9

7 2 8
                                    

    8 quilles
     2 quilles
     Spare

     Je souris à la vue de mon score et me tourne vers mon adversaire. Il m'applaudit lentement comme pour me féliciter, mais je sais qu'il me déteste actuellement.

     - Tu penses pouvoir faire mieux ? lui lançais-je un peu trop sûre de moi
     - Bien sûr. Tu me prends pour un débutant ?

     Il pousse un rire franc et arrogant en se levant de son siège. Il attrape une boule en s'avançant vers la piste. Il la ramène contre son buste et prolonge son regard en avant. Il lance la boule bleu foncé qui part comme un boulet de canon.
     Strike
     Putain.
     Il me soûle. Peter se retourne vers moi un grand sourire aux lèvres.

     - Tu disais quoi déjà ?
     - Gnahgnahgnah.

     Il s'amuse de ma réaction et j'attrape mon téléphone quand je vois le prénom de mon amie s'afficher sur l'écran.

     De Cam :
Rappelle-moi pourquoi j'ai décidé d'aller à cette soirée ?

     À Cam :
Honnêtement je comprends toujours pas

     De Cam :
Je me fais chier

     À Cam :
Tu veux que je vienne te chercher ?

     De Cam :
Non ça va aller
Je crois qu'on va bientôt y aller de toute façon

     À Cam :
Tiens-moi au courant

     De Cam :
T'inquiète

     Oui je m'inquiète.

     De Cam :
Au fait t'as demandé à Sofyan de me surveiller ?

     À Cam :
Non
Pourquoi ?

     De Cam :
Parce qu'il vient de me dire l'inverse.

     Sofyan tu fais chier.

     À Cam :
Bon OK
Je lui ai peut-être suggéré l'idée de garder un œil sur toi
Mais en soi, il doit surveiller tout le monde donc tu n'y aurais pas échappé

     De Cam :
Il nous surveille pas beaucoup je trouve
Enfin pas Paul en tout cas
Qui d'ailleurs va sûrement passer une bonne soirée mdrr

     À Cam :
Comment ça ?

     De Cam :
Tu veux pas savoir

     Je n'insiste pas.
     Je relève mes yeux de mon téléphone et rencontre ceux du blond.

     - Tu parles à Camille ?
     - Oui. Pourquoi ? Tu veux son numéro peut-être ?
     - Haha. Très drôle.

     Il détourne le regard et fixe l'écran des scores. Serait-il timide ?

     - Je suis en train de gagner Casquette, fais attention.
     - Ne m'appelle pas comme ça.

     Je tourne ma casquette noire à l'envers et me lève pour jouer. Je fais tomber 8 quilles et retourne à ma place.

     - Tu penses quoi de Sofyan ? me demande subitement Peter
     - Pourquoi tu veux savoir ça ?
     - Parce qu'il semble t'apprécier. Et puis, c'est rare que Sofyan sympathise aussi simplement avec quelqu'un.

     Je me doutais bien qu'il n'était pas très sociable. Je m'assois en face de lui et joue avec mon bracelet.

     - Je sais pas honnêtement. Il est sympa.
     - Je vois.

     Il hoche légèrement la tête perdue dans ses pensées. Il s'apprête à se lever pour jouer.

     - Et toi ? Tu penses quoi de Camille ?

     Il se fige et lève ses yeux vers moi. Je suis incapable de savoir ce qu'il se passe dans sa tête, mais je pourrais parier que ma question l'a rendu nerveux. C'est moi qui l'intimide ou c'est de penser à mon amie qui le fait ? Il fait tourner son anneau autour de son doigt et me regarde.

     - Pourquoi tu me demandes ça ?
     - Je sais pas. Pourquoi je te demande ça à ton avis ?

     Je ne veux pas qu'il se braque. Mais j'ai aussi envie qu'il m'explique ce qu'il se passe entre eux. Je ne peux pas demander à Camille, elle éviterait la discussion ou me mentirait.

     - Je vois pas ce qu'il y a dire.

     Super.
     Mon téléphone vibre une nouvelle fois et je lis le message

     De Cam :
Eva
C'est la merde

     - Putain.
     - Qu'est-ce qu'y ce passe ?

     Je n'ai le temps de répondre ni à Peter ni à Camille que j'appuie déjà sur « appeler »

     Un quart d'heure plus tard, Peter et moi marchons rapidement dans les couloirs immaculés d'un hôpital.

     - C'est de ta faute ! s'écrie une voix. C'est toujours de ta faute !
     - C'est pas moi qui lui ai explosé une bouteille sur la gueule !
     - Oui mais ça ne serait pas arrivé si tu n'avais pas fourré ton nez dans des histoires qui ne te regardent pas ! C'est toujours pareil avec toi !

     On se précipite vers les éclats de voix. On tourne au bout du couloir et tombons sur le groupe en train de s'engueuler.
     Il n'y a que les filles, toujours affabulées de leurs costumes.
     Camille est assise sur une chaise collée au mur et je m'avance rapidement vers elle. Je ne me préoccupe pas des deux autres en train de se hurler dessus et passe à côté d'elles.
     Mon indifférence les fait se taire un instant, surprises de me voir là. Je m'accroupis devant mon amie qui me regarde confuse.

     - T'as rien ? lui demandais-je inquiète
     - Non. Ça va.

     Je soupire soulagée. Le couloir est devenu silencieux un moment. Et puis.

     - C'est de ta faute si Sofyan a frappé ce mec ! reprends Lili
     - Mais c'est de ta faute si j'ai dû intervenir !
     - Mais j'avais pas besoin de toi ! Je me débrouillais toute seule !
     - Tu te débrouillais à foutre la merde, oui !
     - STOP !

     La voix grave de Peter résonne dans le couloir et se répercutent sur les murs.
     Plus un bruit. Plus un geste.

     - Fermez-la, coupe-t-il sèchement

    Sacha souffle de mécontentement et vient s'asseoir à côté de Camille en croisant les bras. Lili contourne Peter et quitte le couloir en silence. Le blond passe sa main sur son visage en soupirant pendant que je me relève.

    La nuit va être longue.

What if we leaveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant