tôt m'agressaient. Ces derniers prennent la fuite en voyant qu'ils n'ont aucune chance de s'en sortir.

Alors que les garçons s'écartent une fois leur adversaire maîtrisé, Finn continue de frapper sans relâche un des mecs. Du sang jaillit de la bouche de ce dernier. J'aimerais intervenir et ordonner à Finn d'arrêter mais Antoine me barre le passage. Les deux autres amis de Finn foncent sur lui pour essayer de le ramener à la réalité. Sans que je ne comprenne ce qu'il se déroule devant mes yeux, Finn est projeté sur le trottoir d'en face par ses amis.

- Calme toi, frérot.

Finn reprend ses esprits très rapidement et me fixe. Ses yeux trahissent son inquiétude quand il s'approche de moi et entoure mon visage de ses mains.

- Tout va bien ?

Je hoche la tête, incapable de prononcer le moindre mot. Jamais je n'ai eu aussi peur de toute ma vie.

Les larmes qui coulent de mes yeux s'intensifient et il me serre contre lui.

- Chut, c'est fini, c'est fini...

Pendant un instant, ce moment horrible s'échappe de mon esprit, ma tête blottie contre sa poitrine. Je devine ses abdos sous son tee-shirt blanc.

Antoine et les deux autres attendent en silence derrière nous. Ils me dévisagent d'un air inquiet, ce qui me fait revenir à la réalité. Je me détache de Finn pour les remercier :

- Merci, vraiment merci à tous les quatre. Je n'ose pas imaginer ce qui se serait produit si vous n'étiez pas intervenu.

Antoine m'envoie un sourire compatissant.

- J'étais sur le balcon, quand j'ai entendu des cris. On est tout de suite descendu.

- Allez viens, je vais te donner quelque chose à manger, tu es toute pâle, intervient Finn.

Les antithèsesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant