Chapitre 3

2 1 0
                                    

- HELLOOOOO NEMURIIIII !!!
Une voix tonitrante retentit dans tout l'appartement faisant trembler les murs autour d'Arashi, qui appliquait une dernière touche de fond de teint dans sa salle de bain. Le bruit provoqué par cette voix lui fit mal aux oreilles, qui se mirent légèrement à sifler lorsque le vacarme s'arrêta. Frottant ses tempes afin de soulager son acouphène, Arashi pouffa malgré elle. Sa tante l'avait prévenu que l'alter d'Hizashi le rendait très bruyant, mais ce qu'elle avait alors imaginé était bien loin du compte. La voix de sa tante lui parvint ensuite, tout aussi exaltée que la précédente mais beaucoup moins haute en termes de décibels. La jeune femme sortie de la salle de bain, respirant un grand coup, après avoir pris grand soin de camoufler ses bras abimés avec un long gilet noir en laine. Elle marcha dans le long couloir, redoutant légèrement de rencontrer des héros pro, surtout celui qui avait été blessé lors de l'attaque du SCA. Etait-il au courant que sa mère y était ? Et s'il la haissait pour ça ?
- Arashi te voila !
La voix de sa tante la tira de sa torpeur, et son regard tomba nez à nez avec le sourire radieux de Nemuri.
- Viens je vais te présenter.
Lui attrapant fortement la main, sans doute du à son excitation, Nemuri la tira par le bras jusqu'au salon où les deux hommes étaient déjà installés.
- Les garçons, je vous présente ma nièce Arashi Kayama !
Deux paires d'yeux se tournèrent vers elle, ce qui fit légèrement rosir ses joues, bien que cela ne soit pas discernable à cause du fond de teint qui rendait sa cicatrice au visage quasi invisible.
- Mazette Nemuri !! Tu nous avais caché que la beauté se transmettait par les gènes dans ta famille !
C'était un homme plutôt grand, aux cheveux d'un blond éclatant, dressés bien droit sur sa tête, une paire de lunettes de soleil lui tombant sur le nez. Il se leva du canapé avec un immense sourire et attrapa vivement la main d'Arashi pour y déposer un baiser.
- Hizashi Yamada; pour vous servir.
Arashi se souvint de lui, elle l'avait vu passé à la télé de nombreuses fois. Son nom de héros était Present Mic, ce qui expliquait donc l'explosion sonore à son arrivée. La jeune femme était légèrement gênée par sa familiarité mais garda la face, le visage doux mais impassible.
- Ravie de vous rencontrer.
- Oh mais c'est qu'elle a une voix profonde en plus... Quelle douce musique à mes oreilles.
- Hizashi, arrête ton numéro, tu vas finir par lui faire croire que tous les héros professionnels sont aussi extravertis et lourds que Midnight et toi.
Une voix grave retentit derrière Present Mic, ce qui indiqua à la jeune femme que c'était le second homme qui venait de parler. Le grand blond pouffa et lança une réplique cinglante à son homologue.
- Il ne faudrait pas non plus qu'elle pense qu'ils sont tous aussi rabajoie et coincé que toi Eraser.
Alors qu'Hizashi se décalait, la jeune femme eu une vue plongeante sur le second homme. Un frisson parcouru son épine dorsale lorsqu'elle constata dans quel état celui-ci se trouvait en réalité. L'homme en face d'elle, toujours assis sur le sofa, était recouvert de bandage, seuls ses yeux et ses longs cheveux noirs étaient épargnés, ses deux bras emplatrés solidement. Son coeur se mit à battre plus vite, alors qu'elle constatait de ses propres yeux les dégats qu'avait causé la folie de l'Alliance, et le fait de savoir qu'elle aurait pu y être pour quelque chose d'une manière où d'une autre lui donna une intense nausée. Tentant de ne pas se décomposer sur place, elle observa l'homme qui tentait de se lever.
- Oh non ne vous donnez pas cette peine !
- Mon état n'est pas une excuse à l'impolitesse.
Son ton froid figea légèrement la jeune femme, même si elle comprit vite que celui-ci résultait plus d'une frustration de sa part que d'une animosité quelconque envers elle. Une fois debout, il se pencha légèrement vers elle, respectueusement.
- Shota Aizawa... je suis ravi...
- Moi de même...
Arashi lui rendit son salut en s'inclinant également, et croisa son regard sombre et perçant en se redressant. Ses yeux étaient rougis par la sècheresse ce qui l'étonna quelque peu, mais elle s'abstena de poser la moindre question.
- Bien asseyons nous, je vais nous chercher des boissons.
Sur l'invitation de Midnight, tous trois s'asseyèrent, les deux hommes reprenant leurs places sur le canapé, Arashi préférant occuper l'un des deux fauteuils en face. Leur hote revint quelques secondes plus tard avec leurs boissons, Shota y compris malgré son incapacité évidente à tenir sa bouteille de bière, ce qui amusa Hizashi.
- Mais c'est qu'il va falloir que je te donne la béqué maintenant mon petit Eraser Head.
- Ne rends pas les choses plus humiliantes qu'elle ne le sont déjà.
Cela fit exploser de rire les deux autres, la voix de Hizashi faisant de nouveau trembler les murs, et les tympans de la jeune femme. Mais, en un instant, sa voix perdit de sa puissance, ce qui le fit s'étrangler. C'était comme s'il venait de perdre tout à coup son alter, ce qui étonna beaucoup la jeune femme.
- Oh ça va, on peut même plus se moquer un peu de toi sans que tu ne t'énerves. Il faut te détendre Shota.
En effet, deux yeux rouges brillaient à travers les bandages de l'homme aux cheveux noir, ceux-ci dressé tout droit au dessus de sa tête, ce qui interloqua encore plus la jeune femme.
- C'est vous qui avez fait ça ?
la voix d'Arashi sembla arracher l'homme de sa colère, ses yeux redevenant noir de jais, ses cheveux retombant doucement sur ses épaules. Il tourna son regard vers elle, ne répondant pas directement à sa quetion. La voix de Nemuri se fit entendre.
- Tu devrais ménager tes yeux Shota. Les médecins t'ont déconseillés de faire usage de ton alter pour le moment.
Aizawa gromela, se renfonçant dans le dossier du canapé. Arashi ne tenait plus.
- Et son alter qui est ?
Les trois héros se tournèrent vers elle d'un même mouvement, et ce fut le principal intéressé qui répondit.
- J'ai la capacité d'effacer les alters d'un regard. C'est pour cela que l'on m'appelle Eraser Head.
- C'est moi qui ait trouvé ton nom de héros je te signale ! Hizashi s'offusqua.
- Oui, et c'est bien la seule chose pour laquelle j'ai bien fait de t'écouter.
- Pff, rabajoie.
Hizashi prit une gorgée de sa bière, et Arashi s'adressa de nouveau à son homologue.
- C'est ce qui explique l'irritation de vos yeux... je suppose que l'effet de votre alter ne dure que lorsque vous gardez le regard fixe...
- C'est ça...
- Comment se fait-il qu'un talent comme le votre soit inconnu du grand public ? J'ai beau y réflechir, je n'ai jamais entendu parler de vous... sans vous offensez.
- Oh vous ne l'offenserez pas en disant cela ! Eraser est un héros underground. Il fuit les médias comme la peste. Comme si un peu de publicité allait te faire du mal.
- Je te remercie Hizashi, mais je te rapelle que ce sont mes bras qui sont en convalescences. J'aurai pu répondre à sa question par moi-même.
Hizashi pouffa à sa réaction, visiblement très peu atteint par la froideur d'Aizawa. Cela ne fait que quelques minutes qu'elle les observaient, mais il était clair pour la jeune femme que ce petit jeu de rivalité entre eux faisait partie intégrante de leur amitié, Midnight apportant la plus grosse dose de folie dans ce petit groupe. Elle croisa de nouveau le regard d'Aizawa, et la profondeur qu'elle lisait en lui la perturba. Il était très étrange pour elle de n'avoir aucune idée de ce a quoi pouvait ressembler son visage, mais cela rendait, en un sens, la communication avec lui beaucoup plus simple. Il était suffisament intimidant avec des bandages, elle n'osait donc pas imaginer ce que cela pouvait être sans. Hizashi reprit la parole, son entrain retrouvé, son côté charmeur aussi d'ailleurs.
- Bon, assez parlé de nous. Parlez nous de vous Arashi ! Je suis très curieux de savoir ce que vous faites dans la vie et votre alter !
Arashi se figea à sa question et Aizawa aséna un gros coup de son coude platré dans les cottes de son ami.
- Tu es stupide où tu le fais exprès ?!
- Pourquoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ?!
- Je ne lui ai encore rien dit Shota.
- Me dire quoi ?!
Nemuri tourna son regard vers Arashi, s'enquerrant de sa réaction. D'après ce que la principale intéressée constatait, Aizawa était déjà au courant, ce qui la perturba. Elle ne put s'empecher d'exprimer sa pensée à voix haute.
- Vous saviez... et ça ne vous a pas empecher de vous montrer poli et respectueux envers moi...
Sa remarque se dirigeait directement vers l'homme aux cheveux noirs, sont regards se faisant de plus en plus oppressants pour la jeune femme. Sa tante prit les devants.
- Je l'ai tenu au courant avant ton départ de l'hopital.
- Tenu au courant de quoi bon sang ?! Hizashi s'impatientait. - Ma mère était au SCA.
Une expression perplexe se dessina sur le visage du héros, ne comprenant pas de suite ce que cela signifiait. Le regard de la jeune femme finit par lui faire comprendre dans quel camp sa mère se trouvait à ce moment là, et son expression se refroidit d'un seul coup. Un silence s'installa entre les quatre adultes et une anxiété profonde commença à s'emparer du coeur d'Arashi, mais elle fit le choix d'être transparente.
- Je n'ai jamais eu l'occasion de faire quoique ce soit. Ma mère a toujours été une femme tyranique, voila pourquoi Nemuri est partie. Elle ne se doutait pas du danger que je menais jusqu'à ces dernières semaines. mon père la sous estimé et ça lui a couté la vie. Quant à moi, ça m'a couté ma liberté.
Nemuri poussa un léger soupire de douleur, et de regrets. Arashi continua.
- J'ai travaillé comme comptable dans la petite affaire de quartier de ma mère. Elle revendait des objets contrefaits, faisant croire qu'ils étaient fait main. Je n'en ai rien su, du moins jusqu'à mes 15 ans, où j'ai tout découvert. J'ai aussi appris qu'elle s'était livré à de nombreux cambriolages, et que la marchandise passait dans ses reventes. J'ai voulu m'enfuir mais vous devinerez à la légère marque sur mon visage que cela ne s'est pas passé comme prévu.
On la toisait avec pitié, et une certaine détresse se dégageait du regard de Present Mic, Aizawa, quant à lui, restait impassible.
- j'ai passé les derniers 6 mois et demi enfermée dans la cave de notre maison. Elle voulait que je rejoigne l'Alliance, que je mette mon alter au service de la destruction du symbole de la paix... du meurtre d'All Might... J'ai refusé et tenté d'avertir la police pour que UA soit prévenu, mais elle m'en a empeché. Son arrestation m'a sauvé la vie, car c'est comme ça que Nemuri a su où j'étais.
- Je suis toujours autant rongé par le remords de vous avoir laissé ton père et toi... Je savais que ma soeur était différente de moi en beaucoup de points, mais... pas en ces termes...
Arashi posa sa main sur celle de sa tante, un regard rassurant, un petit sourire aux lèvres.
- Je t'ai déjà dit que tu n'y étais pour rien... tu ne pouvais pas savoir ce qu'elle deviendrait... n'oublie pas ta promesse. Je ne veux plus voir ce triste visage, ton sourire te va nettement mieux.
Lui rendant un sourire peu convaincu, Nemuri serra les doigts de sa nièce dans les siens, contemplant avec tristesse les entailles de ses mains qui couraient comme des veines sur sa peau. Arashi se tourna vers les deux hommes, l'un avait l'air le plus désolé du monde, mixé à un peu de honte d'avoir posé une question à première vu banale, tandis que le second semblait l'analyser toute entière, bien caché derrière ses bandelettes blanches.
- Pour répondre à votre question Hizashi, mon alter se nomme "orage". j'ai la capacité de générer des nuages dans le creux de mes paumes, ainsi que me servir des éclairs qu'ils génèrent pour attaquer. Je peux également tiré parti de l'électricité dans les nuages pour en faire jaillir la foudre. Pour tout vous dire, je ne sais pas vraiment si je peux faire autre chose, ma mère limitait strictement l'utilisation de mon pouvoir, me dissuadant de m'en servir contre elle je suppose...
- Avec un pouvoir pareil, je comprends pourquoi l'Alliance pouvait en avoir après vous. Vous nous auriez été utile contre eux au SCA.
- C'est effectivement la place que je voulais avoir, mais on ne m'a jamais offert ma chance.
Hizashi se frotta la nuque, embarassé et attristé de ce qu'il entendait. Mais il lui posa une question à laquelle elle ne s'attendait pas.
- Si... si vous aviez eu une vie différente... qu'auriez-vous fait ?
Le regard d'Aizawa se faisait de plus en plus brulant sur sa peau, la perturbant quelque peu, mais pas suffisament pour que la réponse à cette question ne lui échappe. Cette réponse elle l'avait dans la tête chaque jour de sa vie. Elle coulait dans son sang, flottait dans l'air qu'elle respirait à chaque seconde. Un air déterminée sur le visage, elle répondit.
- J'aurais suivi les traces de Nemuri. Je serais devenue une héroine.

ChrysalismOù les histoires vivent. Découvrez maintenant